Algérie

Sa formidable veille au consternant déclin


Par Abbou Abdelkader Dadi *
Ce préambule ne saurait, à lui seul, étoffer l'essentiel du parcours de ces honorables représentants de notre culture, de nos arts. Leur rendre justice, et les reconnaissances, pour ce qu'ils ont offert, de gratifiant à ce grand pays, n'est que justice. Après une voltige, descriptive dans l'axe socio-culturel, j'ai modestement esquissé l'approche, chère pour la mémoire collective. Et, à la lumière de ce qui se produit, ici là, dans les différents édifices des arts. Une symbiose d'éléments antérieure, et actuelle, des ouvrages culturels pluriels: lyriques, dramaturgiques, picturaux, littéraires, lesquels cristallisent à eux seuls notre esprit, toujours présents, et ce, malgré les heurts, insuffisances de toutes sortes: structurelles, humaines, matérielles, et autres. Par cette évidence palpable, par laquelle l'ordre de la mouvance artistique ne peut se mouvoir, ni se réhabiliter selon les normes professionnelles requises, édictées par la corporation, ni même, par ces autres aux profils... censés être l'appareil initiateur, incitateur, et pourvoyeur à toute démarche de ce secteur névralgique, du courant socioculturel du pays, notamment envers la sphère artistique.
À l'instar de ces considérations, la raison nous dicte notre passé indélébile, sur l'historiographie, récente, celle de Novembre-1954. Période ultime où la culture de souche subissait l'incroyable diktat, infligé par l'Etat colonial, son forcing, ses tueries, ses exactions invraisemblables, à la mystification à outrance, spoliant les richesses matérielles, culturelles, mettant à nu l'état social des «Indigènes». Se glorifiant pompeusement «un Etat civilisationnel...», et quelle civilisation! À l'époque de l'éveil, l'endurance des hommes valeureux, nourris d'un savoir millénaire, à l'imposable appel identitaire, jaillit l'ère évènementielle. Ce fut la première révélation des autochtones, détenteurs d'une culture édifiante, engagée, porteurs de valeurs constructives, identificatrices. 1962, l'art, la culture émergeront, régissant un tant soi peu, ce phénomène évènementiel, aux effets évolutionnistes, de l'engagement sur certains acquis.
L'artisan meurtri
Cette entreprise confortera certains milieux, modelant un art obéissant à un «stylisme», se traduisant par une variante au sens linéaire, aspects, genres et sujets, d'un produit aux faits des évènements. Attitudes qui nous renvoient à un mode d'expression conditionnel, socialisé, et propagandiste. D'où le rejet des initiatives progressistes, ordonnant aux oeuvres leurs effets et leurs valeurs réelles, nationale, et universelle. L'art se veut, depuis l'ère paléolithique et néolithique, un sujet de recherche, de développement effectif, des sociétés naissantes, selon les constances diversifiées. L'Algérien a ce potentiel à même de fructifier cette étendue de savoir, en raison de cette symbiose culturelle, de ce beau pays.
Ainsi, ces digressions constantes, touchent de plein fouet le fin fond de l'artisan, déjà meurtri par ces aléas, tous corps et genres confondus, à telle enseigne qu'il n'arrive plus à réagir, dans nombre de circonstances. Peut-il s'investir, dans ce cadre respectueux, et honorable, si ici et ailleurs, il est détourné de sa scène nourricière, pour multiples raisons, dans l'expectative' «Il n'y a pas de vie sans le culturel, c'est indéniable», déclamait le grand dramaturge Ould Abdelrahmane Kaki (1934-1995), lors d'un colloque international, décryptant le savoir culturel, les conditions improbables. Et, l'irréparable gestion, pratique aventuriste, unique dans l'histoire de la culture algérienne: l'exemple des festivals budgétivores, aux sommes faramineuses, dépassant l'entendement, oubliant l'essentiel de notre mission honorable.
Cette nomenclature avec ses désillusions bureaucratiques, ses caprices, et réflexions subjectives, au détriment du corps battant de l'artiste, toujours en attente de jours meilleurs. De l'aventurisme, malgré les efforts d'hommes de culture avérés. Attesté un air de satisfecit, d'un produit fiable aux abords structuraux représentatifs: de «représentations», «concours», «expositions», «festivals» circonstanciels! aux exhibitionnismes extravagants, imaginés, contrariant, en marge des réalités, le tout embourbé de «tas d'arts», flanqué à la face du public' Public avide, dépaysé par cette cacophonie de choses existentialistes, faisant fi des voeux auxquels aspirent les uns et les autres. L'art est immuable, et universel et ses figures emblématiques avec. Bienveillants, engagés, ils sauront de tous temps revaloriser ces valeurs, c'est leur génie indescriptible. L'inadéquation envers l'artiste, est a contrario avec la réalité, occultant les multiples faits, des aléas, des cicatrices béantes, méprisantes, jusqu'à leurs disparitions.
Marasme général
Expédié dans un autre monde, il ne peut répondre aux exigences, doléances, en rapport des comportements irresponsables. Peut-on faire valoir ces richesses, sans faire appel à ces chantres, culturellement prouvés' Faire un constat, sans discrimination de rang, tous genres assimilés, est nécessaire. Qu'a-t-on fait pour cette gent aux multiples mérites: quant aux considérations au pluriel' Et l'ordre d'éthique et déontologique prôné souvent sur les toits' Et les satisfactions (légitimes) de l'artiste: en compréhensions, aides, prises en charges: artistique, sociale, financière, entre autres. Certes, ce geste, d'une carte d'assistance...mais objectivement, peut-elle à elle seule, assurer une prise en charge effective'
L'art n'est pas une chose statique, sans mouvements, il est l'élément en gestation constante, abordant tous les temps, se confondant avec milieux, us et coutumes. Peu d'artistes, dans ce cadre, n'apparaissent ici, ou sous d'autres cieux, ce marasme général, touche toutes les sphères d'art, et est affligeant. Que devient le statut de l'artiste, avec ses tenants et aboutissants, ses axes constitutifs pour sa réhabilitation' Voilà plus de 30 années (1990), une panoplie d'hommes de lettres, et d'artistes, les défunts, Dr Laâdi Flici, Habib Hachlef, Belaroussi, Aicha Haddad, Abbou A Dadi, et consorts (Cercle Culture et Progrès), avions établi une plate-forme de ce statut, définissant les contours essentiel, depuis, qu'advient-il'''.....
Que dire du nombre d'éditeurs, à l'esprit mercantile, à l'endroit des auteurs, afin d'accepter leurs oeuvres, etc. Des actes flagrants, aux refus camouflés. Et les droits d'auteurs, des membres marginalisés, ô combien stimulateur de la vie artistique. Préserver ce patrimoine pluriel est vital et ne peut être impacté par des attitudes réfractaires. D'ou, un choix d'appréciation des normes, seul élément différentiel du produit, pour préserver les valeurs intrinsèques nationales.
Et l'absence d'un marché de l'art: ses démarcheurs, son mécénat, ses critères initiatiques, critiques d'art' Cette nomenclature doit être entretenue par des repères indiscutables. Des petits musées, diversifiés, bibliothèques multiservices, mobiles, galeries d'art efficientes, librairies pluridisciplinaires, espaces culturels (mairies), centres culturels, M.J, et autres, instituées par l'autorité compétente, et privée. Une panoplie irréfutable, pour parachever ces démarches. La logique, interpelle notre conscience, aux con- cernés, à l'avant-garde de la scène, dans l'ordre de la création, de la gestion de la culture. Et, l'implication naturelle des universitaires, chercheurs, et médias compétents, à la faveur de l'artiste. Soumettre un projet reflétant les réalités, celles qui conviennent, et s'adaptent aux normes, aux aspirations de chacun. Une ossature d'éléments actualistes, constituant, enrichissant nos valeurs mutuelles, vers l'outre-mer.
Culture aliénante
Fait irréversible, pour construire cette membrane culturelle incontournable, inévitable. Toute contenance se construit avec la technique, l'expérience, la compétence, à l'image des pays qui réussissent dans ce même schéma, aux créneaux innovants. L'artiste, ne cesse de clamer, d'éveiller ces âmes «bienveillantes», que ce segment peut aboutir par ses éléments, clé de voûte de la réussite. Ce corps éclairé, est appelé à s'auto-organiser, s'autoprogrammer, s'autodéterminer, aux évènements, et avènements. À l'effet de réhabiliter ces richesses à l'image de son temps. L'art est un outil référentiel évident, c'est indéniable, et, ne peut être l'apanage d'individus, au détriment des artisans de souches. L'artistique est la matrice, symbole du bien-être, et non l'objet d'une quelconque intention délibérée, impromptues, ou un folklorisme déformant.
Des Faits aberrants, sur une culture aliénante, et prétextes de démotivation. Fragilisé, aux airs «modernistes» dénaturant, les résultats visibles, navrants, l'artiste s'en trouve déconnecté, et dénudé. Les martyres, vivant cette filature de séries noires, engouffraient dans l'anti chambre, avec eux, leur savoir intarissable jusqu'à leur mort.
La règle qui vient à l'esprit, est de mettre au clair ces dégâts, émettre un (r)appel à qui de droit pour réévaluer l'état désolant. Elucider tous les paramètres sensibles: humains, structurels, financiers, etc. Reconnaitre par devoir, par raison, la légitimité de l'artiste dans ses droits d'écoute, eu égard à la déontologie du métier noble. La culture demeure notre mémoire nourricière, de notre conscience collective. Porteur de ce fruit, il consent continuellement, avec ses tripes, à la refondation de cet édifice, car il incarne nos valeurs intrinsèques. Aussi, la déperdition des oeuvres, inestimable, en arts picturaux des maîtres Omar Racim, Med Khadda, Med Issiakhem, Hakar, Chegrani, Abbou Dadi, et consorts. oeuvres d'une valeur particulière. Situations prises avec désinvolture, à l'endroit de l'artiste. OEuvres non classées, par tendances et genres, la qualité, etc, un état qui perdure, des artistes, de leurs biens. Evaluant ces valeurs, tous genres confondus, des richesses qui partent en fumées.
Grands meddahs, musiciens, poètes...
De ces attitudes inconscientes, la substance régénératrice, stimulante, insufflera ce désir d'engagement aux générations futures, délivrant la nature de l'homme antinomiste, rejet du merveilleux, au rayonnement sociétal. Cette constante multiculturelle se situe dans l'infini terroir des temps, se réappropriant la manne multiforme, la ressuscitant de ce marasme. Régir avec conscience l'ordre organisationnel, relève du secteur de la culture. L'art, dans son acceptation large, émane de ces composantes (linguistiques, culturelles, humaines, etc.), autre objectif vers l'universel, et aux artistes de s'affirmer en tant que tels, en valorisant cet acquis. Les moyens structuraux, et humains, sont la pierre angulaire, pour rehausser cette charpente. «Une nation sans culture est une nation morte», signifiait Confucius (551-479-Av-J.-C.), allusion au savoir. Notre grand meddah, musicien, poète, historien, des halkate, n'est-il pas ce légendaire homme de culture'
Des situations épiques, reconduites par nos bardes, avec les Bachtarzi, Ksentini, A. Kaki, Alloula, Abdelkader. Med Tahar, Tahar F, Wahbi, Hadj El Anka, Hamada, Akli Yahyaten Racim Med, Nasredinne D, Issiakhem, Khadda et Baya - Sidi Lakhdar Benkhelouf, Mohand Ou M'Hand, Ben Msaieb, Assia D, Kateb Yacine, Mouloud.F, et autres, sont l'infime partie de ces dignitaires. Ces figures de proue que le temps a sournoisement effacées, n'épargnant aucune tendance. Ce silence complice, insignifiante présence, reléguant l'oeuvre constructive dans un monde d'ignorance. Explorant les réalités, de ce que nous sommes nous. Une mission ardue, mais pas impossible. Ces apôtres bâtirent notre culture, modèle édifiant, impressionnant, malheureusement ternie par la bêtise humaine. Cet écrit, se veut un ton fort des sacrifices. L'art se construit avec ses artistes, riche et révélateur. Sans eux, notre culture ne serait, ce qu'elle est. Qu'ils trouvent dans ces modestes lignes, toute notre gratitude, notre reconnaissance, et à ceux dans l'au-delà, Allah yerhamhoum.
*Artiste peintre - Ecrivain - bAncien professeur des arts et culture.
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