Si le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) a conscience du péril islamiste menaçant les pays de l'Afrique du Nord ayant accompli leurs révolutions, il ne se laisse cependant pas convertir aux thèses fatalistes qui voient l'étendard vert déployé un jour prochain en Tunisie et en Libye. Le parti de Saïd Sadi ne veut surtout pas que «le régime algérien se saisisse de ces secousses pour pousser l'outrecuidance jusqu'à se présenter comme l'ultime rempart contre l'intégrisme, lui qui en fut le précurseur dans la région».
Sofiane Aït Iflis - Alger (Le Soir)- C'est à une lecture lucide, loin des jérémiades catastrophées qui essaiment ici et là, que le RCD invite, après l'élection, le 23 octobre dernier, de l'Assemblée constituante en Tunisie et qui a vu le parti Ennahda asseoir une bonne assise électorale. Le RCD (r)assure que rien n'est irrémédiablement perdu pour les forces progressistes en Tunisie et rien n'est définitivement gagné pour les islamistes. «(…) à l'inverse de son homologue algérien, le régime tunisien a veillé à préserver le système éducatif et le statut personnel des marchandages politiciens. Cet investissement, couplé à la surveillance internationale massive qualifiée, a payé et se trouve à l'origine du civisme qui a fait, qu'en dépit des fraudes précédentes, neuf citoyens sur dix se sont acquittés de leur devoir électoral», note le RCD dans un communiqué rendu public hier, avant de souligner que «ces acquis ont également fait que malgré un lourd passif dont se nourrissent des populismes, les islamistes ne pourront pas disposer de plus du tiers des sièges à l'Assemblée constituante. Mieux, sentant la précarité de leur succès — que d'aucuns assimilent à un hold-up électoral —, les responsables du parti vainqueur ne cessent de jurer qu'ils ne remettront pas en cause le statut de la femme et qu'ils n'attenteront pas aux libertés publiques (…)». Le parti de Saïd Sadi, qui prend ainsi acte de l'attitude d'Ennahda au lendemain de sa victoire électorale, avertit qu'il ne faut surtout pas être dupe de ces promesses faites. «Il suffit de prendre connaissance des déclarations antérieures de Ghannouchi pour savoir quelle direction il prendrait si un rapport de force devait le lui permettre », rappelle-t-il, estimant toutefois qu'il «est capital qu'un mouvement intégriste sortant vainqueur des urnes se sente obligé de donner des gages de bonne conduite à une société qu'il sait rétive et vigilante.» Etant un acteur prépondérant dans l'échiquier politique national, toujours clairvoyant lorsqu'il s'agit d'alerter des dangers guettant la société ou de dénoncer les exploitations politiciennes que le régime fait de tout événement, le RCD ne reste donc pas sans tacler ceux, ici, qui s'usent à vendre leur autoritarisme comme rempart devant l'intégrisme. «Depuis le début des révolutions qui se succèdent dans notre région, le pouvoir algérien n'a eu de cesse de spéculer sur les suites chaotiques qui ne manqueraient pas d'engendrer des mouvements de libération qui ne sont en fait que la réparation historique des détournements des sacrifices consentis par nos peuples pour venir à bout du colonialisme. C'est avec un cynisme non dissimulé que les relais du système se sont saisis de la victoire du parti islamiste Ennahda pour essayer de relancer la rengaine dictatoriale qui veut que seul l'autoritarisme permet d'assurer la stabilité d'un pays ou d'une région.» Le RCD estime, par ailleurs, que les choses ne sont pas irrémédiablement compromises en Libye où le président du CNT avait eu à annoncer que la Charia sera la seule source d'inspiration des lois. «(…) d'autres membres du CNT ont aussitôt pris publiquement la parole pour lui signifier que le peuple libyen ne s'est pas battu pour remplacer une dictature par une autre et qu'en tout état de cause, ses propos n'engageaient que sa personne», fait-il remarquer, avertissant, après avoir mis en évidence la possibilité d'une victoire islamiste aux législatives marocaines de novembre prochain, que «le comble serait que le régime algérien se saisisse de ces secousses pour pousser l'outrecuidance jusqu'à se présenter comme l'ultime rempart contre l'intégrisme, lui qui en fut le précurseur dans la région.» Pour le RCD, la situation postrévolutionnaire en Tunisie est dissemblable de celle que l'Algérie a vécue en 1991. «L'amalgame que joue le système pour assimiler la Tunisie post-révolutionnaire à l'Algérie de 1991 n'est pas pertinent. En vérité, le régime algérien devait être le seul acteur à se réjouir de la victoire d'Ennahda dès lors qu'il a anticipé depuis longtemps tout ce qu'il feint de redouter pour la Tunisie et la Libye ; autant de restrictions que, pour l'heure, les islamistes tunisiens s'interdisent de commettre.» Le RCD note que la chantage à l'islamisme dont les dirigeants algériens inondent les médias est obscène. «Le système FLN a administré la preuve qu'en étouffant les voix des démocrates et en offrant les institutions à l'islamisme, la dictature mène inéluctablement à la théocratie.»
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Posté Le : 29/10/2011
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : S A I
Source : www.lesoirdalgerie.com