S’il était encore parmi nous, le 16 janvier dernier, il aurait soufflé sa soixante-neuvième bougie, malheureusement, à 61 ans seulement, celui qui était connu sous le pseudonyme de Pons, rendait l’âme un jeudi matin au mois de mai 1999.
Personne à Oran ne voulait croire à cette terrible nouvelle. Certes, le populaire Abdelkader Reguieg était alité et entouré de l’affectation de sa petite famille, très attentive au moindre de ses désirs, mais connaissant sa robuste constitution physique et son sacré tempérament, on se disait qu’après tout, il allait se rétablir et s’asseoir, avec son attitude bien spécifique, du côté de son café, rue de Mostaganem, le seul bien matériel qu’il ait jamais possédé. Car Pons, parallèlement à son activité de footballeur, a exercé comme chauffeur au journal «La République» où les anciens garderont de lui le souvenir d’un homme simple, profondément humain, au langage imagé et sans fard. Et puis, il a bien fallu se rendre à l’évidence. Pons, comme tant d’autres athlètes, était une nouvelle victime de la Faucheuse, celle qui ne fait aucune distinction d’aucune sorte.
61 ans, une existence somme toute courte selon les normes de notre temps, mais tous ceux qui l’ont connu ont vu se dérouler sous leurs yeux le film de sa vie. Une vie agitée et pleine, car issue d’une famille de condition modeste, orphelin de père très jeune, Abdelkader, fut d’un grand secours pour sa mère qu’il aida à élever une famille démunie de tout bien et sans aucune ressource. C’est ainsi, qu’après des études primaires inachevées, il travailla durement et courageusement pour survivre dans la plus parfaite dignité. Le futur Pons au caractère bien trempé se manifestait déjà dans cette dure épreuve. Comme footballeur, il a évolué à l’USMO en junior, mais à l’arrêt des clubs algériens, il se rapprocha du cercle «Nadi Saâda» en Ville Nouvelle, où il s’imprégna des idéaux de la lutte de libération, s’engageant résolument comme fidaï sous la direction du héros Tenazet Tahar. En 1957, à 19 ans seulement, à un âge où la plupart de ses contemporains ne pensaient qu’à se divertir, Reguieg avait à son actif plusieurs missions d’envergure dont la «fameuse nuit bleue» du 8 septembre 1957 où onze grenades furent lancées contre les intérêts des occupants. Notre regretté collègue Houari Chaïla a narré, par le détail dans ses nombreux écrits, les péripéties de cette nuit mémorable marquée par le geste héroïque du cadet du groupe «Rouquin» (17 ans seulement) qui, grièvement blessé, a préféré débrancher l’appareillage de réanimation pour ne «donner» aucun de ses copains de combat. Dix jours plus tard, Pons sera arrêté, écroué, subissant les tortures et exactions de toutes sortes, et sera écroué la prison d’Oran le 21 septembre 1957 et ne sera libéré qu’au mois de mai 1962.
Presque cinq années de cellule n’ont nullement entamé le dynamisme de ce personnage hors du commun qui, à 24 ans recommença à taper sur le ballon. Ce fut une mutation extraordinaire et unique à notre connaissance, puisque Abdelkader, ancien défenseur et devant les ratés de ses coéquipiers à l’ASMO, insista auprès de son entraîneur Hadj Hadefi pour être incorporé en attaque. Ce fut une révélation et une totale réussite qui forgea sa réputation de centre avant redoutable, inscrivant de nombreux buts «impossibles» le plus souvent grâce à des «retournés acrobatiques» que les gymnastes les plus chevronnés n’auraient pas désavoués. Grâce à son engagement, il lui est arrivé de récupérer une balle dans un cafouillage et de l’envoyer au fond des filets adverses, c’est d’ailleurs à la suite d’un de ces fameux retournés face au MCO, que l’ASM de l’époque, a accaparé le titre de champion d’Oranie. A une époque où - et les plus de cinquante ans vous le confirmeront - la concurrence était impitoyable à tous les postes, Pons a réussi à convaincre les sélectionneurs Ibrir et Khabatou, endossant le maillot vert de l’équipe nationale à trois reprises, contre le FC Zaghreb, la Russie et le Maroc avec comme coéquipiers, du beau monde, avec Lalmas, Zitouni, Attoui, Bourouba, Zefzef, Aouadj, Mattem, Amara et Achour.
Les fans du foot de cette époque (décennies 60 et 70) se souviennent avec nostalgie les matches livrés aux défenseurs centraux. Et c’était du solide avec les Melaksou, Attoui, Ould-Bey, Zitouni Mustapha, Belbekri, Ahmed, Belloucif, Amar, Metrah, Ousser, Tahar, Bouhadji, Bouridah, Lehtihet, Moha, Khiari, Oulkhiar, Madani, Zenir, sans oublier bien sûr, Beddiar avec qu’il a engagé des duels homériques dont ce dernier, lorsqu’il les raconte, ne peut retenir ses larmes.
Pour notre part, nous n’oublierons pas de sitôt son triplé en Coupe d’Algérie, face au MCA des Betrouni, Bachi et Draoui alors qu’à 34 ans 1/2, il était entraîneur-joueur d’une ASMO à laquelle il a été fidèle jusqu’au bout. La chronique de ce temps fait état d’une promesse tenue. Après avoir connu les affres de la relégation, il jura qu’il ne raccrochera les crampons que lorsque l’ASMO retournera parmi l’élite. Il a tenu parole et tout comme son légendaire retourné acrobatique, c’est bien là la «griffe» de cet homme exceptionnel ravi trop tôt à l’affection des siens et de la nôtre. Car tout le monde, même ses plus farouches adversaires, adorait Pons, un attachant personnage et un footballeur hors normes.
c etait mon idole avec freha un grand joueur
Youcef Zaoui, Algérie
27/06/2015 - 264295
Mon Grand -pére était un grand homme , On l'aimaient tous Allah yerhmak
Reguieg Rania - Etudiante - Sidi Bel abbes, Algérie
01/03/2014 - 180985
Salam,
Merci à Adjal Lahouari qui a su reproduire de telles émotions grâce à sa belle plume émérite reconnue pour son savoir de narateurs de souvenirs mémorables.
Que dire de plus, sinon rappeler encore la gentillesse et la simplicité d'un Homme exemplaire, et un joueur toujours fidèle aux Verts Asémistes, ce club chéri qu'il porta à bout de bras.
Il est dommage qu'un tel Homme n'ait pas eu une plus grande place à Oran digne de son rang après sa carrière footballistique.
Pour terminer, je voudrais juste aussi rappeler qu'il fut un des plus jeunes prisonniers de guerre parmi ses Aînés du carré des codamnés de la prison d'Oran. Malgré son passé héroïque de grand Fidaï, il n'a jamais couru après les récompenses et les faire valoir comme tant d'autres pseudos Moudjahidine. Pour preuve, il n'a laissé à sa famille qu'un modeste petit café de la rue Mostaganem, et RIEN d'autre! Allah yarhameh wa yarham Chouhada!
Cordialement.
Label
BELAHOUCINE Lahcène - Consultant - Paris
20/12/2007 - 705
franchement l'article était trés touchant je le lisais en pleurant car vous m'avez enormément touche je tiens a vous remercie pour cet article c'est vrai c'est quelqu'un de trés simple et trés humain
reguieg fatima zohra - salarié
29/10/2007 - 524
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Posté Le : 17/02/2007
Posté par : hichem
Ecrit par : par Adjal Lahouari
Source : www.lequotidien-oran.com