Algérie

Remous chez les robes noires



L'incarcération d'un avocat, membre du collectif de défense des détenus du Hirak, crée de gros remous au sein des robes noires. Hier, l'Union nationale des Ordres des avocats s'est, à son tour, exprimée sur le sujet et s'est solidarisée avec le barreau de Tébessa.Abla Chérif - Alger (Le Soir) - C'est de là que toute l'affaire est partie le 20 mai dernier, date de l'arrestation de Me Abderraouf Arselane par la Gendarmerie nationale. Cette arrestation coïncide avec celle de trois autres personnes, des membres actifs du Hirak.
Le CNLD (Comité national pour la libération des détenus) qui tient une liste régulièrement revisitée du nombre de personnes arrêtées annonce que l'avocat et les trois activistes sont placés en garde à vue et que leur présentation devant le procureur de la République a été fixée au 26 mai. À cette date, il est placé sous mandat de dépôt avec le reste du groupe.
Un grand nombre d'avocats venus de plusieurs régions se mobilisent pour sa défense et saisissent la chambre d'accusation près la cour de Tébessa qui a confirmé la détention préventive de Me Abderraouf Arselane. Des informations contradictoires circulent un moment au sujet des faits reprochés à l'avocat, mais le collectif chargé de sa défense affirme qu'il lui est reproché d'avoir diffusé sur les réseaux sociaux une vidéo filmée lors de la commémoration des massacres de 8 Mai 1945 à Kherrata et que celle-ci a été interprétée comme étant une incitation à boycotter les législatives du 12 juin prochain.
Le procureur général de la cour de Tébessa a, de son côté, animé une conférence de presse durant laquelle il indiquait que les «investigations menées par les éléments de la section de recherches du groupement territorial de la Gendarmerie nationale de Tébessa ont prouvé de manière formelle que les quatre accusés étaient en relation avec le mouvement Rachad». Il rappelle qu'il s'agit d'une organisation «terroriste qui menace l'ordre public, la stabilité de l'Etat». Il affirme également que l'avocat arrêté avait «transformé son bureau en relai du mouvement Rachad et en un lieu de rencontre entre les trois activistes du Hirak membres du mouvement Rachad».
Les réactions ne tardent pas à se faire entendre. Les robes noires sont de plus en plus nombreuses à s'exprimer à travers le territoire national condamnant «un abus, une dérive et des arguments sans fondement». La réaction est particulièrement vive au sein du barreau de Tébessa qui enchaîne les rassemblements et décide le boycott de toutes les activités judiciaires. Le mouvement s'étend progressivement à d'autres régions. Jeudi, un rassemblement s'est d'ailleurs également tenu à Alger et les avocats ont dénoncé à leur tour un «dossier vide qui ne justifie pas une mise sous mandat de dépôt». Tout comme le barreau de Tébessa, tous appellent l'Union nationale de l'Ordre des avocats à réagir contre cette «grave atteinte aux droits de la défense». Une réunion de cette organisation s'est finalement tenue hier. Elle s'est déroulée à la suite d'un exposé présenté par le bâtonnier du barreau de Tébessa qui a fourni tous les détails de l'affaire.
Dans un communiqué sanctionnant cette rencontre, l'Union nationale de l'Ordre des avocats a exprimé «son soutien total au barreau de Tébessa» et s'est dit «désolé de la mauvaise lecture judiciaire faite par le procureur général de la cour de Tébessa lors de la conférence de presse qu'il a animée et qui constitue en soit une violation du secret d'instruction et de la présemption d'innocence».
L'Union appelle également les instances judiciaires concernées à agir en fonction «des lois garantissant la présemption d'innocence, des lois garantissant la liberté des personnes et celles qui font de la mise en détention préventive une exception».
L'Organisation nationale des avocats qui annonce enfin son «soutien effectif et coordonné avec le barreau de Tébessa dans ses démarches judiciaires pour la libération de notre confrère» fait part de sa décision de boycotter toutes les activités judiciaires ce lundi, «tout en maintenant le dossier ouvert jusqu'à son règlement».
A. C.


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