Algérie

Retour sur les lieux d'un crime colonial


Une scène a beaucoup intrigué les journalistes. L'un d'eux a posé la question sur les dépouilles jetées dans «des fours crématoires» tout en reprochant au réalisateur de l'avoir montré de loin et furtivement. À Héliopolis, «il y a eu incinération de milliers d'Algériens dans des fours à chaux», avait confirmé Djaffar Gacem.L'impossible «assimilation» dont les adversaires les plus acharnés étaient dans le camp des colons européens extrémistes et racistes. C'est une des lectures du film Héliopolis de Djaffar Gacem, projeté à la presse hier mercredi matin, à la salle Ibn Zeydoun à Alger, en présence du réalisateur et des acteurs principaux algériens, en l'absence des Français pour cause de pandémie du Covid- 19. Ni ange ni démon, l'être humain est souvent emporté par les événements qui lui font changer d'avis, de position et de camp, est une autre lecture de ce long-métrage d'une durée de deux heures.
D'ailleurs, le réalisateur a précisé, lors du débat qui avait suivi la projection, qu'il a fait «un film humain» et de fiction et qu'il n'a pas la prétention de «réécrire l'Histoire». Héliopolis est ainsi «un film de psychologie» pas un film de guerre, «un film de contexte, pas un film de jugement». Le film commence par le passage de deux bombardiers survolant un village algérien. Puis flash back quelques années plus tôt, avant la Seconde guerre mondiale. Mahfoud Zenati dont le père Si Mokdad est un riche propriétaire terrien à Héliopolis, près de Guelma dans l'Est algérien, est un brillant élève. Il n'a pas dit à son père un «assimilé» que sa demande de s'inscrire à l'Ecole polytechnique d'Alger a été rejetée parce que cet établissement est interdit aux «indigènes».
La Seconde guerre mondiale éclate. La France est rapidement vaincue par l'Allemagne nazie. En novembre 1942, les Américains et les Britanniques débarquent en Algérie et la libèrent du pouvoir de Vichy.
Le 14 mars 1944, Ferhat Abbas fonde les Amis du Manifeste et de la Liberté. Contre l'avis de son père, Mahfoud Zenati devient un militant nationaliste. Les massacres du 8 Mai 1945 vont précipiter les événements et ouvrir certains yeux. «Il y a eu 25 jours de massacres dans tout le Constantinois» avait notamment souligné Djaffar Gacem dans sa réponse à une question sur ces événements, qui jusqu'à Héliopolis n'avaient fait l'objet d'aucun film de fiction. Une scène a beaucoup intrigué les journalistes et l'un d'eux a posé la question sur les «Arabes» ou «musulmans» morts jetés dans «des fours crématoires» tout en reprochant au réalisateur de l'avoir montré de loin et furtivement.
À Héliopolis, «il y a eu incinération de milliers d'Algériens dans des fours à chaux», avait confirmé Gacem. Le réalisateur dont Héliopolis est le premier long-métrage cinématographique a, par ailleurs, déclaré que son film s'adresse au public algérien et que son souhait est de le voir projeté dans un maximum de salles en Algérie.
Héliopolis, une production du Centre algérien de développement du cinéma (CADC), pour des raisons de décor de l'époque, a été tourné principalement à El-Maleh (anciennement Rio Salado) dans l'Ouest algérien où comme l'avait confirmé Djaffar Gacem, des jeunes avaient protesté contre le fait de voir des drapeaux français flotter sur des établissements algériens. L'avant-première de Héliopolis (entrée sur invitation) est prévue aujourd'hui jeudi à l'Opéra d'Alger Boualem-Bessaih.
Kader B.
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