Rétablir la vérité sur Fadhma n'Soumeur

Pour lever un tant soit peu le voile sur l'insoumise que l'oppresseur baptisa à tort "La Jeanne d'Arc du Djurdjura", le romancier Saadoun Slimane est allé sur les pas de Lalla Fadhma n'Soumeur pour tenter d'éluder ce qu'était la personnalité de la résistante, à la tribune du "Mercredi du verbe" de l'espace Bachir-Mentouri.Prou a été dit sur la résistante Lalla Fadhma n'Soumeur (1830-1863), qui s'était opposée de 1854 à 1857 à l'avancée des troupes françaises commandées par le maréchal Jacques Louis César Alexandre, comte Randon (1795-1871). Au demeurant, beaucoup a été écrit autour de l'intrépide épopée de Lla Fadhma n'Soumeur (Enal 1992) ou "Massa" (Dame) Fatma Sid Ahmed par l'ancien directeur d'école de Fort l'Empereur à la Scala d'El-Biar, Tahar Oussedik (1913-1994). Et de l'écriture mémorielle à l'écran, Belkacem Hadjadj (2014) narra à l'art de l'image, l'itinéraire héroïque de Fadhma n'Soumeur (2014), cette figure de proue qui s'est illustrée sur le front de fermeté face à l'envahisseur : "Nos ancêtres ont repoussé tous les envahisseurs, des Romains aux Turcs. Laisseriez-vous à vos enfants cette terre sacrée, inviolée, libre ' Ou irez-vous cueillir des glands et des herbes sauvages pour vous remplir le ventre et laisser le Roumi investir vos terres, vos villages, vos maisons ' Laisserez-vous le joug en héritage à vos enfants ' Laisserez-vous vos femmes en butin à vos ennemis '" Ceci dit, que sait-on au juste de la femme d'abord puis de l'héroïne du Djurdjura Lalla Fadhma n'Soumeur qui s'est auréolée de l'honorifique titre de Lalla ' Rien ! Alors, et pour lever un tant soit peu le voile sur l'insoumise que l'oppresseur baptisa à tort "La Jeanne d'Arc du Djurdjura", le romancier Saadoun Slimane est allé sur les pas de Lalla Fadhma n'Soumeur pour tenter d'éluder ce qu'était la personnalité de Lalla n'Ouerdja la révoltée (éd. Médias Index, 2019) qu'il a présenté durant l'après-midi du mercredi 12 juin à la tribune du "Mercredi du verbe" de l'espace Bachir-Mentouri : "L'idée d'écrire et de décrire Lalla Fadhma n'Soumeur a éclos en moi à l'instant même où j'ai eu vent d'une tentative de profanation de sa tombe où elle repose au cimetière de Sidi Abdellah, qui est contiguë à la zaouïa Boumâali à Tourtatine (Tablat)", a déclaré l'auteur de La femme de pierre (Enal 1989). Et depuis l'an 2011, l'orateur est allé par mont et par vaux à la collecte d'un filon de témoignages qu'il a moissonnés auprès des doyennes du village d'Ouerja près de l'ancien Michelet : "Malheureuse Fadhma n'Soumeur. Celles aux belles tresses et au henné ! Son nom était connu de toutes les tribus. On (l'ennemi) l'a prise, elle n'est plus là. La voilà chez les Béni-Slimane. Pleurez, ô mes yeux, à torrent !" (poésie populaire de la Kabylie du Djurdjura » (1857). Fort de l'oralité de nos aïeules, le tribun apporte ainsi la contradiction à l'inavouable description faite par ses homologues français, Emile Carrey (1820- 1880) et celle du médecin militaire Alphonse Bertherand (1815-1887) qui est tout autant avilissante. Pire, autant taire le portrait qu'avait dressé l'historien Georges Duby (1919-1996). Et à la lecture de textes choisis, l'auteur a apporté toute la lumière sur la femme "Révoltée" mais pieuse et qui s'harmonise à la mysticité de la tariqa errahmania de la zaouïa de Soumeur. D'où qu'il est requis de lire l'?uvre livresque de Saadoun Slimane afin d'évaluer par le feu et le verbe, celle qui est restée sourde à la fureur des canons de l'occupant colonial.

Louhal Nourreddine
"Lalla n'Ouerdja la révoltée",
de Slimane Saadoun, éditions Médias
Index, 2019, 182 pages.