Algérie

Randonnée de Bab el Kantara à Ibn Ziad par le djebel Kerkera



En ce matin du lundi 24 mai 2010, on se rencontra Aïssa Filali et Abdelouahab vers 7h00 du matin à la station de bus d’El Kantara. Après les salamalek d’usage, je pris l’initiative de l’itinéraire vers ce djebel, que notre écrivain Malek Haddad, décrit le mont Chettaba comme une gigantesque baleine violette, dans son livre Le quai aux Fleurs ne répond plus.

Par le passé, j’avais eu à accéder à cette montagne dans le cadre des incendies de forêts, et je la trouvai envoutante avec de beaux panoramas sur la région. Aussi, j’étais content de retourner sur ce site, pour mieux le connaître et l’apprécier avec mon ami Aïssa.

Avec une marche énergique, on passa par le pont de Sidi Rached, la place des Martyrs, l’avenue Belouizdad, les cimetières, le quartier populaire El Manchar. Là, on découvrit un petit café avec un certain charme, plantes grimpantes et des tables à l’extérieur. On s’assit, Aïssa prit son petit déjeuner, quant à moi un café presse, que je dégustai en lisant le journal.

Puis des achats pour notre déjeuner en pleine nature et on reprit notre chemin, en passant successivement par le marché et les habitations de la cité El Bir. La veille, il avait plu et le sol était mouillé. Sur la dernière rangée de maisons, on observa des hirondelles avec un nid en terre, en dessus d’une boîte de dérivation et dans le coin. Aïssa, tira son appareil de sa sacoche et prit plusieurs photos de cette espèce qui avait désertée le milieu urbain pour des lieux plus cléments de la périphérie de la ville. C’est ce que j’avais observé auparavant dans le quartier de Chaabathe er sass.


Pour déboucher à la pleine nature, plus qu’un obstacle, on devait traverser une chaabathe sinueuse. Alors qu’on était au bout de notre effort, Aïssa glissa sur une pierre et tomba en plein dans le cours d’eau. Plus de peur que de mal, son caméscope a été épargné et ses vêtements légèrement mouillés avec une eau boueuse.


Delà, on quittait la ville et notre escalade commençait à travers les terrains de culture, collines quand Aïssa observa un chacal ou renard. Le temps de l’observer, il était déjà parti à travers les grandes herbes sans laisser de trace de sa direction. Notre forestier s’approcha du lieu où il l’avait vu et finit par trouver son refuge.

Sur notre parcours des bergers avec leurs vaches ou moutons en compagnie des hérons garde-bœufs. Une image ou plusieurs images insolites qu’on n’avait pas pu photographier, à savoir le héron sur une vache ou un mouton.

En dehors des céréales, le sainfoin à l’état spontané était prépondérant par endroit et selon les saisons. Cas de la région de Békira, certains talus sur la route vers Ibn Ziad. Avec ses fleurs de couleur rouge, en mélange avec d’autres plantes, on avait des compositions florales magnifiques avec une multitude d’insectes qui butinaient ces espèces pour la plupart mellifères.

La forêt du Djebess était devant nous. Aussi, je prenais la décision de la longer sur son côté gauche, afin de faciliter notre progression vers le djebel Kerkera et des observations sur ce massif forestier pour Aïssa et moi-même. Sur notre parcours, il y avait des maisons éparses qu’on devait également contourner. Heureusement, que durant notre progression, il n’y avait point de chiens, qui auraient pu freiner notre marche.

La forêt du Djebess a des reliefs exceptionnels avec un bon réseau de piste qui permet de circuler facilement à travers ce massif de la banlieue de Constantine, que l’association El Mebdoue veut inclure dans son projet de réserve naturelle de djebel Zouaoui. L’espèce qui domine dans ce boisement est le pin d’Alep, espèce résineuse très sensible au feu. Cas de la forêt méditerranéenne dans son ensemble, qui nécessite une meilleure protection pour sa pérennité. Aussi, des travaux d’éclairci, d’élagage sont réalisés pour prévenir ou atténuer les feux de forêts.


Une carrière désaffectée avec une bonne falaise, au milieu de ce boisement peut servir aux exercices d’escalade aux clubs versés dans cette pratique comme Grimp de la Protection civile.


La progression était pénible dans une évolution en ascension et le soleil commençait à taper fort. N’empêche que le moral était au beau fixe et on était content d’être là, d’avoir décidé d’explorer le djebel Kerkera et de continuer jusqu’à Ibn Ziad, en traversant la canton de M’ghraoual de la forêt domaniale de Chettabah, El Azib …pour être ensuite dans l’agglomération de l’ex-Rouffach.


La flore est très riche, certaines espèces sont rares comme l’Iris jaune (Iris Pseudoacorus) ou Souçane el asfeur, appellation locale ; d’autres par contre sont colonisatrices. On peut citer à titre d’exemple la Centranthe (Centranthus ruber) ou Nouar el bellaredj, appellation locale. La richesse de la flore est telle, qui lui faudra consacrer toute une étude, avec la publication de livres appropriées pour l’enrichissement de nos bibliothèques et mettre l’information à portée des utilisateurs.


A ce sujet, l’association aimerait créer tout un musée de la nature où toutes les données de la région seront répertoriées et documentées afin d’offrir aux chercheurs, étudiants…les données nécessaires à leur besoin et également une meilleure connaissance du milieu pour sa préservation et sa gestion.


Pour arriver au pied du djebel Kerkera, on devait franchir un maquis de chêne vert dense sur un terrain très accidenté. Chacun de nous avait pris le chemin qui lui convenait, pour être un moment plus tard, dans une zone dégagée au pied de notre montagne.


Pas de répit, on devait continuer notre marche. Aïssa, plus en forme, était au devant, quant à moi, je commençais à ressentir la fatigue, surtout que le cheminement sur ce versant était trop abrupt et avec une multitude d’affleurement rocheux ou il est difficile de marcher. Après tant d’effort, je devais marquer une pose bien méritée. Ce que Aïssa fit également un peu plus haut que moi. Delà, nous commencions à dominer toute la région de Constantine et de ses tentacules dévoreurs de l’espace rural (djebel Ouahch, Gamasse, plateau de Aïn El Bey, Boussouf, Cité El Bir, Benchergui…).


On prit la ligne de crête comme direction d’ascension, en dessus de la carrière d’agrégats. Delà également, on avait de beaux panoramas sur la région de Zighoud Youcef, Didouche Mourad, piémonts de djebel Ouahch, les jardins de Hamma Bouziane envahis par le béton tel un cancer au stade terminal. Néanmoins, une bonne note, la cimenterie ne dégageait aucune fumée !


A partir de ce moment, plus de trace de Aïssa, il cheminait seul vers le sommet, quant à moi, je faisais un grand effort pour continuer cette escalade au milieu des rochers, qu’il était difficile de franchir. Mais, je maintenais mon effort dans l’ascension car je ne devais pas et je n’avais pas le droit de flancher, pour ne pas faire capoter cette randonnée. Doucement, j’arrivais à maintenir le rythme et je rejoignis mon ami.


Aïssa étant arrivé au sommet, il prenait des photos sur les alentours et il filmait également un aigle royal qui volait sur nos têtes.


Au lieu de pose, au sommet de la ligne de crête, nous faisons une halte pour prendre notre déjeuner, près d’une bâtisse en ruine ou il ne restait plus que les fondations en pierres et briques pleines de couleur rouge.


Ayant sorti, les provisions de son sac en plastique, ce dernier prit son envol, car le lieu de la halte est à découvert et est très vanté. Pas de trace de cet objet encombrant dans les alentours et Aïssa était peiné d’avoir profané ce bout de nature épargné des déchets urbains, qui sont devenus une hantise pour nos élus dans leur gestion quotidienne.


Le déjeuner fut vite pris sur ce sommet paradisiaque et j’avais profité de cet instant pour me faire photographier par Aïssa sur ses ruines avec en arrière plan la ville de Constantine, comme souvenir de passage sur ces lieux, pour mon album photo et documentation sur les milieux naturels d’Algérie. A cette halte, un percnoptère solitaire était passé sous nos têtes en direction de Hamma Bouziane, avec un horizon tumultueux qui perd depuis un certain de sa limpidité…


Aïssa fit sa prière et on reprit notre chemin d’exploration de ce djebel de Kerkera, qui est devenu dénudé par les incendies des trois (03) dernières décennies. Ils persistent une végétation secondaire au milieu des cavités à travers toute l’étendue de la montagne. Pour le chêne vert, sa présence s’est réduite considérablement, même sur le versant ouest ou il était prépondérant.


Un incendie sur ces lieux, il est difficilement maîtrisable par un accès difficile ou seul l’avion pourrait apporter des résultats positifs mais malheureusement notre pays ne possède pas ce moyen de lutte, qui est devenu nécessaire pour combattre ce fléau, qui menace sérieusement notre patrimoine forestier à travers le pays.


Aïssa commençait à ressentir la fatigue. Aussi, je l’encourageais pour qu’il maintienne la route. Notre progression se faisait sur le versant Ouest, avec des vues superbes sur Ibn Ziad, Aïn Tinn, Grarem, les gorges de Tiddis, Azeba Lotfi…Point de sortie par la présence d’une falaise à notre droite, on continuait à marcher sur le djebel Kerkera dans sa longueur, pour atteindre le canton de M’graouel de la forêt de Chettabah. Delà, le relief était moins accidenté, on traversa un maquis dense puis la forêt de pin d’Alep pour aboutir à des enclaves agricoles. Aïssa reprenait des forces après avoir traversé péniblement les différents obstacles.


Maintenant, le terrain était dégagé. Mon collègue profita pour prendre une série de photos sur cette montagne avec les différents peuplements forestiers. Également sur cette itinéraire, des photos sur des oiseaux. Il était ravi de découvrir la richesse de ce milieu en oiseaux, et d’épingler sur son calepin d’autres noms de volatiles.


Au bout d’un chemin, on arriva à El Azib. A proximité du point d’eau, il y avait notre ami Zoubir qu’on salua.


Après s’être désaltéré, un brin de toilette et les réserves en eau, on reprit notre chemin sur Ibn Ziad par la route goudronnée. Au bout d’un quart d’heure de marche, un véhicule s’arrêta à notre signal et nous voilà soulagé jusqu’au centre urbain de fin de notre randonnée. L’automobiliste qui nous prit avec lui était content de nous montrer les belles pommes de terre qu’il venait d’acheter auprès des fellahs de la mechta d’El Azib. J’en profitai pour informer notre ami et président Ali de notre arrivée, après l’avoir informé de notre départ dans la matinée.


Notre rendez-vous était fixé au café de El Hachemi. Ce qui fût fait au bout d’un instant par notre ami du jour, qu’on salua chaleureusement. On rentra au café, une limonade et gâteau pour Aïssa et un café pour Abdelouahab.


Après avoir repris nos forces, notre ami ne songea plus qu’a rentré. A l’arrivée du bus sur Constantine, Aïssa s’empressa de monter et je le suivis. Aussi, j’avais tenu à informer Ali de notre départ précipité…


C’est ainsi que se termina notre très belle randonnée à 16h00 de l’après-midi.


Aussi, j’invite les gens de Constantine et d’Ibn Ziad ou d’ailleurs…de faire de même et de nous faire part de leur découverte, sensation… par des articles, reportages cinématographiques… n’est ce pas Abdelaziz !



Fait à Constantine le 12 juin 2010

Dans le cadre d’une contribution citoyenne

sur les milieux naturels d’Algérie

par Abdelouahab Karaali


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