Le mois sacré du Ramadhan est aussi une étape d’évaluation de soi-même. Foi, piété et ferveur se confondent dans un magma culturel que le conteur manipule avec aisance dans ses interminables récits. Ce n’est pas un artiste itinérant comme l’entendent les gens raisonnables : il participe à l’élaboration de l’histoire de son temps et de son pays, de la famille et de la société qui l’ont modelé sans parvenir à le corrompre des injustices et des bonheurs de ses contemporains. Il se doit sans doute plus encore d’être vivant parmi les vivants. Seuls des enfants immatures peuvent encore se demander si ses contes sont utiles. Dans la riche période lyrique où le medah se confondait avec le Goual, il eut cette réplique du grand maître souffi maghrébin, Abderrahmane El Medjdoub, dont le nom tient de l’errance et la méditation qui ont fait de lui le prédicateur de la société maghrébine toute entière. L’art de narrer les problèmes de la société a pour devoir de donner une issue aux angoisses, disait-il. Le Medh serait, donc, une poésie lyrique par lequel on rythmait les soirées culturelles par des incantations et louanges au Prophète (QSSSL). Durant toute la période du Ramadhan, les récitations du Coran, psalmodies se confondent dans un medh lyrique. A ces chants, nous dit Sidi Abderrahmane, «même les chameaux sont sensibles au point qu’en les entendant, ils oublient le poids de leurs charges et la longueur du voyage et qu’ainsi excités ils étendent leurs cous n’ayant plus d’oreilles que pour le medah. Ils sont capables de se tuer à force de courir». Or, nous dit toujours Cheikh Abderrahamane, en s’appuyant sur les louanges de Sidi Hadi Berak Ledjmal (dresseur de chameaux), ces chants de medah ne sont rien d’autre que des poèmes de dialogue et monologues. En effet, cette poésie populaire qu'est le medh est aussi un art musical, plus précisément un tarab, cette émotion musicale qui aboutit à l'extase. Cette culture populaire revêt une immense richesse, même si elle fût surtout transmise oralement pour enrichir la connaissance de ce patrimoine poético-musical qu’est le medh dialectal. Son origine est un conte mélodique issu d’une culture authentiquement bédouine qui remonte au XXIe siècle, et emprunte modes au melhoun, sous une forme littéraire profane en contradiction avec la structure classique de la Qasida. Il est un imposant corpus de poèmes et de chants véhiculés par une double tradition orale et manuscrite, représentant un art plus élaboré des formes de versification en arabe dialectal.
Posté Le : 02/08/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Mohamed Bentaleb.
Source : www.horizons.com