Algérie

Ruée inédite vers le phosphate algérien : Ferphos sous pression



Ruée inédite vers le phosphate algérien : Ferphos sous pression
A cela une raison, un enjeu de taille : des commandes fermes de phosphate algérien de pas moins de 5 millions de tonnes émanant de diverses parties dans le monde, un record jamais égalé depuis 1983, date de création de l'Entreprise nationale du fer et du phosphate Ferphos Group, la société mère.Honorés, les contrats en attente de signature pourraient propulser notre pays au rang des leaders mondiaux. D'autant que les deux milliards de tonnes de réserves expertisées, 4e au monde, peuvent conforter son ambition d'asseoir son leadership sur l'arène internationale. Même si une telle place n'est point une sinécure, il n'en demeure pas moins qu'une place parmi les cinq premiers exportateurs de la planète demeure encore envisageable à  condition de parer à  un seul et unique obstacle : le transport. Le Transport, ce talon d'Achille En effet, la Société nationale des transports ferroviaires (SNTF), partenaire exclusif de Somiphos Tébessa, n'arrive plus à  satisfaire les besoins d'acheminement du minerai depuis les sites miniers vers les installations portuaires de Annaba d'où est exporté le produit de Somiphos, la filiale numéro un du Groupe Ferphos, nous explique une source du ministère de l'Energie et des Mines. Pour preuve : seulement 600.000 à  700.000 tonnes transportées à  septembre 2011 sur 1,1 million de tonnes. Soit à  peine 60% des engagements contractuels. Ce qui n'a pas tardé à  impacter les objectifs à  l'export avec l'équivalent de trois mois d'exportation de perdus, tient à  souligner notre source. Un déficit lourdement pénalisant auquel l'entreprise tente de contourner en faisant appel à  des transporteurs privés. La trentaine de camions gros tonnages (dont près de la moitié est en panne), parc roulant dont dispose la Société de transport routier de minerais Sotramine -une autre filiale du groupe minier Ferphos- s'est finalement avérée n'être que d'un très modeste apport. Appel est, à  ce titre, lancé à  l'adresse des pouvoirs publics pour intervenir en mobilisant plus de moyens pouvant aider la SNTF à  améliorer ses performances. Il s'agit d'éviter que cet élan ne soit freiné et permettre à  Ferphos ainsi qu'à sa filiale phare d'en finir avec ce goulot d'étranglement, devenu de plus en plus embarrassant. Car il risque de plomber durablement une année pourtant entamée sous de bons auspices et de réduire à  néant tous les efforts consentis des mois durant par les travailleurs. En cause, à  Somiphos, l'on a beaucoup peiné à  redresser la barre après plusieurs mois d'incertitudes et de crises sociales, commerciales et financières étouffantes. Somiphos a même vu sa réputation sur le marché international sérieusement entamée, sa crédibilité vis-à-vis de ses clients tout aussi altérée. Pour les quelque 2.400 travailleurs, l'heure est au don de soi, à  la remise en cause collective. Ils vont devoir faire abstraction de leurs états d'âme respectifs longtemps dominés par l'esprit tribal et se concentrer sur l'essentiel, à  savoir détermination, engagement, rigueur défensive et efficacité. Parce que ce n'est que des mois après qu'ils se sont rendus compte des prolongements des retombées de la grève ayant paralysé l'entreprise pendant plus d'un mois (du 27 avril au 2 juin 2011). Plus de 8 milliards de dinars de chiffre d'affaires en 2011 Le deuxième semestre a, en conséquence, été entamé avec un reliquat de contrats déjà signés et non livrés de 780.000 tonnes. Conséquences immédiates : les 1,5 million de tonnes, arrêtés au titre d'objectifs pour 2011, n'ont pas été réalisées. «Nous avons démarré le deuxième semestre avec des résultats négatifs, héritant de dizaines de contrats non honorés. Le scénario catastrophe se dessinait. Il aura fallu jouer la carte de la mobilisation pour permettre à  Somiphos de se redéployer sur le marché international. Nous avons réussi à  équilibrer la situation et à  rétablir la paix sociale à  travers la stratégie adoptée par le staff dirigeant et la coopération des travailleurs», se félicite une source syndicale locale. Une fois l'effroi passé de se retrouver avec la lanterne rouge, Somiphos devait agir à  l'international et se racheter auprès de ses clients. Un autre pari de gagné vu les résultats réalisés à  fin septembre 2011, meilleurs comparativement à  ceux atteints durant la même période de 2010 malgré des volumes beaucoup moins importants : 1,1 contre 1,6 million de tonnes. L'inconnue de cette équation ' Une substantielle révision à  la hausse des prix. Somiphos a réussi à  vendre son phosphate à  environ 140 dollars/t, soit le quasi-double des prix appliqués au début de l'année. «Le marché est aléatoire, le phosphate n'étant pas un produit boursier. Nos marges de manœuvre sur les prix sont larges. Notre service a réussi à  imposer le minerai algérien en alignant son prix sur ceux appliqués par les leaders mondiaux», a, pour sa part, précisé un cadre de l'entreprise. Paradigme rentier La pénétration de nouveaux marchés qui lui étaient inaccessibles est l'autre facteur ayant permis à  l'entreprise de grignoter des parts de marché non négligeables au «club» des géants mondiaux de l'industrie du phosphate tels que le Maroc, la Chine et les USA. Outre l'Europe, une bonne part de la richesse dormante –phosphate brut dit rock - dont regorge le bassin de Djebel Onk au sud de la wilaya de Tébessa - a ainsi pu àªtre placée en Asie du Sud et du Sud-Est ainsi qu'en Amérique latine. Ce qui a permis à  Somiphos de boucler l'exercice 2011 avec plus de 8 milliards de dinars au titre de chiffre d'affaires et de renflouer la trésorerie de la société mère laquelle survivait des 45 millions de dollars, des économies totalisées à  fin 2009. Des résultats, certes, à  même de rendre légitime l'euphorie des responsables de Somiphos et de Ferphos Group, tous fraîchement installés, mais globalement, pour  notre pays, il n'y a pas de quoi en àªtre très fier. Que représentent 1,5 million t, seuil jamais franchi,  par rapport aux deux milliards de tonnes de réserves confirmées, et ce, malgré les capacités installées s'élevant à  deux millions de tonnes dont est dotée Somiphos ' Puis, contrairement à  ses concurrents arabes tels que le Maroc, la Tunisie, l'Egypte ou la Jordanie, pour ne citer que ces exemples, qui enrichissent et transforment sur place l'essentiel de leurs productions respectives en produits plus rémunérateurs, l'Algérie a toujours préféré exporter son phosphate à  l'état brut, esprit rentier oblige.
Ne serait-il pas plus judicieux de saisir l'occasion de la bonne conjoncture actuelle et des perspectives du marché des fertilisants pour accroître son potentiel industriel en transformant le gaz naturel et le phosphate qui rapportent plus de valeur ajoutée (10 fois le prix des matières premières) et d'emplois ' D'autant qu'en bons visionnaires, les experts du FMB Group,  une maison d'édition basée à  Londres -référence mondiale dans tout ce qui a trait à  l'actualité de l'industrie des engrais, de leur commerce international et de leurs marchés- avaient vu juste, il y a plus d'une dizaine d'années. En 2000 déjà, ils avaient, en effet, prédit le grand stress qui allait s'emparer du marché à  partir de 2012 : une très forte demande contre une offre des plus dérisoires avec comme facteurs générateurs le délestage et la fermeture de plusieurs usines aux USA et en Europe du fait de l'augmentation du prix du gaz naturel. Et, à  l'exception de notre pays qui n'a d'ailleurs jamais manqué de participer aux conférences cycliques du FMB organisées partout dans le monde, tous les pays producteurs avaient pris acte desdites prédictions. Aussi, bien qu'il y soit membre qui a son mot à  dire, notre pays semble faire fi des indices sur les tendances du marché fournis lors des congrès annuels de la très puissante International Fertilizer Industry Association (IFA) dont il a toujours tenu à  y participer. Décidément, nos gouvernants ont du mal à  se libérer du paradigme rentier.                   


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