Algérie

Régime et opposition tirent sur Brahimi Incertaine médiation en Syrie



Régime et opposition tirent sur Brahimi Incertaine médiation en Syrie
En réalité, Kofi Annan n'était pas le premier médiateur à s'avouer vaincu. Huit mois avant lui, le chef de la mission des observateurs de la Ligue arabe avait opté pour une fin de mission, non sans avoir rendu un rapport sans complaisance sur la situation sur le terrain. Un rapport qui, du reste, n'a pas eu l'heur de plaire à l'organisation panarabe. Diabi, général soudanais en retraite, a été le premier, dès 2011, à parler de l'existence de groupes armés dépeints comme des islamistes, et même de leurs exactions. Le tout, mentionné, sans faire la part belle aux forces du régime dont la férocité de la répression a été soulignée.
Il fallait s'y attendre, la Ligue arabe, passée sous la férule du Qatar, n'a jamais rendu public ce rapport. Certes, Diabi n'était pas médiateur, mais la nature de sa mission lui conférait en partie des prérogatives similaires à celles d'un émissaire. Qu'est-ce qui expliquerait la promptitude de la réaction des deux hommes ' Sans doute leur expérience de la gestion des conflits : Kofi Annan comme responsable de plusieurs missions de paix onusiennes, Diabi comme officier général des services de sécurité d'un pays longtemps déchiré par une guerre civile, en l'occurrence le Soudan.

Enlisement d'une mission
Désigné en Août pour succéder à Kofi Annan, dont il fut un proche collaborateur pendant plusieurs années, Lakhdar Brahimi, en homme des missions difficiles, n'ignorait rien des difficultés qui l'attendaient. Il savait l'étendue du fossé qui séparait les positions des uns et des autres, les parties en conflit comme les autres acteurs régionaux et les grandes puissances mondiales. D'ailleurs il se gardera bien de promettre plus que ce qu'avait entrepris son prédécesseur, s'engageant à reprendre sa mission là où elle s'était arrêtée, soit le plan en six points et la déclaration de Genève du 30 juin 2012, qui reprenait le précédent plan et invitait à un processus de règlement politique sans poser le préalable du départ du président Bachar Al-Assad. Autant dire que M. Brahimi ne démarrait pas sa médiation sur chapeaux de roue. Mais n'est-ce pas le propre des missions difficiles de se heurter à des positions d'intransigeance et des atermoiements '
Rompu à l'action diplomatique et ses arcanes, le régime de Damas réservera un accueil correct à la mission, à l'inverse de l'opposition qui montera les enchères sans attendre allant, quelque temps après, jusqu'à sortir l'artillerie lourde contre le diplomate algérien à la seule évocation de l'expression «guerre civile» pour qualifier le conflit qui ravageait le pays. Le médiateur a bien essayé de rapprocher les positions pour arriver à un terrain d'entente minimal, en se gardant, dans un premier temps, de tout alignement sur l'un des belligérants. C'est l'esprit même de la fameuse déclaration de Genève qui n'a fait aucune référence à la nature «terroriste» de certains groupes armés, ni évoqué ou suggéré de passer outre le président Al-Assad. Or, M. Brahimi est sorti de sa neutralité, sur ce point, au lendemain de la proposition d'un plan de paix, le 6 janvier, par le chef de l'Etat syrien. De proposition en proposition, allant jusqu'à vouloir dépouiller la fonction présidentielle de toutes ses prérogatives exécutives au profit d'un gouvernement de régime parlementaire, l'émissaire finira par perdre tout crédit auprès de Damas qui vient de se fendre d'une déclaration très dure à son égard.
Réagissant à une interview accordée par M. Brahimi à la chaîne de télévision «Al-Arabiya», un responsable syrien a déclaré à l'agence officielle syrienne Sana «qu'il est clair que Brahimi est incapable de comprendre la logique syrienne qui met le principe de souveraineté au-delà de toute considération», précisant que «la forme du système politique, la nature du gouvernement et les élections sont l'affaire des Syriens et que le président Bachar Al-Assad ne discute pas de ces affaires».

Le poids de deux grands
Dans l'interview avec Al-Arabiya, M. Brahimi avait dit que M. Assad n'était «pas prêt à quitter le pouvoir» et que «le régime en Syrie était convaincu que la solution militaire est possible et qu'elle pourrait être proche». Il a réitéré son appel au dialogue entre régime et opposition sous les auspices des Nations unies, seules, d'après lui, encore en mesure d'organiser un dialogue entre pouvoir et opposition en Syrie.
L'émissaire de l'ONU et de la Ligue arabe est-il allé trop vite en besogne ' Les tous prochains jours le diront, car les propos de M. Brahimi ont pour toile de fond un certain regain diplomatique entre les Etats-Unis et la Russie dont on sait à quel point toute convergence des positions est en mesure d'enclencher de vraies négociations qui rapprocheraient de l'enclenchement d'une solution politique. Un certain nombre de signes assez clairs semblent indiquer un volontarisme partagé de Moscou et Washington. Dans la capitale russe où il s'était rendu le 22 février, le ministre syrien des Affaires étrangères s'est illustré par une déclaration inédite par sa force : Damas est prêt à négocier, y compris avec les «groupes terroristes» ou ceux qui ont les «mains tâchées de sang». Washington, de son côté, a dépêché son Secrétaire d'Etat pour une tournée, dimanche, à travers onze capitales en Europe et au Moyen-Orient, avec pour thème central la question syrienne.
Il va de soi que si les deux grandes puissances mondiales s'y mettent sérieusement, le rôle de l'ONU apparaîtra de pure forme et s'il retrouve une crédibilité perdue ce sera du fait de Poutine et Obama. Exit la Ligue arabe, le Qatar et Paris ' M. Brahimi devra bien compter avec cette nouvelle donne.
A. S.


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