Batna - Nassira Belloula Azouz

Rebelle en toute demeure, (Récit) - Éditions Chihab, Alger, 2003



Rebelle en toute demeure,  (Récit) - Éditions Chihab, Alger, 2003
Écrit par Nassira Belloula, Rebelle en toute demeure, un livre paru aux éditions Chihab, est un récit suscitant une forte émotion, tenant grandement en haleine le lecteur tant l’écriture est sobre et fluide, et l’histoire narrée est authentique et prenante. Le récit est palpitant, se présentant en deux tableaux opposés.

D’abord, la narratrice évoque, par le biais de ses souvenirs, certes lointains mais constamment présents en elle, le passé, elle parle de son enfance, de ces années où l’innocence se mêlait à la beauté, l’amour à la générosité et l’amitié à la complicité. La narratrice transporte un lecteur, fasciné par la richesse des tableaux qu’elle dépeints, dans un univers attachant, semblable à celui que décrit l’écrivain français Marcel Pagnol dans ses deux livres à la gloire de mon père et Le Château de ma mère puisque la narratrice, enfant, découvre, comme l’enfant de Marcel Pagnol, la terre ancestrale sur laquelle la petite fille, qui a quitté la ville, réapprend les gestes et le langage des siens, découvre d’autres joies et rencontre d’autres gens. Si bien que la narratrice change de tableau, et le décor devient plus sombre, plus funèbre.

Les couleurs deviennent alors ternes, tristes… Ce n’est plus le temps de l’enfance, donc de l’insouciance et de joies multiples, mais celui de la peur et de la tourmente.

Puisqu’elle raconte, à travers ses personnages, la décennie noire, ces années qui ont bouleversé, choqué et traumatisé la population civile. Elle écrit : “Soudain, mes souvenirs d’enfant s’enfuirent par la porte restée béante. Je repris le cours de ma vie là où elle s’était arrêtée, il y a quelques heures sur l’oreiller même où j’ai posé ma tête encore étoilée d’émerveillement. L’enchantement rompu, je regardais ma montre qui marquait minuit. La nuit tant redoutée me harcelait de nouveau par son irascible appétit de cauchemars.

Le temps de l’insouciance était déjà loin et je me retrouvais coincée pour l’éternité dans ces années quatre-vingt-dix où le mal personnifié s’était installé entre nous, dans nos maisons et dans nos cœurs. La réalité aussi amère que pénible reprenait le dessus et je ne rêvais plus, je ne voyais plus cette petite fille qui sautillait à la corde, enveloppée dans son manteau en flanelle rouge et ses gants verts.”

Ainsi, la narratrice, témoin d’une société, script d’une réalité accablante pleine de souffrances, de tourments et de doutes, trouve dans l’écriture un refuge dans lequel elle se rend pour y trouver paix et réconfort ; et par l’écriture, une passion qu’elle cultive dès son jeune âge, elle évoque désormais ses nostalgies, ses peines, ses incertitudes, alors que, jadis, elle aimait errer “dans l’imagination de ses écrits, parfois romanesques, parfois fantaisistes”. Elle écrit : “Mes personnages avaient des étoffes de chevaliers et des amours de troubadours mystiques.

Je me mêlais à eux, il m’arrivait alors de les suivre dans l’extravagance de leurs sentiments confus.”

À présent, ce n’est plus le cas. Ses personnages sont angoissés, harcelés, malheureux, désolés, affolés, perdus, commotionnés, voire assassinés. Ce sont des victimes d’une fatalité écrasante.
Rebelle en toute demeure est “une écriture ancrée dans l’actualité algérienne faite de douleurs et de sang, qui tente, par cette remontée dans le temps des enfances, de chercher l’humain dans l’inhumain, le nommable dans l’innommable, le poétique dans une syntaxe ensanglantée. L’auteur nous livre, ici, un témoignage à la fois tendre et violent”.


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