Les deux otages espagnols qui avaient été enlevés dans le désert
mauritanien en novembre dernier avec une autre humanitaire espagnole par un
groupe d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), ont été libérés. Lundi,
l'annonce a été faite officiellement par le gouvernement espagnol qui n'a pas
donné plus de détails sur les conditions de cette libération et particulièrement
s'il y a eu paiement de rançon. Détenus depuis novembre par le groupe de
Belmokhtar, les deux humanitaires espagnols devaient être libérés hier lundi,
en milieu de journée à la frontière entre le Mali et le Burkina Faso, a indiqué
une source sécuritaire au Mali, d'où l'opération a été organisée. «Le
dispositif mis en place est qu'un hélicoptère vienne les chercher à la
frontière où ils sont attendus d'un moment à l'autre», a encore précisé la même
source. Ensuite, l'hélicoptère devait les emmener vers la capitale burkinabé,
Ouagadougou, d'où ils seront rapatriés directement en Espagne. Cette
libération, un moment hypothéquée par une intervention musclée et sans
résultats, de troupes d'élites françaises en Mauritanie où un autre groupe
d'Aqmi détenait un otage français, Michel Germaneau, qui a été ensuite exécuté,
laisse de nombreuses zones d'ombre. D'abord, le groupe qui détenait les deux
Espagnols, contrairement à celui d'Abou Zeid, est plus intéressé par l'argent
que rapporte le commerce des otages européens, plutôt que par des cadavres sans
intérêt. Ensuite, il y a cet énigmatique transfert par Nouakchott, il y a juste
une semaine, du Malien Omar Sid'Ahmed Ould Hamma, dit «Omar le Sahraoui»,
condamné à 12 ans de prison assortis de travaux forcés pour avoir été, en fait,
l'instigateur de l'enlèvement des humanitaires espagnols, le 29 novembre 2009
en Mauritanie.
Rôle trouble de «Omar le Sahraoui»
Lors de son interrogatoire il avait clairement indiqué avoir agi pour de
l'argent et pour le compte d'Aqmi. Le groupe de Belmokhtar a ensuite transféré
les otages espagnols au nord du Mali où il possède une retraite sûre et
protégée. Une autre Espagnole otage, enlevée en même temps que Pascual et
Vilalta, Alicia Gamez, avait été libérée en mars dernier. Selon des analystes,
l'extradition par Nouakchott vers son pays de «Omar le Sahraoui», est perçue
comme un geste qui a contribué à la libération des deux Espagnols, moins d'une
semaine après son départ de Mauritanie. «Pour Aqmi, le fait qu'Omar soit
transféré au Mali est une victoire. La Mauritanie a fait un geste. C'est très
important», affirme au Mali une source proche du dossier des otages espagnols,
détenus dans le nord malien. La Mauritanie a toujours fait preuve d'une grande
fermeté à l'égard d'Aqmi et ses relations s'étaient considérablement tendues
avec le Mali quand ce pays avait libéré quatre islamistes en échange de celle
d'un otage français, en février dernier, Pierre Camatte. En fait, les
événements sont liés et des négociations très serrées auraient été menées entre
les négociateurs espagnols et les membres du groupe d'Aqmi, via des
intermédiaires au Mali, et très probablement avec la complicité de «Omar le
Sahraoui». Car moins d'une semaine après la confirmation en appel le 11 août de
sa condamnation à Nouakchott à 12 ans de prison et de travaux forcés pour ces
enlèvements en tant que «mercenaire» d'Aqmi, «Omar le Sahraoui» était mis dans
un avion pour Bamako. Des témoins rapportent qu'il n'était pas menotté pendant
le voyage et a été récupéré par les forces maliennes de sécurité qui l'ont
emmené vers une destination inconnue. »Où va t-il purger sa peine ? Ira-t-il en
prison ? Fera t-il des travaux d'utilité publique ? Sera-t-il mis en résidence
surveillée ? A toutes ces questions, nous n'avons pour le moment, pas de
réponse», reconnaît une source au ministère malien de la Justice. Marié à une
femme originaire du Sahara Occidental, «Omar le Sahraoui», 52 ans, est avant
tout un commerçant, fin connaisseur de l'ensemble des pays de la région
sahélienne qu'il avait l'habitude de parcourir de long en large et où il a su
tisser des liens avec les diverses tribus qui la composent. »Son extradition
répond à plusieurs exigences, dont la plus importante pour Aqmi est d'abord le
rôle de guide expérimenté d'Omar dans ce grand désert, la chaîne des relations
bâtie dans ces différentes contrées», estime Isselmou Ould Salihi, directeur du
journal mauritanien «Tahalil Hebdo», spécialiste des organisations islamistes.
Tant qu'il y aura des rançons
Cette expertise du Sahel présente «des avantages incalculables dont tout
le monde pourrait en profiter», ajoute Ould Salihi. Son extradition «est peut
être significative dans le processus de libération des Espagnols», selon lui.
Pour autant, beaucoup estiment que la libération des deux derniers otages
européens n'a pas été faite sans qu'une rançon ne soit payée au groupe des
ravisseurs, celui de Mokhtar Belmokhtar qui est considéré par les experts
d'Aqmi comme un homme d'argent plus que comme un religieux. Contrairement à Abdelhamid
Abou Zeïd, qui dirige un autre groupe d'Aqmi dans cette région, et responsable
de la mort des deux otages occidentaux, le Britannique Edwin Dyer et le
Français Michel Germaneau. Il aurait exigé de Belmokhtar l'exécution des
Espagnols en représailles à un raid militaire franco-militaire mené le 22
juillet pour tenter de retrouver Germaneau, au cours duquel sept des membres de
son groupe ont été tués. La porte des prises d'otages dans le sahel n'est pas,
pour autant fermée, comme celle qui encourage les groupes d'Aqmi à leur sport
favori, par la faute de gouvernements européens qui cèdent aux exigences des
terroristes et paient de fortes rançons, envers et contre leurs propres
recommandations en matière de lutte contre le terrorisme.
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Posté Le : 24/08/2010
Posté par : sofiane
Ecrit par : Yazid Alilat
Source : www.lequotidien-oran.com