A chaque début d'une nouvelle année, la même question lancinante revient. Qu'adviendra-t-il de l'économie algérienne les prochaines années ' Pendant les cours, les séminaires et les discussions en aparté en Algérie et à l'étranger, la même interrogation s'érige comme une préoccupation essentielle des citoyens de ce pays. On pense généralement à tort qu'un économiste est un prospectiviste. On considère qu'il a les outils et les méthodes pour faire des prévisions fiables.C'est le cas de certains économistes, mais pas tous et pas automatiquement. Le contexte politico-social joue également un rôle déterminant. Dans les pays en voie de développement, les interfaces entre les phénomènes politiques et économiques sont si étendues qu'il faut faire des hypothèses sur les champs des domaines hors économie.
Certains spécialistes de l'économie du développement sont arrivés à la conclusion que les clés du succès ou de l'échec se trouvent dans la sphère politique.
Les techniciens de l'économie savent comment développer un pays. Cependant, la condition essentielle demeure que les politiciens créent l'environnement propice à la croissance et au développement. Il ne faut pas croire que les économistes peuvent faire des miracles. Cependant, certains peuvent déceler certaines tendances à travers l'interaction entre les choix politiques et économiques. Les variables nécessaires pour faire de la prospectives ne sont pas les mêmes que l'on enseigne en sciences économiques.
Prospectives économiques : Encore une situation de stand-by
Faire des prévisions est un art compliqué. Il est rendu plus complexe par l'approximation des données disponibles et le peu d'études dans des domaines pertinents dans les pays en voie de développement. Cependant, on arrive tant bien que mal à faire avec un minimum de facteurs qui décrivent l'essentiel des fondamentaux dont on a besoin pour faire de bons pronostics. Généralement, les variables quotidiennement examinées sont peu prises en considération (inflation, déficit budgétaire, etc.) mais les variables structurelles prennent une dimension autrement plus importante.
On pense notamment à la qualité de l'éducation, l'efficacité dans l'utilisation des ressources etc. ; nous n'allons pas approfondir la méthodologie de la prospective mais seulement en fournir les résultats probables pour notre pays. Il est vrai que la variabilité des politiques économiques complique la situation.
Nous venons d'avoir un test grandeur nature d'une variabilité des politiques macroéconomiques qui ne manquera pas d'avoir de sérieux impacts sur 2018 et au-delà. Le revirement dans la politique budgétaire de l'état va encore laisser des traces indélébiles dans le mode de fonctionnement de l'économie nationale.
En économie, ce qui induit souvent en erreur les analystes demeurent les délais contenus dans les mécanismes économiques. Ce qui implique que pour certains événements, les décisions prises en 2017 auront un impact surtout en 2019 et au-delà. Le financement non conventionnel (à travers les emprunts de la Banque d'Algérie au Trésor) aurait des impacts inflationnistes (dépendant de l'ampleur et la destination des ressources) surtout à la fin 2019 et au-delà.
A court terme, ce seront surtout les impacts liés aux anticipations.
Lorsque tout le monde parle de hausse des prix, une certaine proportion sera répercutée par les hommes d'affaires sur les prix avant que les mécanismes économiques ne produisent une tension entre l'offre et la demande. C'est en ce sens qu'il faut opérer des discernements entre décisions et impacts. Il nous faut donc savoir séparer les effets à court terme de ceux du long terme.
Sacrifier le long terme
Les personnes qui s'intéressent uniquement à l'année 2018 doivent savoir qu'il y aurait peu de changements durant cette année. Certes, il y aura de faibles tensions inflationnistes suite aux relèvements des prix des hydrocarbures et de certaines taxes. La pression démographique va continuer avec plus d'un million de naissances par an et la productivité (ce que produit chaque citoyen par an) va continuer à stagner. C'est cette dernière variable (la productivité) qui doit interpeller fortement nos décideurs.
Pourquoi chaque année avec plus d'équipements, le citoyen algérien voit sa production stagner (la moyenne par personne) ' Nous avons là la source d'inquiétude la plus importante de notre économie et à laquelle peu d'analystes adressent leurs investigations et leurs préoccupations. Cette quasi stagnation de la productivité est la cause essentielle de nos malheurs économiques.
Elle explique en grande partie pourquoi le niveau de vie fléchit graduellement. La faiblesse de la productivité explique en grande partie pourquoi une grande portion du financement conventionnel ira surtout fouetter l'inflation plutôt que la production. Cependant, il ne faut pas exagérer l'impact inflationniste. Selon mes calculs, nous aurons entre 4 et 6% de plus d'inflation à cause de ce mécanisme.
Il est donc beaucoup plus préférable à l'endettement international. Mais les impacts se feront sentir vers le deuxième semestre de 2019. Nous avons aussi le marché pétrolier qui pourrait continuer à se redresser et réduire drastiquement le recours à ce mode de financement. Nous aurons donc une faible dégradation du pouvoir d'achat. Encore une fois de plus en 2017, on a encore sacrifié le long terme pour des considérations du cours terme.
La mobilisation de plus de 2000 milliards de DA pour financer encore des infrastructures aura un impact négatif sur l'évolution de la productivité. On oriente mal les ressources. La priorité aurait dû être les fondamentaux de base (qualification humaine, modernisation managériale, réorganisation de l'Etat, recherche et développement, industries du savoir, etc.).
Les véritables solutions sont toujours en attente. Mais en attendant, 2018 connaîtra de très légères détériorations du niveau de vie que le citoyen peut supporter. Mais si des correctifs sérieux ne seront pas apportés dans le budget 2019, nous connaîtrons des situations plus alarmantes dès la fin 2019 et début 2020.
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Posté Le : 15/01/2018
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Abdelhak Lamiri
Source : www.elwatan.com