Algérie

Raisonnables syndicats autonomes !


Que faire de l'argent du pétrole ? La question est posée ouvertement dans la presse depuis la flambéedes cours pétroliers; elle l'est également par les mouvements de contestationsociale pour une amélioration du niveau de vie. La réponse est connue: l'Etats'en charge à travers ses gros investissements dans les infrastructures.On sait que le secteur privé n'est guère satisfait d'unedémarche qui fait la part belle aux entreprises étrangères et dans laquelle lesentreprises algériennes n'ont même pas accès à la sous-traitance desmégaprojets. Pour leurs dirigeants dépités, l'aubaine pétrolière passe sans queles entreprises locales en bénéficient. Or, proclament-ils, sans entreprises, pasde production et pas d'économie. Sans pouvoir d'achat non plus, renchérissentles syndicats autonomes, qui expriment bien le ressentiment général d'un pays richehabité par des citoyens qui vivent mal.Existe-t-il une solution ? En Libye, le colonel Kadhafi, sensibleà la grogne d'une population qui ne voit pas l'effet de l'afflux des billetsverts du pétrole, a décidé de distribuer directement une partie de la rente auxLibyens: 4.150 dollars pour 500.000 familles libyennes ou 830 dollars parindividu. Mensuellement ! Bien sûr, cela ne fait que près de 4 milliards dedollars à distribuer à 3 millions de Libyens sur un budget qui tourne autour de40 milliards de dollars. L'impact sur les finances publiques n'est pas énormeet, ici comme ailleurs, la comparaison avec l'Algérie ne vaut pas raison. Maisle plus intéressant est l'argumentaire développé par le Guide pour prônerl'allocation directe: les ministères ont été défaillants dans la gestion debudgets généreux de 37 milliards de dollars et l'administration s'esttransformée en un trou noir qui absorbe les capitaux sans créer de richesse. Distribuerde l'argent aux ménages de manière régalienne et sans contrepartie risquesurtout de pousser les Libyens vers davantage de consommation.C'est là l'aveu d'impotence d'une administration qui nepeut ou ne sait canaliser des ressources vers la population. Le pari libyenconsiste donc à espérer qu'une partie des citoyens se risque dans des activitéséconomiques même au prix d'une poussée inflationniste. Au-delà de l'orthodoxiefinancière malmenée, et même si le colonel Kadhafi ne l'avoue pas, il a touchédu doigt un problème politique sensible: le contrôle, inexistant ou très faible,de la gestion de la rente.Ce ne sont pas les parlementaires algériens qui vontconvaincre qu'ils exercent ce contrôle sur les ressources, historiquement à labase de la naissance des parlements dans le monde. Le geste de Kadhafi n'estpas aisément transposable dans un pays cinq fois plus peuplé. Et il ne seraitqu'un cautère médiéval sur une jambe de bois actuelle. Mais il est difficiled'ignorer que le soubassement politique n'est pas dissemblable ici et là-bas. C'estune organisation socio-économique où la rente est gérée exclusivement par lehaut qui fera rêver, ici, d'un saupoudrage à la libyenne.Les syndicats autonomes algériens n'en font pas leur chevalde bataille. Ils se gardent de reprendre la boutade populaire: donnez à chacunsa part de pétrole et de gaz et que chacun se débrouille. Ils restent sur unterrain économique plus classique et plus durable en revendiquant uneamélioration substantielle du pouvoir d'achat, inséparable d'une dynamisationéconomique.Les mesures de Kadhafi, qui essaye d'écorner les pesanteursde sa propre bureaucratie, montrent bien que nos syndicats autonomes - que legouvernement refuse obstinément d'écouter ou de reconnaître - s'inscrivent demanière responsable dans la rationalité économique.


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