Algérie

Revalorisation des indemnités des enseignants: Une brèche dans la politique des salaires



Les syndicats d'enseignants restent encore prudents après l'annonce des hausses des salaires. Ils ont appris à ne pas crier victoire prématurément. C'est qu'ils ont atteint, malgré les entraves, l'âge de la maturité. Les avancées engrangées par les enseignants vont-ils faire des émules ?  

Les salaires des Algériens sont tellement en retard que les syndicats, autonomes bien entendu, n'ont eu aucun mal à trouver dans les rémunérations des professions similaires en Tunisie et au Maroc une sorte de référence en matière de revendications. En Algérie, les écarts de revenus se sont creusés jusqu'à l'absurde au détriment des salariés. Les hausses de salaires annoncées pour les enseignants – qui demandent encore à voir – ne sont pas négligeables. Elles sont indéniablement le résultat d'une combativité jamais démentie des travailleurs du secteur et de leurs syndicats. Les hausses qui vont de plus 8.000 dinars à près de 11.000 dinars ont été arrachées de haute lutte. C'est sans doute ce qui restera même quand l'inflation aura écorné l'effet de ces augmentations. En dépit des dispositifs mis en place pour marginaliser les syndicats autonomes, l'opinion redécouvre que la lutte n'est pas vaine. Ces syndicats, après avoir contraint le ministre de l'Education à recourir à la lettre ouverte, amènent le gouvernement à consentir à un geste significatif. La mobilisation des syndicats et de leurs adhérents a été galvanisée par un contexte où les scandales financiers fleurissent et dans lequel le discours liant les salaires à la productivité a perdu tout effet. La première conclusion générale que tireront les travailleurs algériens, employés de l'Etat ou du privé, coule de source. Ceux qui sont organisés et soutiennent leurs syndicats ont bien plus de chance de se faire entendre que ceux qui

attendent… Godot.

Le combat syndical est payant

Le développement des syndicats indépendants - à moins d'un changement radical à la vieille UGTA - apparaît comme un facteur structurant du paysage sociopolitique. C'est une tendance lourde même si elle se traduit lentement dans les faits. Et des syndicats indépendants plus nombreux, cela annonce des luttes plus âpres. Mais l'effet rapide que l'on peut escompter est celui d'une contamination. Positive du point de vue des salariés, négative du point de vue des partisans du statu quo et de la doxa du FMI. En arrachant des hausses de salaires, a priori substantielles, les enseignants vont naturellement faire des émules dans la fonction publique et sans doute au-delà. Dans un pays où l'Etat est l'un des principaux employeurs, les salaires de l'administration constituent un repère pour les autres secteurs. L'autre leçon de la lutte syndicale des enseignants est la confirmation que les classes moyennes, contraintes au silence durant la précédente décennie, ne supportent plus leur déclassement social et font preuve d'une combativité remarquable. La faiblesse du pouvoir d'achat des revenus fixes a en effet atteint des seuils critiques. Les autres catégories, comme les médecins, restent sur la brèche et maintiennent des exigences qui ne sont pas encore satisfaites. Si les batailles pour les augmentations de salaires ont pris un tour rugueux, cela tient essentiellement au fait que le gouvernement ne voulait pas céder par crainte de contagion. De toute évidence, celle-ci paraît inévitable et pourrait aller au-delà de la fonction publique et concerner le secteur économique, public comme privé. La dégradation des conditions d'existence des salariés est cruellement mise en exergue par l'extraordinaire et très rapide enrichissement de nouvelles catégories sociales. La victoire, relative, des enseignants devrait encourager les revendications dans les autres secteurs.




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