Algérie

RCD : les jalons du renouveau



"Quand on voit ces débats passionnés autour d'une question, cela traduit la bonne santé démocratique du parti", résume un observateur de la scène politique.Lorsque le député et néanmoins secrétaire national à l'organique et chargé de communication, Yacine Aïssiouane, formula, tard dans la soirée de vendredi, la proposition aux congressistes, celle-ci a fait l'effet d'une "bombe" : changer la dénomination du RCD pour le transformer en parti "progressiste". De nombreuses voix et des sifflets n'ont pas manqué de s'élever sous le chapiteau de l'hôtel, où s'étaient ouverts dans la matinée les travaux du cinquième congrès du parti, pour crier à une espèce de "reniement" qui ne dit pas son nom, selon plusieurs témoignages de congressistes.
Hier encore, à Zéralda, les débats étaient très passionnés, parfois houleux, autour de la question. Pourquoi faut-il changer le sigle d'un parti considéré comme une "marque de fabrique" de tout un combat ' Entre ceux qui se rendent à l'évidence que le sigle "charrie un passif qui hypothèque la redynamisation" du parti, ceux qui y "voient quelque man?uvre dont les contours demeurent flous", ceux qui considèrent qu'il "s'agit rien de moins qu'un reniement", ou encore d'autres convaincus "qu'il faut s'adapter à l'air du temps", le consensus s'annonçait laborieux. Mais beaucoup préfèrent que l'idée "mérite d'être mûrie" avant de procéder au changement de sigle. C'est d'ailleurs l'idée retenue puisqu'il a été décidé, en fin de compte, de reporter la question et de la soumettre à débat au niveau de la base. "On s'est dit qu'il était important qu'il y ait un peu plus de réflexion et d'élargir le débat à la base militante. Il ne s'agit pas de trancher à la va-vite sur ce genre de question", soutient le président du parti, Mohcine Belabbas, auquel le congrès avait renouvelé, la veille, le bail pour un nouveau mandat de cinq ans. Il faut dire que le changement de sigle ne date pas de ce vendredi. L'idée a été lancée depuis un certain temps,
histoire probablement de ne pas heurter les militants, à travers notamment la création d'un certain nombre d'instances qui portent le nom "progressiste".
C'est ainsi qu'ont été créées une instance pour organiser les femmes dénommée "femmes progressistes", une instance pour les jeunes, "jeunes progressistes", "les élus progressistes", les "parlementaires progressistes", les "immigrés progressistes" et enfin un "institut des progressistes", une structure dédiée à la formation et à la réflexion qui se compose de l'école du parti, d'un département d'élaboration des politiques et d'un centre d'information et de documentation qui peut avoir des démembrements au niveau des wilayas. De là à rebaptiser le RCD en parti progressiste, il n'y avait qu'un pas, celui de l'onction du congrès. Mais c'était compter sans une base militante qui ne croit qu'à la force des arguments et non à l'argument de la force. Et sur ce registre, force est d'admettre qu'en dépit du débat passionné qu'a dû susciter la proposition, cela n'a pas empêché son déroulement dans un climat "démocratique", de l'aveu même de congressistes et même de cadres du parti, à l'image d'Abdelkader Groucène. "Quand on voit ces débats passionnés autour d'une question, cela traduit la bonne santé démocratique du parti." "On n'aurait pas vu ça dans un autre parti puisque ce genre de proposition, souvent décidée par la direction, passe comme une lettre à la poste, les congressistes ne sont invités qu'à l'entériner", assure un maire d'une localité de Béjaïa qui a proposé "un vote au niveau de la base militante". À se fier aux témoignages de congressistes, dont nombreux se sont inscrits pour intervenir, ce n'est pas tant le changement de sigle en lui-même qui "pose problème", certains faisant le parallèle avec ce qui s'est passé au parti de la droite française, que les motivations qui le sous-tendent. Et là les spéculations vont dans tous les sens, tout comme les arguments. "Il est temps, au regard du contexte et des mutations sociales, que le parti s'adapte à travers une nouvelle dénomination, comme l'ont fait déjà certains partis, sans que cela pose problème", soutient un élu du parti pour qui une "forme de pédagogie s'impose pour vulgariser ce changement". "Peut-on raisonnablement changer un sigle au risque d'être accusé d'avoir dévié '", s'interroge un autre militant.
Du reste, même s'il est absent, l'ombre de Saïd Sadi plane encore sur le parti. D'ailleurs, certains congressistes n'ont pas hésité à voir sa patte dans cette proposition. Pourtant l'ancien président avait tenu la veille à préciser, lors de son allocution, qu'"il ne s'agit pas, pour moi, de dire ici à des congressistes qui n'ont pas encore entamé leurs débats, ce qu'ils doivent faire, quand, avec qui, ou comment faire". "Cela concerne vos assises et seules vos analyses et évaluations peuvent trouver réponses à ces considérations essentielles à l'avenir du pays et le devenir de votre parti", soutient-il. Rappelant l'engagement des militants d'Avril 80 et les séquences de l'histoire qui ont façonné leur engagement, Saïd Sadi ajoute plus loin : "Je ne voudrais pas donner ici l'impression d'administrer des recettes. J'ai dit à l'entame de mon propos que les méthodes, les programmes, les montages organiques ou les objectifs que vous vous assignez ne peuvent être trouvés dans aucun manuel. Tout cela sera le fruit de vos travaux car aucune période n'est assimilable ou superposable à une autre."
Election du CN, un vote serré
Peu après le report de la question de changement de sigle, les congressistes étaient appelés à élire le conseil national, l'instance souveraine entre les deux congrès. Là aussi, probablement en raison de la jeunesse de l'essentiel des militants, le vote n'a pas été une simple balade de santé puisque, par moments, on entendait des "protestations" ou encore des "contestations". "Si quelqu'un se présente, il doit venir avec des idées", défend un élu. À l'heure où nous mettons sous presse, la liste de la composante du CN, 212 membres, n'est toujours pas connue, laquelle devrait être suivie par un discours du président, la tenue de la première réunion du CN et la désignation du secrétariat national. Mais Mohcine Belabbas semblait satisfait du déroulement des travaux, notamment par la présence d'une pléiade d'acteurs politiques, faisant dire à un observateur qu'il s'agit d'un "congrès de l'opposition", mais aussi du débat autour du changement de la dénomination du parti, comme il le confiera à un confrère : "Il y a eu une participation importante d'acteurs politiques et sociaux algériens à nos travaux notamment à l'occasion de l'ouverture. On leur a même donné la parole pour qu'ils s'expriment en toute liberté. Cela est important quand ça vient d'un parti de la mouvance démocratique. Je suis satisfait aussi parce qu'il y a eu des débats houleux. C'est important qu'il y ait ce genre de débats dans un congrès parce que ça montre qu'il y a des acteurs engagés dans un parti et qui ont des avis à défendre". "Nous ne sommes pas dans un parti de suivistes. On est dans un parti où le débat a toujours été libre et où les uns et les autres interviennent avec des arguments. Il y a aussi une élection pour la présidence du parti avec quatre candidats dont une femme. Une élection supervisée par un huissier de justice", se félicite-t-il.
Karim Kebir
Lire l'intégralité du message de Saïd Sadi en cliquant ici


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