Algérie

Rio + 20 : La désillusion Economie : les autres articles



Le Sommet de la Terre Rio+20 vient de s'achever avec un bilan fort peu glorieux, malgré quelques avancées.
Placé sous le double thème de «Economie verte dans le cadre du développement durable et de l'éradication de la pauvreté» et «Cadre institutionnel du développement durable», les résultats obtenus sont constitués d'un tissu de v'ux pieux, destinés davantage à sauver la face. Le plus important reproche qui peut être fait au texte de l'accord présenté sous le titre pompeux «L'avenir que nous voulons» réside dans l'absence d'objectifs concrets et d'échéanciers pour les réaliser.
C'est quelque peu le refrain bis répété du Sommet de Copenhague.
Pourtant, 20 ans en arrière, le 1er sommet de Rio s'est tenu dans l'euphorie née de l'effondrement de l'axe du mal (Union soviétique) et a débouché sur des résultats tangibles. En effet, c'est le 1er sommet de Rio de 1992 qui a permis une prise de conscience mondiale des problèmes de l'environnement et sa relation dynamique avec le développement économique et social, d'une part, et donné naissance à la convention sur les changements climatiques et celle sur la biodiversité, d'autre part.
Au c'ur des négociations, 20 ans plus tard, se trouve l'imbroglio sur l'économie verte qui n'a été clairement décrite ni avant, ni après la tenue du sommet. Il est vrai qu'entre les pays développés qui ne peuvent s'ériger en modèles et dont les multinationales ne verdissent que la façade pour étendre le modèle ultralibéral à de nouveaux créneaux, les pays à économie émergentes qui ne cessent de mettre en avant le principe de la responsabilité commune mais différenciée des Etats pour ne pas apporter leur pierre à l'édifice si cela risque de compromettre leur croissance, d'une part, et les pays en voie de développement laissés en rade du développement mais qui aspirent légitimement à un meilleur équilibre entre les hémisphères Nord et Sud, d'autre part, la définition de l'économie verte ne peut avoir le même sens.
Que dire alors des ONG et de la société civile qui, ayant été les premières à mettre à l'avant la notion d'économie verte, la voient aujourd'hui transformée en super capitalisme dont il ne reste de vert que le nom. Subséquemment, ils remettent tout simplement en cause la capacité du capitalisme à répartir les biens communs, alors que jusqu'ici ce système n'a fait que créer des injustices.
Dans le peu de résultats obtenus à Rio+20, deux pays ont joué un rôle de leadership dans ce que l'on peut appeler l'axe du mal écologique. Tout d'abord, les Etats-Unis qui déjà à Rio (1992) ont annoncé la couleur avec G. Bush (le père de l'auteur du mensonge de destruction massive) et son fameux «mode de vie américain non négociable». Quant à l'actuel président, B. Obama, auquel un prix Nobel a été hâtivement attribué juste pour avoir exprimé de bonnes intentions, son recul sur ses engagements environnementaux n'a d'égal que sa courbure d'échine dans sa politique au Moyen-Orient. Fidèles à leur unilatéralisme, les Etats-Unis se sont implacablement opposés à l'idée de créer une organisation mondiale de l'environnement en mesure de coordonner toutes les structures de négociation internationale, car ils la perçoivent comme une rivale de l'Organisation mondiale du commerce (OMC).
L'autre pays qui a tout fait pour que la déclaration finale ne soit qu'une coquille vide est le Canada. Plus personne ne reconnaît ce qui se passe avec ce pays. Gouverné par des conservateurs depuis six ans, ce pays ne ressemble plus à la patrie des Casques Bleus. L'actuel Premier ministre a, du temps où il était le chef de l'opposition, qualifié le Protocole de Kyoto de «complot socialiste». L'année passée, le Canada s'est retiré unilatéralement de ce Protocole, se plaçant ainsi en marge de la légalité internationale. Aussi, dans le dossier environnemental, tout comme celui du Moyen-Orient, le Canada de Harper est en phase avec l'extrême-droite évangéliste américaine et a perdu toute autorité morale. «Nous sommes devenus un Etat voyou», s'est même exclamé Steven Guilbeault, fondateur d'Equiterre.
En dépit du peu de résultats obtenus, on ne peut pour autant dire que le sommet Rio+20 a été un échec total, ne serait-ce qu'en remettant le développement durable à la une des préoccupations et des RDV politiques. Rio+20 a également permis de mettre en exergue un mouvement mondial pour le changement, initié par la société civile, précurseur du sursaut salutaire de demain. Il y a aujourd'hui dans le monde plus d'un million d'organisations qui travaillent pour la justice sociale et environnementale. C'est d'elles que viendra le salut, y compris pour les pays en voie de développement qui s'accrochent encore aux basques de la Chine.
M. Benhaddadi. Exert en énergie, professeur-associé à l'Ecole polytechnique de Montréal

- Post-scriptum : Un beau cadeau pour la communauté algérienne établie à Montréal pour le cinquantenaire de l'indépendance de l'Algérie a été la conférence donnée par Hamou Amirouche, venu présenter son livre. Deux moments forts méritent d'être relatés. Le conférencier n'a à aucun moment essayé de revaloriser son rôle; bien plus, il a davantage mis en exergue celui de ses compagnons de fortune et d'infortune. C'est tout à son honneur. Le conférencier a également écorché l'idole de mon adolescence, H. Boumediène, pour séquestration criminelle. Un intellectuel ne peut regarder ailleurs et taire ce qui s'est passé chez lui : il se doit d'abord de dénoncer les crimes locaux avant ceux qui se passent sous d'autres cieux. Il y va de sa crédibilité.


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