Algérie

Rediffusion des 1001 nuits à la Présidence



Le principe narratif, couplant à la fois l'urgence desauver sa vie, le souci d'offrir une trame valable et l'obligation d'inventerau fur et à mesure, est connu des conteurs habiles : le Roi, et pour tuer letemps, tue une femme presque chaque soir après l'avoir épousée. Pour ce Roi, celase passe chaque soir durant la nuit. Pour Bouteflika,cela se passe avant le Adhan. Il ne tue pas de femmesmais convoque des ministres et les écoute en plissant les yeux avec soupçon eten affûtant des couteaux cérébraux. Homme connu pour ne se nourrir que dedattes et de souvenirs du non-alignement et de Bandung, le Président auditionneses ministres et ces derniers font comme Shéhérazade : ils inventent au fur età mesure leurs mille et un chiffres pour sortir vivants de cette situationfondatrice du conte et de la narration ludique et salvatrice. C'est pour sauversa tête que la femme inventa le murmure des mille et une nuits et c'est pourcette raison, que les ministres convoqués promènent Boutefikasur un tapis volant et frottent sous ses yeux des statistiques jusqu'à enprovoquer le génie dormant. C'est du moins ainsi que les pauvres Abassides prolétaires de l'époque et le peuple sournoisd'aujourd'hui voient les choses. Il s'agit d'unsomptueux bobard avec un enjeu fondamental : le plaisir de la narration oul'orgasme de la décapitation. Assis au pied du Calife, chaque ministre déballesa sacoche et raconte. Raconte quoi ? Comment on a convaincu l'eau de venir duSahara à la bouche, comment on a pu extraire plus d'impôts aux commerçants rienqu'en leur caressant les joues, comment tout va si bien dans l'Empire que lepeuple ne peut que revoter à vie et comment tout marche vers l'avenir rienqu'en appuyant sur l'interrupteur avec le bout de la langue. Il est supposé queBouteflika n'est pas idiot, mais tout le monde saitqu'une femme finit par avoir l'oreille de son homme et qu'un ministre quiraconte bien son histoire finira par sortir la tête basse mais encore rattachée.Personne dans le tas ne se demande pourquoi c'est Bouteflikaqui auditionne les ministres et pas le Parlement, et pourquoi il le fait sansmême la présence d'Ouyahia vizir récemment nommé. Personnene s'interroge sur les modes de cette gouvernance par fausse moulinette et ceque l'on veut dire à la fin entre un ministre qui répond comme un répondeur automatique face à un Président qui lui fait desremontrances en lorgnant vers les aiguilles de l'horloge léguée par Zeroual. Cesont les mille et une nuits locales. Il faut y croire et admettre ce qui ensuit ou les rejeter et en rire jusqu'à la chute de Carthage.




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