Algérie

«Rompre mentalement et psychologiquement avec le régime»



- La marche initiée par le RCD, samedi, a été violemment réprimée. Quelle est l'interprétation que vous faites d'un tel étalage de force de répression pour empêcher une manifestation pacifique '
Il est vrai que c'est le RCD qui a appelé à  cette marche mais personnellement, sans àªtre militant de ce parti, je considère qu'elle nous interpellait toutes et tous. Sa symbolique politique et citoyenne est importante à  plus d'un titre : mettre à  nu le pouvoir qui fait du mensonge un système institutionnalisé, se réapproprier la vie et l'espace publics confisqués et casser cette épée de Damoclès qu'est l'état d'urgence qui aura 19 ans le 9 février prochain. Au nom de l'état d'urgence, le pouvoir en place impose son statu quo, vit dans l'impunité et détruit structurellement la société. Dans un échec très coûteux, il est devenu synonyme d'insécurité nationale. Pour ce qui est de l'utilisation de la force, il est clair que le régime policier d'Alger ne repose que sur le viol de la Constitution et la fraude, la répression massive, la corruption et les réseaux régionalistes et familiaux. D'ailleurs, on s'est demandé, lors de cette marche interdite à  la place du 1er Mai comme à  Didouche Mourad, si le nombre de policiers n'était pas supérieur à  celui des marcheurs  !!   - Comment envisagez-vous l'après-22 janvier '
Cela dépendra de la conscience collective et surtout de l'engagement effectif de la société à  se prendre en charge dans sa diversité. Il ne s'agit plus d'égoïsmes partisans ou de calculs politiquement incorrects des élites et des mouvements animant la société. Je dirai plus encore : il ne suffit plus de changer le pouvoir actuel mais de rompre mentalement et psychologiquement avec le régime et ses ramifications et, par conséquent, sauver une Algérie réellement en danger. En termes sociopolitiques, le pays bouillonne et les milliers de foyers de tension qui se manifestent partout tendent dans leur majorité à  ce qu'on appelle en volcanologie «les volcans gris», c'est-à-dire à  irruptions explosives.
Il est à  noter, par ailleurs, que face à  l'autoritarisme, l'autisme et le mépris du pouvoir envers la société, les Algériens connaissent, aujourd'hui plus que jamais, un sentiment de survie contre les pulsions de mort qui leur sont infligées. Ce qui alimente en eux, de mon point de vue, la nécessité d'exorciser la peur et de se libérer des diktats totalitaires. A travers ses modes nouveaux d'organisation et de la «résistance» sociale et politique, la société et particulièrement la nouvelle génération ont compris que seule une synergie des forces peut détrôner «l'ogre» et donner une ultime chance à  l'Algérie pour àªtre de son siècle.  
- Vous àªtes signataire d'un appel pour une marche pacifique prévue le 9 février prochain. Où en est l'organisation de cette manifestation '   Je suis d'accord pour une marche nationale au mois de février pour la levée de l'état d'urgence et le reste des revendications communes, mais je suis signataire d'abord d'un appel pour le changement démocratique lancé par un panel d'universitaires, d'avocats et de militants des droits de l'homme, journalistes, etc. et puis, depuis vendredi dernier, partisan d'«une Coordination nationale» initiée avec la Laddh, plusieurs syndicats autonomes, quelques partis politiques et nombre d'associations et de collectifs militants sur l'ensemble du territoire national.Pour ce qui est de la marche du mois de février prochain, les partenaires de la Coordination discutent avec d'autres acteurs de la société pour réussir cette opération d'envergure. Et franchement, je ne suis pas mandaté pour parler en son nom. D'autres sont mieux placés que moi pour le faire.   - L'appel des intellectuels peut-il mobiliser, à  votre avis, les élites qui ont brillé par leur démission et certaines par leur compromission '   L'appel en question n'est pas un cadre partisan. Son objectif est de donner un sens politique autre que celui, digestif, donné par le pouvoir aux émeutes. Deuxièmement, interpeller les intellectuels, militants, journalistes, cadres, syndicalistes à  prendre position et à  recadrer les grandes priorités en termes de revendications ou d'actions. Les intellectuels démissionnaires et coupés de la réalité sociopolitique du pays rendent, par leur paresse, leur silence, leur complicité ou leur corruption morale, un service énorme  au pouvoir en place : ils prolongent sa vie et tuent, par contre, la société. D'ailleurs, ce dernier ne les considère pas comme tels, les humilie et se sent rassuré de leur côté. Nonobstant, la force des intellectuels engagés, aussi peu soient-ils, réside dans les idées et leur mise en projet et actions sur le terrain. De ce rôle déterminant, dans une atmosphère chaotique, naîtront l'ordre et l'Algérie de demain.
- Pensez-vous qu'un front pour le changement est en train de naître et quelle chance de réussite pourrait-il avoir dans un totalitarisme qui s'affirme de plus en plus '
Le front dont vous parlez est déjà là depuis longtemps. Il est simplement en vrac, sans un encadrement de type nouveau et  manque substantiellement de «nouveaux leaders». Face au vide et aux dangers, la société, par instinct collectif, trouvera inéluctablement des moyens pour juguler cette panne historique. Etant l'expression parfaite de la décadence, le  totalitarisme du pouvoir ne pourra jamais arrêter ni le mouvement de l'histoire ni la «volonté de puissance» du peuple algérien à  s'affranchir et à  réussir son changement démocratique.


Nous avons atteint un point de non retour avec une pseudo-démocratie à l'Irakienne.Un choix difficile à faire ,vu les sacrifices inutiles pour revenir au point zéro. Jamais un pays arabe ne sera un pays démocratique.donnez moi un seul exemple.
elmrouani - dindon de la farce - alger, Algérie

24/01/2011 - 10585

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