Algérie

Raymond Fortin. Président de SNC-Lavalin Maghreb et vice-président principal de SNC-Lavalin internationale



« L?administration doit être à la hauteur des mégaprojets qu?elle souhaite réaliser » La firme internationale québécoise SNC-Lavalin, spécialisée en ingénierie et construction, a inauguré, lundi dernier à Alger, le siège de sa filiale algérienne SNC-Lavalin Maghreb. Son président, M. Raymond Fortin, affirme que la société a ainsi voulu se doter d?un siège "à la hauteur de ses ambitions et pour affirmer sa volonté à être un partenaire à long terme pour l?Algérie?. Il nous livre dans cet entretien ses impressions sur le nouveau contexte économique dans lequel évolue son entreprise et les différents projets à la réalisation desquels elle entend contribuer. Votre société est officiellement représentée par un bureau à Alger depuis six ans. Quel bilan en faites-vous ? Depuis six ans, jusqu?à maintenant, c? était une poussée assez fulgurante du fait que nous sommes aujourd?hui à 1250 employés. Cela dénote l?intérêt que nous portons à l?Algérie et le succès que nous réalisons dans ce pays. Pour le Groupe parmi toutes les filiales qu?il possède, soit 100 filiales à travers le monde, SNC-Lavalin Maghreb est la plus active et la plus implantée. Rares sont les pays dans lesquelles, au-delà des réalisations des projets, SNC-Lavalin intervient, comme c?est le cas en Algérie, en tant qu?actionnaire en accompagnement avec des entreprises algériennes, notamment dans les projets de dessalement d?eau de mer et de l?énergie. Le montant significatif de 4,5 milliards de dinars investi jusqu?ici par la société pourra facilement se chiffrer à 10 ou 12 milliards de dinars dans une année ou une année et demie. Encore une fois, cela dénote l?engouement que l?on a par rapport au marché algérien. Si nous sommes prêts à investir autant d?argent dans ce pays, c?est que nous croyons au futur et à l?avenir de l?Algérie, ses potentialités de développement et les compétences que nous pouvons y apporter par la même occasion. Donc six ans dans le cycle d?une vie c?est court, mais six ans c?est beaucoup pour être arrivé aux résultats réalisés aujourd?hui et nous en sommes très fiers. L?Algérie passe par un nouveau contexte socio-économique. Quelle évaluation faites-vous justement de ce contexte dans lequel votre société évolue ? Durant les 38 dernières années de présence en Algérie, nous avons toujours ?uvré quels que soient les tourments qui se sont passés dans ce pays. Nous avons réalisé des projets dans toutes les régions, même dans les plus difficiles d?entre elles, avec un accompagnement de la part de l?administration algérienne, douanière, militaire ou autre, qui nous a facilité le travail et le développement des opérations. La grande joie que j?ai aujourd?hui est, bien entendu, de voir que la situation a évolué favorablement. Je vois aujourd?hui des régions où nous avons été appelés à travailler (Aïn Defla, Tipaza, Temezguida, Chiffa...), redevenir plus sécurisées. Les projets qui y avaient été lancés nécessitaient la mobilisation de beaucoup d?éléments de sécurité et un minimum de déplacements nocturnes. Aujourd?hui, je remarque que les populations ont regagné la campagne et le développement de ces projets s?est matérialisé réellement par un développement socio-économique de ces régions. Cela fait trois ans déjà qu?on voit une bonne évolution de ces projets, et pour moi, c?est une page de l?histoire qui est tournée et on se penche aujourd?hui vers l?avenir. Votre société est beaucoup plus connue de par ses investissements dans le secteur de l?hydraulique. Aujourd?hui, elle affiche un intérêt certain pour les projets énergétiques. Quelle en sont les raisons ? Effectivement, on dit que SNC-Lavalin est connue pour ses projets dans le domaine hydraulique. Mais c?est quand même récent que la société ?uvre en Algérie dans ce secteur. Cela n?a commencé en réalité qu?en 2002. Avant cela nous étions connus beaucoup plus par des projets réalisés dans le domaine du bâtiment et le domaine industriel. A partir de 2002, nous nous sommes engagés dans des projets dans le cadre du plan d?urgence de sécurité d?alimentation d?eau potable des villes d?Alger et de Skikda. C?est ce qui nous a permis d?ailleurs d?affirmer nos capacités dans cette branche d?activité et d?avoir une continuité de développement dans ce secteur. Le secteur énergétique, quant à lui, est omniprésent chez SNC-Lavalin. Peut-être pas en Algérie, mais il faut savoir que la société a construit durant plusieurs années 150 000 mégawatts de puissance électrique. C?est plus que la puissance de toute l?Europe réunie. Au moment où l?Algérie en fait le besoin et s?ouvre au partenariat avec le secteur privé, il est tout à fait naturel pour nous de nous engager dans un secteur qui est très bien maîtrisé par l?entreprise. De plus, le marché algérien s?éveille par le secteur de l?énergie qui connaît une croissance soutenue par une société classée cinquième producteur international de l?énergie. Cela attire notre confiance et nous incite à mobiliser de l?argent pour soutenir ce développement. Y a-t-il des difficultés auxquelles éventuellement votre société fait face ? Il est certain qu?aujourd?hui l?Algérie s?est engagée dans une série de mégaprojets. Des pays qui investissent 55 milliards de dollars dans des projets avec des délais courts pour les réaliser vont obligatoirement mobiliser des moyens qui vont aller au-delà même des capacités des entreprises nationales. Celles-ci doivent faire appel à des moyens de compétence étrangère spécialisée pour accélérer la réalisation de ces projets. L?Etat algérien attend ça des entreprises étrangères mais il ne faut pas occulter le fait que l?administration locale doit aussi être capable de suivre ces projets. Ce sont des projets de plusieurs milliards de dollars qu?on retrouve très peu même à l?échelle mondiale. Cela oblige nécessairement une haute qualification des capacités de l?administration pour suivre ces projets. L?administration peut bien sûr embaucher des assistants ou maîtres d?ouvrage nationaux ou internationaux mais fondamentalement le maître de l?ouvrage doit être organisé pour gérer ses infrastructures. Je pense que des programmes à même d?aider l?administration à se mettre à la hauteur de la réalisation de ces projets est certainement une nécessité. Vous venez d?évoquer les mégaprojets pour lesquelles l?Algérie a consacré une enveloppe financière conséquente. Quels sont justement les domaines d?investissement pour lesquelles votre société affiche son intérêt ? En fait, il y a deux sortes de projets, ceux qui vont mobiliser des investissements et ceux qui vont faire appel à une expertise en matière de construction, d?ingénierie ou d?exploitation. Pour la construction, je dirais que l?entreprise cherche à s?affirmer par une distinction dans les projets pour lesquelles elle s?intéresse. Si elle n?apporte pas une valeur ajoutée, elle ne sera pas compétitive. Beaucoup de secteurs sont aujourd?hui maîtrisés par des entreprises algériennes et nous n?avons rien à leur montrer. Nous nous intéressons donc à des projets qui sont généralement d?une taille qui correspond à peu près à 2 ou 3 milliards de dinars, des projet qui nécessitent une ingénierie compliquée avec des approvisionnements extérieurs, des capacités de construction et de management, ainsi qu?à la réalisation de projets clés en main. Pour ce qui est de l?exploitation, nous nous y intéressons beaucoup notamment dans le domaine de l?eau et de l?énergie, à savoir les réseaux d?AEP, d?assainissement, les stations de dessalement et les centrales thermiques. Ce sont des projets qui font définitivement partie des activités de développement de l?entreprise. Quant aux projets qui demandent des investissements financiers propres à l?entreprise, nous comptons nous limiter au secteur de l?eau et de l?énergie car, pour ce qui est des autres secteurs (transport ou infrastructures routières), le marché algérien ne s?y prête pas tout à fait pour le moment. A propos d?infrastructure routière, SNC-Lavalin est-elle intéressée de prendre part à la réalisation du grand projet de l?autoroute Est-Ouest ? Nous avons une très grande expertise dans le domaine autoroutier et nous avons réalisé, au fil des cinq dernières années, une implication dans plus de 4000 km d?autoroutes. Certaines ont été réalisées en engineering d?autres en construction et d?autres encore en concession. En Algérie, compte tenu de la complexité de ce projet et des délais courts accordés pour le réaliser, nous pensons que nous sommes à la hauteur de contribuer à la réalisation ce projet. Nous avons retiré le cahier des charges avec l?intention de répondre à l?appel d?offres et nous espérons faire une bonne offre. Peut-on connaître le chiffre d?affaires que réalise la société en Algérie ? Le chiffre d?affaires de la société est de l?ordre de 4 milliards de dollars canadiens, soit 240 milliards de dinars. En Algérie, notre propre chiffre d?affaires a été l?année dernière de 450 millions de dollars canadiens, soit 20 milliards de dinars. Sur le plan de l?éthique, bien que votre groupe soit connu pour ses actions menées dans le cadre de la préservation de l?environnement, il a été cependant la cible d?une campagne lancée par certaines ONG qui dénoncent le fait que la société fournit des munitions pour l?armée américaine occupant l?Irak. Qu?en dites-vous ? A mon niveau, je ne suis pas au courant de cette information. Il est vrai que nous avons un département SNC-Lavalin technologie qui fournit des armements et des munitions pour l?armée américaine. Cela étant loin de mon secteur, je ne saurais vous répondre.


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)