Regard

La Sorbonne exportée ? Prestigieuse école française fondée au 13ème siècle, la Sorbonne était à l’origine un établissement religieux destiné à recevoir les plus démunis parmi les étudiants parisiens. Ce n’est que trois siècles plus tard qu’elle fut versée à l’Université de Paris, sous l’impulsion de Napoléon, premier du nom. Depuis, elle a largement intégré les soubresauts idéologiques qui agitent la société française. Mai 68 n’en est pas le moins éclatant exemple... Voilà donc la Sorbonne relookée, rachetée à l’exportation par un prince arabe d’Abou Dhabi. Les étudiants devront s’acquitter de la coquette somme de 12.000 euros par an pour assister aux cours. Ce qui jure violemment avec ses règles originelles. Mais bon, il y a de l’argent dans les pays du Golfe et il faut bien vivre. Ces étudiants dont le seul porte-monnaie est le vrai test d’évaluation vont donc emprunter les chemins lumineux de la connaissance tel que les préceptes de la Sorbonne les envisagent et, peut-être, atteindre un niveau susceptible de prendre le relais dans le monde arabe. Car il ne fait aucun doute que le prince arabe, qui a eu cette idée, doit caresser secrètement le rêve d’organiser dans quelques années un «appel d’air frais», comprenez d’intellectuels, venant de tout le monde arabe pour nourrir Sa nouvelle Sorbonne. C’est de bonne guerre. Encore faudra-t-il assumer par ce canal, tout le «pack» que cette école transmet: la science, le savoir, la critique, la contestation, le débat d’idées, la contradiction, les publications qui disent oui et celles qui disent non. Sans cela, la Sorbonne ne sera plus que l’ombre d’elle-même. Et l’argent seul ne suffit pas à faire une grande école. Les grandes questions qui secouent le monde arabe devront bien un jour être débattues, non pas en France ou à New York, mais dans un pays arabe enfin capable d’en parler sans forcément donner la troupe contre les étudiants et les étudiantes, même si elles portent toutes le tchador dans les salles de classe à l’heure actuelle!