Algérie

Ramdhan et ramdam



La scène s’est déroulée, il y a quelques années, mais elle aurait pu avoir lieu hier ou avant hier. Le train, cheval métallique grisé par sa propre vitesse fonçait alors vers Constantine. De paisibles voyageurs étaient dans un wagon. Parmi eux des Russes qui devaient descendre à Boumerdes. Quelques passagers somnolaient, d’autres étaient plongés dans la lecture d’un journal quand s’éleva un brouhaha. Un jeune homme venait d’être chassé du wagon à côté car certains ne supportaient pas la musique. Il avait beau protesté que ce n’était que du chaabi, des chants glorifiant Dieu et son prophète, rien n’y fait. Ceux à qui cela déplaisait ne voulaient rien savoir. Ils lui intimèrent aussitôt, sans préalable, avec forces gestes et éclats de voix, l’ordre de changer de rame. Tout se termina par une violente dispute, le jeune ne consentant qu’à baisser le volume qui n’était pas gênant. Face à la mine perplexe des Russes qui visiblement n’ont rien compris à ce ramdam, un jeune homme eut la bonne idée de prononcer devant eux, le mot Ramadhan. «Ah !» s’écrièrent-ils tous ensemble, la mine soudain éclairée comme s’ils avaient tout compris. Ils n’avaient plus besoin d’explications nécessaires qui dans ce cas précis s’avéraient superflues. Ces jours ci, de passage au marché, sur le trottoir ou dans à la poste, ne soyez pas trop curieux si vous surprenez une dispute. N’allez pas trop loin. Ne demandez pas de dessin. Si un badaud cherche à en savoir plus dites simplement, «c’est Ramadhan». Le prétexte qui explique la plupart des scènes qui empoisonnent notre vie quotidienne est là, aussi éclatant qu’un croissant dans un ciel sans nuages. Même la musique n’arrive pas à adoucir les mœurs. Si d’aventure vous êtes témoin de scènes ou se mêlent cris et gestes de colère, pas besoin de trop chercher le responsable. Ramadhan en coupable idéal, explique et justifie la plupart des emportements. Même la musique qui, dit-on, adoucit les mœurs se révèle impuissante à ligoter les instincts d’agressivité.


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