Algérie

RND: Les anti-Ouyahia reviennent à la charge


? L'instance nationale issue de la dissidence contre Ahmed Ouyahia exhorte la classe politique «à ne plus coopérer avec lui et de rejeter dans le fond et dans la forme toutes ses initiatives.»C'est l'une des revendications phares de ses membres qui veulent, disent-ils, «sauver le RND des griffes d'un secrétaire général mal élu.» Réunie jeudi dernier à Zéralda, à l'ouest de la capitale, les membres de l'instance dissidente dont le nombre a dépassé les 150 «entre membres exclus du Conseil national par Ouyahia, militants, cadres marginalisés et autres élus déchus», font part, dans le communiqué, qu'ils ont rendu public, de «leur forte inquiétude face à la situation que vit le parti, au plan politique et au regard de sa réputation chez l'opinion publique.» Les dissidents à Ouyahia l'accusent du malaise que vit le RDN et ce, écrivent-ils «à cause de son comportement irresponsable et de sa politique d'exclusion et de marginalisation des compétences ainsi que son alliance avec l'argent sale et son utilisation dans toutes les structures du parti, méprisant ainsi le principe du militantisme et ce, pour servi des intérêts personnels.»
L'instance dissidente affirme qu'«avec son insistance provocatrice de rester à la tête du parti, Ahmed Ouyahia démontre, encore une fois, qu'il ignore l'image que le peuple se fait de lui, et hypothèque, ainsi, les espoirs de tous les militants qui veulent participer, positivement, dans l'avenir de notre pays.» Elle exhorte les membres du Conseil national, les élus, les militants «à sauver le rassemblement des effets du narcissisme et de l'égoïsme de Ouyahia qui menacent l'existence même du parti.» Tout en exigeant «le départ immédiat de Ouyahia,» l'instance demande au Conseil national d'adhérer au processus qui est en marche pour l'organisation d'un congrès national extraordinaire rassembleur.»
Responsabilités active et passive du système
Ouyahia est visé, ainsi, par plusieurs tirs dissidents, en premier ceux de l'ensemble des militants du parti qu'il a exclus depuis plusieurs années du Conseil national et au-delà du RND «en dehors de toute forme de légalité», celui de Belkacem Mellah, ceux qui le soutiennent et qui se sont ralliés aux premiers et enfin ceux de dernière minute, très récents, de Seddik Chihab, le porte-parole du parti, limogé il y a à peine une semaine. En ces temps de débâcle des hommes du pouvoir et de leurs acolytes, il est important de convoquer l'histoire pour situer les responsabilités actives et passives d'un système qui a servi sans compter pour précipiter l'Algérie dans le dédale de la faute dans toute son ampleur. Le RND est né le 21 février 1997 par un congrès constitutif organisé au Palais des Nations de Club des pins. C'était le jour où «le clan de Constantine» avec à sa tête le général Mohamed Betchine dont le nom ne pouvait être prononcé publiquement de peur de représailles, apparaissait avec toute son équipe comme « pouvoir politique absolu.» Abordé par nos soins ce même jour, Betchine nous dira à propos de la naissance de ce parti du pouvoir, «félicitations pour l'Algérie.» Betchine était, faut-il le rappeler, conseiller de Liamine Zeroual alors président de la République après avoir emporté, haut la main, des élections qui se sont tenues en 1995, en pleine tourmente terroriste. Betchine avait donc décidé, quelque temps après cette élection, de créer un parti capable de supplanter le FLN qui lui échappait des mains. Il tiendra plusieurs réunions avec les hommes de l'ombre et ceux publics, à l'exemple de Abdelhak Benhamouda, alors secrétaire général de l'UGTA. Ce dernier était programmé pour être plébiscité par ceux qui devaient devenir, en un tour de main, militants de plein droit de la nouvelle formation politique. Entre autre prélude à ce coup de force, Benhamouda était passé à la télévision publique avec l'ensemble des membres de son secrétariat national pour décréter la fin de l'organisation syndicale parce qu'avait-il dit «personne n'est capable de la gérer comme il se doit.» Mais le sort en a voulu autrement. Benhamouda a été assassiné quelque temps après, par des terroristes juste à sa sortie de son bureau, dans l'enceinte même de la Maison du peuple, siège de la Centrale syndicale.
Le RND et la fraude du siècle
Betchine continuera de construire «son ?uvre» avec de grands responsables de l'Etat et avec l'aval de Zeroual. Il avait recyclé les ministres du gouvernement de l'époque avec à sa tête Mokdad Sifi, tout autant que de nombreux responsables d'institutions, de hauts fonctionnaires et des cadres de l'Etat, en militants du parti qu'il avait appelé «Rassemblement National Démocratique.» Il en avait exclu deux ministres à l'époque, Amar Makhloufi ministre de l'Energie et Abdessalem Bouchouareb ministre de l'Industrie «pour cause de comportement indigne de leurs parents durant la guerre de Libération nationale.» Amar Makhloufi n'avait pas digéré cet affront et nous avait appelé, au lendemain de la publication de l'article faisant état des étapes de la création du RND, pour nous montrer un volumineux dossier faisant foi de la forte participation de ses parents (père et mère) à la Révolution. Betchine a continué de ratisser large dans les associations et organisations satellites du FLN pour élargir les rangs du RND. Du jour au lendemain, le RND est constitué, mis en marche et lancé comme une foudroyante machine électorale. Il sera premier de la liste durant les élections législatives de 1997 et aussi des locales. Il raflera la mise au niveau de toutes les wilayas et plantera, ainsi, son grand frère ennemi dans une angoisse sans pareille. C'était la plus grosse fraude électorale que l'Algérie n'a jamais connue de par son histoire. Une commission d'enquête parlementaire avait été constituée pour revenir sur les élections et situer les responsables de cette frasque que la présidence de la République avait béni sans poser de problème. Le rapport de la commission est sans appel. Les faits de fraude sont hallucinants.
17 ans après, la dissidence à Ouyahia
Pour bourrer les urnes, les «militants» du RND avaient éteint les lumières dans les bureaux de vote, insulter les candidats des autres partis, malmenés leurs responsables, tabassé les récalcitrants, tout a été permis pour permettre au RND de trôner sur toutes les assemblées nationales et locales. Le rapport de l'enquête faisant foi. Le clan Betchine accaparera des pouvoirs considérables. Mokdad Sifi est démis de ses fonctions et remplacé par Ahmed Ouyahia. Ce dernier, sur ordre de la présidence de la République procédera au changement des P-DG des banques publiques nationales, écartera des cadres compétents, pourchassera des responsables d'institutions grâce à un appareil judiciaire complaisant et opportuniste. A l'époque, les banques publiques accordaient de lourds crédits aux responsables civils et militaires sans aucune garantie possible. C'était la loi du plus fort. Des crédits que les banques n'ont jamais réussi à faire rembourser.
A l'époque, Ouyahia est lui aussi passé à la télévision publique pour annoncer aux Algériens qu'il avait décidé de faire ouvrir des procès à des cadres « pour raison de détournement de deniers publics, marchés douteux et autres malversations.» Il l'avait aussi fait, quelque temps plus tard, pour faire savoir aux travailleurs algériens qu'il devait ponctionner leurs salaires pour combler des trous financiers de l'Etat. Là aussi, c'était Betchine et Benhamouda qui en avaient pris la décision et ont voulu rassurer les «ponctionnés» par la mise à leur disposition de bons de trésor.
Ouyahia se retrouvera à la tête du RND, quelque temps plus tard. Ses premiers dissidents, entre autres des membres fondateurs, se sont montrés au grand jour, en 2002, lorsqu'il les avait exclus du Conseil national. Dix-sept ans après, ils continuent leur combat contre cet enfant terrible du système qui va et qui (re)vient au gré des humeurs et des besoins des pontes du régime. Il est toujours secrétaire général du RND.
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