Algérie

Réda Hamiani (Président du FCE) : « Les industriels doivent rencontrer les agriculteurs »



 Vous avez fait un constat qui montre que le secteur de l'agro-industrie est quasiment déconnecté de la production agricole. Quelles en sont les raisons, selon vous '  Les raisons sont différentes , dont le libéralisme qui a délité le système. Aujourd'hui, l'industriel trouve plus facile d'importer les matières premières et les intrants qui lui sont nécessaires que de s'approvisionner sur le marché local. C'est ce qui a compliqué l'état du secteur agricole, confronté actuellement à des crises importantes. L'exemple le plus frappant est celui de la production de tomate dont une bonne partie n'est pas exploitée. Nous importons du concentré de tomates de Tunisie, de Chine et de Turquie, alors que nos usines sont fermées. Lorsqu'on cherche à connaître les blocages, on constate, entre autres, que la tomate, dans sa variété et son prix, n'a pas été produite pour cette activité.  Que faire '  Justement, ces réunions ont pour but de mettre en présence les différents acteurs afin qu'ils apprennent à travailler ensemble et à s'écouter. Il y a une bonne disponibilité des uns et des autres, en plus d'un accompagnement déterminé du ministère de l'Agriculture et du Développement rural. Nous sommes ici en tant que facilitateurs et un trait d'union entre tous les acteurs, à condition qu'il y ait plus tard d'autres réunions par secteur entre les agriculteurs et leurs représentants et le monde agro-industriel.  Concrètement, comment faire pour les rapprocher ' Les mécanismes nécessaires existent-ils déjà '  Il ne faut pas tout attendre du ministère ou de l'Etat. Il faut que les opérateurs prennent eux-mêmes l'initiative de se rencontrer. Il faut bien sûr multiplier ce genre de rencontres et, surtout, créer des espaces intermédiaires avec des chambres agricoles, des chambres de commerce et des associations professionnelles. Ce dialogue doit se construire et se renforcer tout en évitant de le faire systématiquement avec le ministère en charge du secteur. Ce dernier n'est là que pour encadrer, accompagner et appuyer les initiatives. Concrètement, les industriels devraient maintenant rencontrer les agriculteurs et leur proposer des contacts, leur fournir des techniciens pour que les variétés produites soient aux normes et, éventuellement, leur avancer de l'argent pour qu'ils puissent acheter des semences. Tout ce travail technique, il faut le réinventer parce que nous l'avons un peu perdu avec les facilités accordées par le libéralisme. Il faut dire, cependant, que le secteur agricole, malgré tous les efforts qui ont été faits, n'a pas encore donné le plein de ses capacités.  Certains affirment qu'il faut quand même un minimum de logistique et d'infrastructures pour que les deux parties commencent à travailler ensemble. Effectivement, il faudrait que le gouvernement accorde des crédits pour la réalisation des chaînes de froid, la fabrication de cagettes, etc. Il faudrait aussi opérer des rapprochements entre les petites terres agricoles et initier des opérations de remembrement pour les rentabiliser. Il y a toute une série de mesures d'accompagnement qui doivent être entreprises et facilitées par le ministère. Mais ce dernier veut que les acteurs reprennent leur rôle, en ce sens qu'il ne peut pas se substituer à chaque fois aux uns et aux autres. Il a déjà décidé de lancer des prêts à taux bonifié, mais il faudrait également que les industriels fassent un effort pour rencontrer les producteurs, leur proposer des programmes et leur confirmer l'achat des produits à travers des conventions.  L'objectif est-il de parvenir à l'autosuffisance ou à pouvoir exporter ' Il faut oublier le concept de l'autosuffisance. Nous ne sommes pas en mesure d'être suffisants dans le blé, le lait, la pomme de terre et autres produits alimentaire. Actuellement, si la crise financière mondiale s'aggrave, ce sera du « sauve-qui-peut » et chacun protégera ce qu'il produit chez soi. On peut même arriver à des situations extrêmes où des pays décideront de ne plus vendre leurs produits. La question de la sécurité alimentaire, qu'il faut manier avec beaucoup de précaution, est importante mais d'un autre côté, nous manquons d'eau et de terres agricoles. 3% seulement de ces terres sont cultivables.


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