Algérie

Repère



Repère
Il était vain d'attendre quelque avancée politique concernant tamazight de la part d'un pouvoir qui porte la responsabilité de la féroce répression policière de la marche du 20 avril dernier. La seule question qui mérite d'être posée aux gouvernants est de connaître le sort de l'enquête diligentée pour identifier et sanctionner les policiers ayant traîné et frappé au sol des manifestants sortis uniquement pour réclamer l'officialisation de tamazight. L'on est resté, dans ce dossier, sur «la mesure de suspension provisoire», que la vox populi assimile à une promesse de promotion plus qu'à un début de sanction.Mais en Algérie, les autorités peuvent adopter le long de l'année les pratiques des régimes autoritaires et s'autoriser des intermèdes de débat politique évoquant, presque incidemment, les questions qui agitent la société. Les réponses des officiels réservent cependant d'énormes surprises. Interpellé par des députés, jeudi dernier, à l'APN, sur l'officialisation de tamazight, le Premier ministre Sellal a réduit cette revendication politique aux «conditions pédagogiques nécessaires à un enseignement efficace». Si la question amazighe n'avance pas au plan politique, c'est parce que son enseignement n'est pas encore probant, soutiennent les autorités gouvernementales. La reconnaissance officielle de l'identité amazighe, langue et culture, dépend, en somme, de la qualité des manuels de grammaire. Si l'indépendance du pays avait suivi son cours naturel, tamazight devait être déclarée langue officielle, au même titre que l'arabe, dès 1962, sans attendre la confection des manuels, des académies et la formation des personnels enseignants. Mais la confiscation du pouvoir, et même de l'indépendance, a fait que le pays a raté nombre de virages, pas seulement culturel.La seule déclaration sensée et compréhensible faite à propos de tamazight, lors de la séance parlementaire de jeudi, est lorsque le Premier ministre dit que «la responsabilité du gouvernement consiste uniquement à l'exécution». C'est, en effet, la première autorité du pays, c'est-à-dire la présidence de la République, qui a le pouvoir, et en vérité le devoir, d'accéder aux revendications essentielles de la population. A ce niveau, la seule réaction connue est la charge policière. Et cela ne concerne pas uniquement l'actuelle équipe au pouvoir, qui a commandité la sauvage répression de la marche du 20 avril 2014.Dans les années 1970, un jeune détenteur de l'alphabet tifinagh pouvait être jeté dans une voiture noire et mis au secret. En 1980, autre équipe au pouvoir, mêmes réflexes de dictateurs. Des compagnies nationales de sécurité (CNS) sont introduites en pleine nuit dans les cités universitaires de Tizi Ouzou pour tabasser les étudiants.Ces derniers étaient coupables d'inviter Mouloud Mammeri à une conférence sur la poésie kabyle ancienne. Ce fut le printemps berbère. Il n'y avait eu que des blessés. Au printemps noir de 2001, plus d'une centaine de jeunes furent mitraillés par les gendarmes en Kabylie. Cette tragédie amena, l'année suivante, la nouvelle équipe au pouvoir à introduire tamazight dans la Constitution comme langue nationale. Entre les deux printemps, en 1994, la «grève du cartable» avait abouti à un acquis important, l'enseignement de tamazight dans l'école algérienne. Les blocages politiques, plus que la mauvaise volonté au sein des autorités centrales, sont à l'origine du semi-échec dans l'introduction de cette langue ancestrale dans le système éducatif national. Et c'est ce déficit académique, imputable aux autorités, qui est pris à présent comme prétexte pour refuser l'officialisation de tamazight.




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