Réseaux sociaux : "Vous n'êtes pas des juges, vous êtes des bourreaux !"

"Honneur à tous les détenus d'opinion ! Vous venez d'écrire une nouvelle page d'histoire de l'Algérie. Celle des hommes et des femmes libres faisant face à la dictature et à la perversion des juges, à la hogra et au mépris. Vous êtes les dignes héritiers de Larbi Ben M'hidi, d'Abane Ramdane et de tous les martyrs qui se sont sacrifiés pour que vive l'Algérie indépendante et démocratique." C'est en ces termes que les Algériens se sont adressés, hier sur les réseaux sociaux, aux détenus d'opinion à l'issue "du procès de la honte".Des condamnations à six mois de prison ferme, qui ont provoqué un tollé général auprès des internautes nombreux, très nombreux même, à avoir veillé tard dans la nuit à guetter la moindre information émanant du tribunal. Des messages d'espoir qui défilaient sur facebook et twitter tout au long de la journée ont cédé la place à la désillusion et à la colère. "Il ne faut rien attendre d'un système gangréné jusqu'à la moelle", lit-on sur de nombreux posts, hashtags et autres pages de soutien et de solidarité avec le hirak et les détenus d'opinion. "Dahmani Nour El Houda Yasmine et Samira Messouci, vous êtes la fierté de l'Algérie", écriront certains, en commentant : "Regardez comme nos jeunes sont dignes et conséquents avec eux-mêmes. À aucun moment ils n'ont renié leur cause. Bien au contraire, ils assument chaque mot écrit sur les affiches et les pancartes, chaque slogan scandé et chaque drapeau amazigh brandi. Samira Messouci elle-même a dit : ?Si le juge me relâche maintenant, je reprendrai le drapeau comme je l'ai déjà fait.'" Les live à 2h30 du matin de Sofiane Benyounès (Algérie Debout) ou encore ceux du journaliste Mahrez Rabia ont été très suivis et surtout très commentés.
"Atteinte à l'unité nationale pour avoir brandi un drapeau et on inculpe des gens pour ça et on les jette en prison comme des malfrats, mais c'est carrément de la provocation qui ne fera qu'attiser un feu déjà bien embrasé", insisteront bon nombre d'internautes, qui n'ont pas manqué d'exprimer leur indignation quant au verdict qui a été rendu, du reste très mal perçu par les familles, les parents et les amis des détenus. "C'est honteux, c'est scandaleux. Ce ne sont pas des juges, ce sont des bourreaux. C'est clair que c'est une justice aux ordres régie par un Etat maffieux", s'exclameront certains, qui persistent et signent : "Ce verdict fait mal mais ne nous décourage pas. Ils s'entêtent dans leur bêtise, on va s'entêter davantage dans notre mobilisation. Il n'est pas question que l'élection se tienne et nous ne baisserons pas les bras quoi qu'il nous en coûte." Les internautes iront jusqu'à proposer que leur solidarité se transforme en actions. "Il faut ouvrir une cagnotte pour payer les amendes des détenus dont la condamnation a déjà été prononcée", proposent-ils, alors que d'autres prônent "la solidarité avec les détenus, (qui) doit être encore plus visible sur le terrain, notamment le jour des procès."

Nabila Saïdoun