Algérie

Rebonds : La culture n'a pas de prix !



Rebonds : La culture n'a pas de prix !
Le modèle tlemcénien, peut-être le plus emblématique, constitue une matière riche, suffisamment représentative de l'Islam en Algérie pour permettre de poser les bonnes questions et d'apporter les bons éclairages. Il faut vraiment avoir eu le temps d'apprécier le prix de la non-culture pour se rendre compte à  quel point la culture n'a pas de prix. Cela, les incultes ne le savent pas. Ne dit-on pas que «celui qui ne sait pas qu'il marche dans l'obscurité ne cherchera pas après la lumière '» Tlemcen, capitale de la culture islamique, avant elle Alger, capitale de la culture arabe, et plus tard peut-être d'autres manifestations de même dimension dans d'autres villes d'Algérie, contribuent au rayonnement culturel de l'Algérie à  l'échelle internationale, mais également à  la réconciliation de l'Algérien d'avec des pans entiers de son histoire et de sa culture et au recouvrement de la mémoire collective, voie royale pour la compréhension du présent et la construction de l'avenir. Cela à  un moment où l'Algérie se relève et tente de relever tous les défis que lui imposent plus de dix années de violences et un contexte international mondialisé économiquement et politiquement contraignant.LE DEVOIR ET LE PRIVILÈGE DE LA DIFFÉRENCEMais, dirions-nous, pourquoi «Tlemcen, capitale de la culture islamique», alors qu'il est connu et reconnu que l'Islam est partout le même, vécu dans ses rites et ses actes de piété selon des règles fixées à  jamais du plus profond Orient, jusqu'au plus extrême Occident ' A la réponse à  cette question est suspendu le principe même de la civilisation humaine érigée comme une unité et structurée par des différences, dans le continuum spatio-temporel, exhibant, à  qui voudrait ne pas les ignorer, les originalités qui fondent les cultures, ces cellules qui constituent la ruche de la civilisation humaine, dont la civilisation musulmane est l'une des composantes.Comprendre la culture islamique en Algérie, ses traits distinctifs, ses sources d'inspiration, ses originalités et ses différences, c'est d'ores et déjà soumettre la matière cultuelle et culturelle de l'Islam à  l'épreuve de sa rencontre d'avec les cultures berbère, hispano-mauresque, méditerranéenne, africaine, tout en considérant l'effet de toutes ces influences et les brassages qu'ils supposent sur le peuple algérien. Le modèle tlemcénien, peut-être le plus emblématique, constitue une matière riche, suffisamment représentative de l'Islam en Algérie pour permettre de poser les bonnes questions et d'apporter les bons éclairages.La manifestation telle que l'esprit en est rendu à  travers les différentes activités qui en fondent la matière, pose en tout cas comme primordiale la question identitaire, à  la fois d'appartenance transcendentale au monde musulman, et de droit à  une différence positive et originale. Une question dont la réponse, certainement plurielle, devrait constituer, à  terme, une précieuse matière pour les théologiens, les philosophes et les historiens, mais aussi pour les politiques, dont désormais le devoir est de savoir manier l'idéologie et non la manipuler.UN ISLAM CONSTRUCTIF ET CONSTRUCTEUR «Tlemcen, capitale de la culture islamique» est certes tout un programme en matière de réflexion théologique et philosophique dans un monde où les âmes chancelantes, en Occident comme en Orient, sont tentées par un choc des civilisations. Mais si elle est le fait d'un véritable contexte international et régional, la manifestation est également le plus grand des prétextes. Sous les monarchies où foisonnaient également festivités religieuses et «moussems», la tradition voulait qu'à chaque fois le Roi devait élire une ville pour en faire son principal lieu d'escale. Cette seule élection de la ville faisait sa fortune et incitait les notables et les autorités locales à  y mener des projets dans tous les domaines qui étaient au fondement futur d'une prospérité extraordinaire. N'est-ce pas là un prétexte formidable à  un rayonnement dans tous les domaines que s'offre Tlemcen pour réhabiliter son patrimoine, son histoire, ses lieux de mémoire et tant d'autres aspects moins tangibles de la culture qui servent autant les âmes que les esprits, quand par ailleurs ils peuvent constituer une matière précieuse pour la reconstruction d'un fonds touristique millénaire ' Tlemcen «l'andalouse» est d'ailleurs à  l'Algérie ce que Fès est au Maroc, le réceptacle d'une culture très riche qui peut briller encore de tout son éclat quand on fournit à  ses détenteurs l'occasion et la raison d'en lustrer chaque recoin pour mettre en valeur à  la fois la somptuosité d'une culture plurielle qui a su puiser son bien partout où elle l'a trouvé, et la particularité d'un Islam constructif qui n'a jamais promu l'exclusion ni l'intolérance. Tlemcen, capitale de la culture islamique, est d'un Islam constructif, mais aussi constructeur au sens littéral. Car elle est un lieu où le bâtiment, du culte et du profane, est une matière essentielle pour dire l'appartenance religieuse et culturelle. Que Tlemcen restaure ses monuments religieux et historiques et c'est l'âme de cette ville de religion et de culture qui s'en trouve refondée et restituée à  ses racines originelles.UNE VILLE ET UNE RELIGION DU LIVRENous passons du contexte au prétexte pour arriver, enfin, au texte. Ne sommes-nous pas issus d'une religion du Livre ' Le livre, celui né de la temporalité, fait de l'espace et du temps sa matière primordiale tout en demeurant le fruit de l'expérience humaine. Tlemcen articule un espace-temps, à  travers son histoire, qui suscite tant de témoignages, de recherches, de productions livresques, qu'il s'agisse de travaux sur le patrimoine, d'essais sur la culture, de littérature, de peinture, de musique, d'architecture, etc. La manifestation qui s'inaugure dans la ville des Zianides a fait écrire sur Tlemcen tous les Algériens en mesure de produire une parcelle de savoir, traduisant une réalité qu'on a failli gommer avec les instruments de l'oubli, à  savoir que l'Algérie a soif de sa culture que tout un chacun œuvre désormais à  défouir des sédiments de l'amnésie, et cela, quoi qu'il puisse en coûter. Car il y va d'un bien précieux que nul ne peut prendre en charge à  la place des Algériens : la (re)-connaissance de soi qui définit, en ces temps des confrontations fatales, la façon avec laquelle nous devons aller vers les autres. 


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