L'on annonce une réforme bancaire de deuxième génération. Nous n'avons pourtant pas vu passer la réforme de première génération. Depuis le remplacement du coquillage comme monnaie d'échange par la monnaie à valeur symbolique, la banque algérienne n'a pas beaucoup changé.Il en va de la banque comme de l'école : on ne cesse de la réformer pour ne pas avoir à la réformer. Quand l'école est prisonnière du choix idéologique, lui-même déterminé par un choix politique incompatible avec la formation du citoyen intellectuellement autonome, la banque, de son côté, est l'otage d'un modèle socioéconomique conçu pour assurer une répartition autoritaire et clanique de la rente.Aujourd'hui, la banque algérienne a, aux yeux de nos dirigeants, ce paradoxal statut de mal nécessaire. En effet, quelle fonction a-t-elle, autre que ces trois ou quatre tâches de simple trésorerie : réceptionner les salaires et pensions que les bénéficiaires viennent retirer à leur guise, héberger les comptes des entreprises, commerces et professions libérales qui veulent bien procéder à des dépôts, délivrer les crédits que le pouvoir octroie par son intermédiaire et domicilier les comptes des opérateurs autorisés à transférer.L'on peut, aussi, travailler et prospérer sans passer par la banque, en encaissant et en déboursant des "sachets", les commerçants étant, depuis 2011, officiellement dispensés de l'usage du chèque par une résolution de Conseil interministériel. Selon le professeur Mebtoul, l'informel "régit" la moitié de l'économie ; cette même moitié de l'activité, qui touche à la production, à la distribution et au commerce international toléré de contrebande (friperie, parfumerie et cosmétique, petite électronique, médicament, etc.), n'a nullement besoin de recourir à la banque, puisqu'elle a ses propres circuits de change et de transfert. Et, il en va de même pour la spéculation foncière et immobilière. Où les procédés de blanchiment d'argent sont multiples : payer des employés ou services non déclarés, des artisans clandestins, ou encore surpayer des joueurs de football ne nécessite ni factures ni chèques.Dans ce contexte de l'informel, les administrations et les entreprises publiques demeurent les dernières entités tenues de faire passer l'ensemble de leurs opérations financières par un compte bancaire.Cette situation ne procède cependant pas d'une perversion fonctionnelle de la banque ; mais d'un choix politique encourageant la prolifération de circuits informels de circulation d'argent. Le système rentier, ne pouvant se payer le luxe d'une transparence autour des diverses sources d'enrichissement illégitime créées à l'intention de ses clans et clientèles, a été amené à tolérer un système de contournement du réseau bancaire. Ce qui fait qu'il n'y a plus de rapport entre l'activité bancaire et celle économique : la société fonctionne, elle-même, en banque ; elle thésaurise, accumule, échange, se prête, se garantit... Culturellement, elle n'est plus qu'un recours. Presque un mal nécessaire.Dans de telles conditions, quel sens et quel objectif peut-on sérieusement appliquer à une réforme ' Si l'on se refuse à moraliser la vie économique et réhabiliter l'autorité fiscale, la banque restera ce qu'elle est, à savoir l'expression d'un système organisé pour l'enrichissement occulte, basé sur la sélection politique.M. H.musthammouche@yahoo.frNomAdresse email
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Posté Le : 16/09/2014
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Mustapha Hammouche
Source : www.liberte-algerie.com