Algérie

Routes clandestines : Dans la peau d?un harrag



Les candidats à l?eldorado européen arrivent rarement à destination. Cela n?entame en rien leur détermination. Pour eux, leur vie n?est pas un prix excessif pour le voyage. Serge Daniel a endossé l?identité d?un clandestin pendant quatre ans. Paris : De notre bureau Voilà un livre à mettre entre toutes les mains, surtout celles des responsables africains. Serge Daniel a le mérite de donner la parole à ceux qui en sont privés, de donner corps à une abstraction, d?humaniser ces personnes que les autorités considèrent comme délinquantes. Harraga à Alger, clandestins au Bénin, ces hommes et femmes fuient la misère et le mépris. Et c?est parce que leurs gouvernements n?ont pas su ou voulu leur donner de meilleures conditions de vie qu?ils affrontent l?exil au prix de leur vie. « Ce qui nous fait partir c?est la misère. Mais nous avons aussi le sentiment que personne ne veut de nous, que personne ne s?occupe de nos problèmes. Ce n?est pas mon cas, mais beaucoup d?entre nous subissent la pression familiale. C?est la famille démunie qui demande à l?enfant ou aux enfants de partir. Quand tu ne pars pas, tu es même parfois maudit. Si les parents n?encourageaient pas les départs, beaucoup ne partiraient pas. Mais quand la famille se déchaîne contre les enfants, les traite de tous les noms, en insistant sur leur départ, ça devient un défi à relever », dit Doudou Ndiaye, jeune Sénégalais de Saint-Louis. Ces paroles auraient pu être tenues par un jeune Algérien, Ivoirien, Malien? Le journaliste béninois a décidé de vivre dans la peau d?un clandestin, de faire son parcours du combattant. Dans un périple qui l?a conduit de Lagos à Ceuta, enclave espagnole en territoire marocain, en passant par Lomé et Accra, Gao et Tinzaouatine à la frontière entre le Mali et l?Algérie, Serge Daniel s?est mué en un harag en partageant le sort des immigrés clandestins en route vers l?Europe. Son expérience est unique. Une expression sénégalaise, résume ce qui traverse la tête de ces candidats au départ : Barça ou Barsac, « Barcelone (l?Europe) ou la mort ». « Ceux qui sont morts en chemin sont des héros ». En héros, oui. Ils veulent gagner l?Europe à tout prix. Leur vie n?est pas un prix élevé. Quelquefois, ils échouent loin de chez eux, sans possibilités d?arriver en Europe ni de retour chez eux. Serge Daniel nous montre toute la douleur, la détermination de ces candidats au bonheur. Son enquête en Algérie est très révélatrice de la mentalité de nos responsables et de la population. Criminalisés, exploités, ils sont quelquefois aussi compris et aidés. On laisse la conclusion à un habitant de Maghnia. « Ces hommes doivent être décorés. Quand vous voyez des hommes se nourrir sur des décharges publiques, quand vous voyez des hommes et des femmes vivre dans cette misère, mais qui sont décidés à partir en Europe, aucun homme normal sur cette terre ne peut dormir la conscience tranquille ».


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