«Les lois
inutiles affaiblissent les lois nécessaires».Montesquieu
En cette fin
d'année, le président Bouteflika semble mettre les
bouchées doubles, bousculer la lourdeur légendaire des appareils partisans de
la majorité et met sur la défensive de nombreux opposants qui ne font que
réagir. Sans politique claire, alternative, ces derniers s'installent dans le stérile
slogan publicitaire T.S.B. (tout sauf Bouteflika),
qu'ils opposent aux projets de lois, aux annonces de réformes, ouvertures
faites par le pouvoir, au quota pour les femmes, à la position algérienne sur
le C.N.T. de Tripoli, etc. Si une partie de l'opposition est dans son droit
absolu de s'opposer, de critiquer sinon de pourfendre la démarche du président
de la République, il est de son devoir de proposer, de chiffrer, d'inventer des
compromis et des consensus que le pouvoir ne peut pas refuser. L'ouverture
annoncée de l'audiovisuel au privé fournit le meilleur exemple de l'aphasie de
beaucoup d'oppositions et de gouvernants.
Devant des
membres du gouvernement, des «experts» inconsistants qui proposent une TV mixte
privé/public (la blague de la décennie !), qui ne font que bafouiller en
attendant les clarifications de M. Bouteflika,
l'opposition est absente. Le Conseil supérieur de l'audiovisuel, sa composante,
les modalités de son autonomie, la singularité des cahiers des charges (selon
la nature de chaque TV ou radio), le mandant des P-DG des chaînes publiques et
toutes les industries de l'audiovisuel ne disent rien à l'opposition. Bon gré,
mal gré, l'audiovisuel national est condamné à bouger. Dans quelle formation
politique un travail de réflexion est-il engagé sur cette problématique à
plusieurs volets ? Des médiats «ouverts aux professionnels» est un slogan vide
de sens, sachant l'évanescence et les lectures nombreuses du concept
«professionnels» dans une industrie où l'arme déterminante est l'argent qui
attire les compétences. Au moment où des réformes, quelles que soient les
lectures des uns et des autres, peuvent modifier le paysage, des discours, des
sketches des années 80 sont énoncés et joués aux côtés de réflexes, de
fonctionnements totalement déphasés mis vainement en ordre de bataille.
M. Bouteflika semble vouloir achever son mandat en apothéose,
avec ses qualités et ses défauts, marqué par son cursus personnel et par les
contradictions internes au système et celles des oppositions qui évacuent avec
pugnacité l'alternance en leur sein et la présence des femmes aux sommets de
leurs appareils. Il sait que pour réformer, il faut des équipes qui ont les
mêmes ambitions pour le pays et qui savent réformer en s'adaptant aux règles
mouvantes de la mondialisation qui ne peut s'accommoder de «spécificités» et de
«constantes» totalement surréalistes, lorsque la thèse du «pétrole, bien de
l'humanité» est appliquée selon les besoins des économies des grandes
puissances. Les réformes ont-elles des chances de réussir devant la
fainéantise, l'absence d'imagination de la majorité et les blocages
systématiques des rentiers et des courants salafistes
qui ont définitivement tué le tourisme y compris algéro-algérien,
au profit de pays voisins qui ne remettent pas à la mode la prohibition testée
par l'Amérique dans les années 20 et par Benbella à
l'indépendance. Avec les échecs mondialement reconnus ?
Le temps manque
cruellement au pays, mais il y a en Algérie des compétences dans tous les
domaines, de l'argent, de l'espace, une jeunesse inventive pour en faire la
première grande démocratie des mondes arabes, africain, musulman et au-delà.
Cela est possible. D'ici la fin de l'année, il est attendu des changements de
textes et de dirigeants, l'implication de syndicats et d'associations qui
étaient considérés jusqu'à comme des repaires de traîtres et de fauteurs des
troubles. Or, ils sont des parfaits repères pour un grand nombre et des forces
avec lesquelles toute la classe politique apprend à faire avec. Il est
suicidaire, même pour le régime, de continuer à faire tourner le pays avec des
relations consanguines en son sein, autour des «familles» aussi vieilles que
dépassées, avec des méthodes grabataires arrivées en fin de vie.
Après les assises
de la société civile (15-16-17 juin 2011) qui ont semé des recommandations des
volontés d'organisation et des relais, à l'échelle du pays, le CNES après au
auto saisine autour de la société civile, mène actuellement une concertation
inédite et de grande envergure. A partir d'une saisine du chef de l'Etat, le
Conseil national économique et social, avec son comité ad hoc et celui du suivi
des assises de la société civile, arpente tout le territoire. Pour la première
fois dans un format original qui favorise l'expression libre, les APC, les APW,
les élus nationaux, les associations organisées ou pas, reconnues ou pas par
les autorités, les exécutifs sur le territoire de la wilaya sont scannés par
l'écoute et le recueil du dit réel du terroir. Le 22 décembre prochain, le
résultat d'un tour d'Algérie jamais réalisé, sera délivré, lors d'assises
nationales et versé directement dans le package des réformes. Le travail
préparé durant des mois se poursuit sur le terrain du pays profond. Celui-ci
justement, connaît des mutations irréversibles qu'il serait dangereux de
contrarier, une ébullition que seule une démocratisation et un rétrécissement
des usages bureaucratiques peuvent refroidir. A titre d'exemple : combien de
notes de fin d'année (écoliers, lycéens, étudiants, centres de formation), de
documents, administratifs, de papiers d'identité sont photocopiés et légalisés
par an et par citoyen ? Et un faux document au départ devient légal et accepté
partout une fois «légalisé». Et il y a moult solutions pour des mairies, des postes
qui travaillent encore avec le stylo, du papier carbone et trente six tampons.
Le maintien de
certains équilibres, avec des coûts dangereusement élevés, qui seront
rapidement dépassés, coïncident avec des regards différents de l'Europe et des
USA sur la stabilité du régime et du pays, eu égard à la guerre menée contre le
terrorisme, n'occultent pas forcément des formes de laxisme qui font peser de
réels dangers sur les libertés fortement inscrites dans la loi suprême. Divers
sectes et courants religieux, des activistes salafistes,
de plus en plus nombreux, exercent au quotidien de fortes pressions. Ces
dernières sont le pain quotidien dans des cités, villages et quartiers, avec
des cibles privilégiées. Les femmes, la jeunesse, les bars, les codes vestimentaires
sont soumis à un contrôle sournois mais incessant. La politisation outrancière
de certaines mosquées et apprentis «oracles» distillent des intolérances envers
les consommateurs d'alcool, les non jeûneurs, la petite communauté de non
musulmans (censés être respectés et protégés) au mépris de l'article 36 de la Constitution. Ces
archaïsmes managés et souvent protégés par des institutions, ne militent pas
pour une réconciliation de tous, pour un vivre ensemble dans les différences
protégées par les lois et la police qui n'ont rien à voir avec le politique et
encore moins avec la théologie. Les sources de blocages, les hommes et les
forces qui bloquent les réformes seront, en cas de «révolution», les premières
victimes des colères populaires. Les exemples foisonnent qui incitent à
accélérer la démocratisation.
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Posté Le : 29/09/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Abdou B
Source : www.lequotidien-oran.com