Il y a dix-sept ans, une déferlante populaire ébranla Alger, puis divers lieux du pays. Une féroce répression visa les manifestants, des adolescents essentiellement, se soldant par des dizaines de morts et de blessés. La torture, qui fut pratiquée à large échelle par les services de sécurité de l?époque, entraîna de profonds traumatismes physiques et psychologiques. Tous les acteurs politiques et militaires au pouvoir à ce moment-là ont essayé de dégager ou de minimiser leur responsabilité, y compris le chef de l?Etat, Chadli Bendjedid. Ils s?accordèrent cependant tous sur la thèse du « complot », accusant les manifestants de céder à des « manipulations » externes, voire internes au régime. Dès les premières heures de la révolte, la sphère dirigeante tenta d?ôter à la révolte son caractère révolutionnaire, c?est-à-dire de contestation et de rejet de l?ordre établi. Ce dernier était incarné par le tout-puissant parti unique, le FLN, qui régna sans partage et d?une main de fer, privant le pays des libertés essentielles. La nomenklatura de l?époque s?était dotée de pouvoirs exorbitants lui permettant d?accéder à toutes sortes de privilèges. Mais aucune force politique organisée et conduite par un leader incontesté n?a pu émerger et faire de la révolte d?octobre une révolution accomplie, à l?image de celles de la Pologne et de la Géorgie. Le pouvoir de Chadli Bendjedid ne capitula pas, mais fut poussé à des concessions majeures. Sur le sang des enfants qui a coulé à flots poussèrent des libertés jamais connues depuis l?indépendance : multipartisme, presse indépendante, syndicats libres... L?Algérie retrouva la parole confisquée et s?attela à prendre son destin en main. Mais un des germes de mort du parti unique, l?islamisme insurrectionnel, intoxiqua la démocratie balbutiante. Légalisé par le régime pour en faire un allié et une bouée de sauvetage, le FIS fit volte-face et montra son véritable visage : la conquête du pouvoir et l?édification d?un Etat théocratique. La République n?allait être sauvée que grâce à la résistance de son peuple qui, dès les premières heures du terrorisme, saisit vite la nature du FIS et du projet néfaste qu?il véhicule. Mais au fil des années, les acquis d?octobre 88 reçurent coup sur coup, le tout dernier du Président Bouteflika affirmant que « la révolte d?octobre n?a aucun contenu démocratique ». Rien d?étonnant au vu du mépris du chef de l?Etat pour le multipartisme, la presse et les syndicats libres. Un sursaut de la pensée unique ébranlée, mais toujours nocive.
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Posté Le : 05/10/2005
Posté par : sofiane
Ecrit par : Ali Bahmane
Source : www.elwatan.com