Algérie

Relais au piquet de grève


Relais au piquet de grève
«Maintenant, c'est nous qui sommes en grève», devaient répondre les élèves des classes de terminale à leurs parents qui devaient faire les grands yeux en les voyant revenir à la maison. Pour rester dans le style informatif, «les lycéens sont sortis hier pour exprimer leur inquiétude après les décisions prises sur les rattrapages des cours suite à la grève des enseignants qui a duré près d'un mois. Les lycéens sont sortis dans plusieurs wilayas du pays, notamment Alger, Tipasa, Bouira et Médéa pour exprimer leur colère». C'est ce que nous a appris la collègue qui a travaillé sur le sujet dans notre édition d'hier.Il faudra d'abord s'arrêter sur cette nouvelle colère et essayer de comprendre ses motivations et les gens contre qui elle est dirigée. Car ça fait très longtemps que le pays ne peut plus prétendre à un mouvement lycéen organisé, capable de défendre les intérêts pédagogiques et de revendiquer de bonnes conditions d'études pour les lycéens. Ça fait tellement longtemps que nous avons fini par oublier que ça aurait pu être possible ! En fait les lycéens ont pris hier le «relais» sans doute le plus déroutant et le plus spectaculaire de l'histoire de la contestation dans l'éducation. Et surtout le plus paradoxal.Parce que de toutes les réactions à l'interminable débrayage des enseignants, qu'elles émanent des parents d'élèves ou des élèves eux-mêmes, une chose revenait immanquablement, inlassablement, systématiquement : comment faire pour rattraper tout ça ' On n'a même pas songé à dire qu'au fond, un cours ne se rattrape jamais. Mais ça fait aussi trop longtemps que nous nous contentons des petites consolations pour faire semblant de redécouvrir la grande ambition.Quand les lycéens ont succédé à leurs profs au piquet de grève, à qui s'adressaient-ils ' A eux de n'avoir pas trouvé la bonne façon de revendiquer sans mettre en péril leur scolarité ou à la tutelle de n'avoir pas dialogué, de n'avoir pas fait les concessions nécessaires et les compromis utiles ' Ça fait longtemps qu'on ne s'encombre plus de discernement, ça fait longtemps qu'on a désappris à situer la responsabilité avec précision. Alors on a encore renvoyé les deux parties dos à dos, comme on dit. Quand on proteste, il n'est pas question de s'aligner sur un camp. Il n'y a d'ailleurs pas de camp, dans la tête d'un lycéen.Il n'y a que son parcours scolaire compromis. Et sur le terrain des opérations, il ne voit pas vraiment grand-monde faire quelque chose pour qu'il n'en soit pas ainsi. Et ils le disent parfois avec leur petite logique et leurs mots simples : le ministère ne donne pas les moyens, les enseignants ne travaillent pas et c'est nous qui trinquons.Et quand le ministère et les enseignants arrivent à s'entendre sur quelque chose comme c'est le cas récemment, les lycéens ont toujours l'impression que quelque chose s'est tramé dans leur dos, sans eux, forcément contre eux. Sinon, ils n'auraient pas pris le «relais», après un débrayage de près d'un mois.Normal qu'ils veuillent discuter maintenant de la suite. Et la suite se décline surtout en termes de rattrapage des cours dont ils contestent la feuille de route. Les mauvaises langues parlent déjà de rattrapages «privés» assurés par des enseignants? grévistes et grassement payés. Dans quel pays sommes-nous ' laouarisliman@gmail.com


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