Chaqueannée, les avocats donnent libre cours à leur colère. En théorie, ils sontconsidérés comme des acteurs essentiels dans le fonctionnement de la justice.En pratique, ils sont considérés presque comme des intrus. La justice au«quotidien» dans les cours montre à quel point ce métier est à peine «agréé». Onsait pourtant qu'une bonne gouvernance s'évalue principalement à celle del'indépendance de son système judiciaire et à l'aune du respect scrupuleux desdroits de la défense. Quand des avocats disent que les choses vont mal, il fauts'en inquiéter sérieusement car ils ne défendent pas seulement leur métier maisaussi les droits des citoyens à une défense correcte. Officiellement,la justice connaît un grand chantier de réforme; mais apparemment, les avocatsne la rencontrent pas dans l'exercice de leur travail. Et ils le disent sansdétour, sans langue de bois, en utilisant des mots forts. Si les avocats sont ànouveau en colère et qu'ils se lancent dans un mouvement de grève, ce n'est paspour des motifs purement corporatistes. Dès lors qu'il s'agit d'une réactioncontre le «piétinement» des droits de la défense, cela ne peut qu'interpellerle citoyen. Tantmieux si cela est dit avec vigueur. Abdelmadjid Silini, président de l'Uniondes barreaux algériens, homme plutôt connu pour sa pondération, s'est livré àun véritable réquisitoire contre une chancellerie qui a réduit la professiond'avocat à une «série d'interdits». Et, de manière assez inhabituelle, il amenacé de sanctions les avocats qui ne respecteraient pas le mot d'ordre degrève. A l'évidence, maître Silini n'avait guère besoin de cette menace tantl'exaspération des avocats est grande. Mais il a donné le ton en dénonçant une«déformation de la réforme», des «pressions sur les magistrats» et une «justiceaux ordres». Voilàun constat de praticiens de la justice qui a tendance à confirmer l'image d'unejustice encore sous la coupe de l'exécutif. Cela signifie surtout que lepréalable constitutionnel de l'indépendance de la justice n'est pas encoreaccepté. Car il ne s'agit pas de s'arrêter aux nombreux incidents d'audience quiopposent magistrats et avocats et aux conditions matérielles du fonctionnementde la justice. On est là dans l'effet et non dans la cause. Lesavocats pointent ouvertement du doigt un environnement institutionnel quitarde, en dépit des discours, à se réformer, à accepter une justice où lesavocats sont là pour apporter la contradiction nécessaire. Les avocats ont lesentiment qu'ils font face à une entreprise permanente de grignotage des droitsde la défense.Ilest en effet surprenant d'apprendre que des instructions ont été données auxauxiliaires de la justice de ne rien communiquer aux avocats. Pourquoi laremise d'une carte de visite à des détenus suscite des poursuites judiciairescontre des avocats ? Les interrogations indignées des avocats algériens ontl'air de signifier que la réforme de la justice tant vantée n'est qu'uneopération cosmétique. Que l'on est encore à l'année zéro de la réforme...
-
Votre commentaire
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Posté Le : 31/05/2007
Posté par : sofiane
Ecrit par : Par K Selim
Source : www.lequotidien-oran.com