'Jai vu des hommes résister sous la torture, j'ai vu des hommes endurer tant de souffrances mais j'ai vu aussi des hommes succomber devant l'argent.' Ces trois observations ont été annoncées par Kateb Yacine vêtu de sa légendaire chemise rouge distinctive lors d'une conférence animée et enregistrée à Alger à la salle de cinéma l'Algeria dans les années 1980, et diffusée récemment par la BRTV (Berbère Télévision). Ce triumvirat de vérité demeure encore, hélas, une répétition et souvent à une plus grande échelle.
On torture encore, on continue de faire endurer des souffrances autant qu'on soudoie et on fait succomber encore avec de l'argent. Ainsi le mal et la faiblesse se côtoient et s'accompagnent sur les longs sentiers des parcours. Cela reste une image affligeante. Kateb s'est longuement attardé sur les ouvrages 'argentés' et complaisants écrits et produits à l'orientation d'abord et à la commande ensuite. Ce fléchissement devant l'argent par ceux qui manipulent la plume a terriblement affecté l'auteur de Nedjma.
Dans un dialogue qu'il a eu avec Jean-Marie Sereou au coin le Poète comme un boxeur ', paru aux éditions du Seuil en 1994, Kateb a considéré que refuser de fléchir, même pour un seul jour est en soit un soulèvement car pour lui, la mission d'un poète est avant tout un engagement. Il disait : 'Le vrai poète, même dans un courant progressiste, doit manifester ses désaccords. S'il ne s'exprime pas pleinement, il étouffe. Telle est sa fonction. Il fait sa révolution à l'intérieur de la révolution politique ; il est, au sein de la perturbation, l'éternel perturbateur. S
on drame, c'est d'être mis au service d'une lutte révolutionnaire, lui qui ne peut ni ne doit composer avec les apparences d'un jour. Le poète c'est la révolution à l'état nu, le mouvement même de la vie dans une incessante explosion.' Comme Shakespeare, Kateb considère l'argent comme étant le plus redoutable moyen de la perversion et de la confusion de toutes les qualités humaines et naturelles.
Certainement que nul n'a réussi et peut-être même n'a osé s'approprier et encore moins soudoyer Kateb qui a travaillé à faire sortir le peuple de sa torpeur enveloppée de mensonges.
Ce poète libre, ce romancier affranchi, ce dramaturge dégagé de toute obligation, ce conférencier au franc-parler, ce 'perturbateur' a était présenté par la journaliste Marina Da Silva dans un texte paru au journal le Monde diplomatique de novembre 2009 à la rubrique 'Des mots qui pratiquent des Bréchets' comme étant 'Nedjma, cette étoile inaccessible ' en tout cas irréductible'.
Un homme qui a été un témoin oculaire des tragiques événements du 8 Mai 1945, alors qu'il n'avait que 16 ans, ne pouvait être que marqué par la torture, la souffrance et la faiblesse.
L'auteur de Palestine trahie, cette cause juste qu'on trahit encore et de partout, hélas, a échappé aux hommages les plus alléchants, les plus trompeurs, les plus 'argentés' et les plus troubles.
A. A.
kocilnour@yahoo.fr
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Posté Le : 10/04/2012
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Abdennour Abdesselam
Source : www.liberte-algerie.com