Algérie

Sahara occidental : le plan d'autonomie marocain hors la loi



Le récent rapport du secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, sur la situation des droits de l'homme dans les territoires sahraouis occupés par le Maroc et les nombreuses entraves rencontrées par la Minurso dans l'exercice de sa mission, semble avoir porté un coup au royaume alaouite dont il lui sera difficile de se relever.
Quelques semaines à peine après avoir été présenté à la tribune des Nations unies, il a déjà eu pour effet d'isoler Rabat au plan diplomatique et de faire prendre conscience à la communauté internationale du bien-fondé des revendications du Front Polisario.
Cela expliquerait la raison pour laquelle il collectionne ces derniers temps les revers diplomatiques. Le dernier camouflet en date vient de lui être infligé par le très influent Ordre des avocats de New York (Etats-Unis d'Amérique) qui qualifie carrément d'«illégale» toute solution au conflit excluant l'option d'indépendance dans l'exercice du droit à l'autodétermination du peuple sahraoui. L'association qui, pour la précision, a été sollicitée par les décideurs américains pour leur fournir des éclairages juridiques et, par la même occasion, des conseils concernant éventuellement la conduite à tenir face au problème sahraoui fait, bien entendu, référence au plan marocain d'autonomie auquel elle reproche de fouler aux pieds le droit international.
Dans un rapport fouillé d'une centaine de pages intitulé «Les questions juridiques liées au conflit du Sahara occidental», rendu public lundi, l'association soutient, à ce propos, qu'en vertu du droit international, «le droit à l'autodétermination exige que les Sahraouis aient la possibilité de déterminer librement leur statut politique et que cette détermination doit inclure l'option de l'indépendance». En clair, il est demandé au Maroc d'intégrer aussi l'idée qu'un jour le Sahara puisse devenir indépendant.
«Le Maroc n'a aucune souveraineté territoriale sur le Sahara occidental»
Truffée de références, cette étude, qui retrace avec une précision d'orfèvre la genèse du conflit sahraoui, fera certainement l'effet d'une douche froide au palais du roi Mohammed VI, d'autant plus qu'elle émane d'un pays «ami» et fait voler en éclats le principe de la «marocanité du Sahara» sur lequel le makhzen fonde sa politique tant intérieure qu'extérieure depuis près de trois décennies. Les avocats new-yorkais rappellent ainsi que la Cour internationale de justice a déjà statué que «le Maroc n'a aucune souveraineté territoriale sur le Sahara occidental». Pour enlever tout argument susceptible de permettre au gouvernement marocain de rebondir, la même source fait observer que si certains différends internationaux avaient été, certes, résolus sans l'option de l'indépendance, de telles situations ont eu lieu en dehors du contexte colonial. Or, note-t-elle, «il est incontestable que le Sahara occidental s'inscrive parfaitement dans un contexte colonial classique et selon les exigences spécifiques de la résolution 1514 qui prévoit l'option de l'indépendance».
Après cet exercice didactique qui, pour ainsi dire, réduit à néant le travail de lobbying effectué jusque-là par le Maroc dans les milieux diplomatiques internationaux pour sortir du cadre la résolution 1514, l'Ordre des avocats de New York conclut que «la limitation du choix du peuple du Sahara occidental au plan marocain d'autonomie ne se conforme pas au droit international». «(') Tout plan qui élimine l'option d'indépendance pour l'exercice de l'autodétermination des Sahraouis est illégale au regard du droit international», insiste l'organisation new-yorkaise des avocats. Celle-ci termine son rapport en mettant en garde «la communauté internationale pour qu'elle s'abstienne d'imposer au peuple sahraoui, sans son consentement, un plan excluant l'option de l'indépendance». La mise en garde est assurément adressée à la France et à l'Espagne qui demeurent les principaux défenseurs du plan marocain d'autonomie.
L'exemple soudanais
Le royaume alaouite, qui paye ainsi chèrement sa décision de s'attaquer à l'envoyé spécial de l'ONU pour la Sahara occidental, le diplomate américain Christopher Ross, après l'avoir empêché de se rendre dans les territoires occupés, se voit aussi recommander la conduite à tenir pour éviter de continuer à évoluer à la marge de la communauté internationale. Les avocats new-yorkais préconisent notamment l'exécution du plan de règlement ONU-UA selon lequel «le référendum doit être mené par la Minurso en conformité avec les dispositions du plan de règlement convenu par les parties au conflit, avec une liste des électeurs établie par la Minurso, sous la supervision du Conseil de sécurité et de l'UA». S'appuyant sur l'exemple du règlement de la crise soudanaise, l'autre solution proposée consisterait à «mener des négociations avec des conditions préalables qui exigent toutes les options pour l'autodétermination dont celle de l'indépendance, avec un calendrier pour ces négociations, après quoi, si aucun accord n'est atteint, un référendum sera organisé avec toutes les options disponibles».
Une chose est sûre, les avocats new-yorkais soutiennent qu'«il y a une incohérence entre le principe d'autodétermination, confirmé à plusieurs reprises par les résolutions de l'Assemblée générale de l'ONU sur la question d'inclure l'option de l'indépendance, et les actions du Conseil de sécurité, en se bornant à demander aux deux parties au conflit de poursuivre les discussions pour une solution politique sans conditions préalables».
L'Ordre des avocats de New York fait observer que sans de telles actions, «le différend va se poursuivre et le statu quo sera maintenu au profit du Maroc qui contrôle la majorité du territoire sahraoui». Aussi, les rédacteurs du rapport réaffirment-ils que «les membres du Conseil de sécurité et l'Assemblée générale de l'ONU ainsi que la communauté internationale ont l'obligation de faire respecter les principes du droit international et de faciliter la résolution du différend sur le Sahara occidental d'une manière conforme à ces principes».
Voilà une chute assassine qui devrait certainement donner des nuits blanches au souverain marocain, d'autant plus qu'il sait que les destinataires (le gouvernement américain) du document n'aiment pas se répéter.




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