Algérie

Repères : La sauvagerie aux portes de l'Europe



L'Europe en est toute retournée. Elle qui croyait en avoir fini avec les guerres et autres atrocités sur son territoire, a dû se rendre à  l'évidence avec les conflits dans l'ancienne Yougoslavie. Le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie s'est ainsi lancé dans des procès pour crimes de guerre, crimes contre l'humanité et génocides. Son plus célèbre prisonnier était le président yougoslave Slobodan Milosévic, mort en détention avant même la fin de son procès. Et à  croire un rapport du Conseil de l'Europe, ses victimes se livraient aux mêmes pratiques. En effet, des membres de l'Armée de libération du Kosovo (UCK) ont mis sur pied un trafic d'organes prélevés sur des prisonniers serbes en 1999 et 2000, affirme l'instance européenne dans un rapport rendu public à  Strasbourg. «De nombreux indices semblent confirmer que (...) des organes auraient été prélevés sur des prisonniers dans une clinique en territoire albanais, près de Fushë-Krujë (20 km au nord de Tirana), pour les transporter ensuite à  l'étranger à  des fins de transplantation», affirme le Suisse Dick Marty, auteur de ce rapport demandé par l'Assemblée parlementaire du Conseil (APCE). Selon M. Marty — déjà connu pour avoir révélé l'existence de prisons secrètes de la CIA américaine — «cette activité criminelle, qui s'est développée en profitant du chaos régnant de la région et grâce à  l'initiative de certains chefs des milices de l'UCK liés au crime organisé, s'est poursuivie, bien que sous d'autres formes, jusqu'à nos jours». Dans son rapport de 27 pages, Dick Marty évoque notamment «un centre de réception dernier cri pour le crime organisé du trafic d'organes» près de Fushë-Krujë. Selon les témoignages recueillis par la mission Marty, les prisonniers étaient tués d'une balle dans la tête avant d'être «opérés pour qu'un ou plusieurs organes leur soient prélevés». Il s'agissait principalement d'un prélèvement posthume des reins qui étaient vendus à  des cliniques privées étrangères. Le rapport de Dick Marty pointe du doigt un groupe de responsables de l'UCK, le mouvement indépendantiste kosovar albanais, pour avoir eu une «responsabilité première» dans la gestion de centres de détention de l'UCK en Albanie pendant la guerre de 1998-99 au Kosovo et aussi dans «la fixation du sort des prisonniers détenus». Ce groupe, identifié comme celui de «la Drenica», était dirigé à  l'époque par Hashim Thaçi. Toujours selon M. Marty, une «autre personnalité de l'UCK», Shaip Muja, aurait procédé au «prélèvement forcé d'organes» sur les prisonniers de l'UCK, principalement des Serbes, «pour en faire le trafic». Pour le Premier ministre kosovar, Hashim Thaçi, ce rapport qui le met en cause est «scandaleux», tandis que pour la justice serbe, il représente «une grande victoire» et confirme «les appréhensions les plus sombres sur le fait que de tels crimes monstrueux se sont produits» parce que la Serbie, apprend-on dans la foulée, a mené sa propre enquête et indiqué que le trafic en question concernait 500 victimes. Et là également constate-t-on aussi, les Serbes ne sont pas seuls puisque, dans un livre intitulé La Chasse (publié en 2008), l'ancienne procureure  du Tribunal pénal international (TPI) pour l'ex-Yougoslavie, Carla del Ponte, celle-la même qui traquait Slobodan Milosévic, avait évoqué l'affaire de ce trafic présumé d'organes pour la première fois.  Mme del Ponte indiquait dans cet ouvrage que des maquisards kosovars auraient prélevé des organes sur quelque 300 prisonniers, notamment serbes, enlevés au Kosovo et qui avaient été acheminés vers l'Albanie pendant l'été 1999, juste après la guerre. Les organes ainsi prélevés auraient été ensuite acheminés vers l'étranger pour y àªtre vendus, ajoutait-elle. Carla del Ponte précisait toutefois ne pas disposer de preuves suffisantes au sujet de cette affaire.
Devant des accusations aussi graves, personne n'ose porter la contradiction au Suisse Dick Marty, préférant parler d'«allégations» et attendre des preuves. Là, devrait-on dire, le monde n'a pas eu la réaction attendue puisqu'il y avait enquête. C'est-à-dire plus que de sim-ples allégations.   


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