L'Algérie comme le Maroc tentent d'endiguer les contestations sociales et politiques en agissant sur le levier des prix des produits de base, notamment ceux des carburants qui absorbent une proportion croissante des budgets consacrés au soutien des prix. Au Maroc, le gouvernement veut remplacer la subvention générale par « l'aide directe » ciblée. Plus facile à dire qu'à faire. En Algérie, en dépit des mises en garde des économistes, le statuquo prévaut... Jusqu'en 2014 '
Le gel des prix des produits subventionnés sur une très longue période, suivi d'un ajustement brutal et douloureux en période de raréfaction des ressources financières est une expérience que l'Algérie a déjà connue au début des années 1990. Comment éviter de se retrouver dans la même situation dans quelques années ' Dans ce domaine la réflexion et la volonté politique ne semblent pas être au même degré d'avancement dans les 2 pays. Le gouvernement marocain, dirigé par Abdelilah Benkirane, veut aller vite vers la réforme de la subvention des produits de large consommation devenue trop lourde, selon lui, pour le budget de la Caisse de compensation. Les céréales, le sucre cristallisé, l'huile, le gaz butane, le pétrole et le gaz lampant et certains produits de services sont actuellement subventionnés. Il veut s'attaquer d'abord à la révision de la subvention des produits pétroliers qui est passée de 10 à 30 milliards de dirhams entre 2007 et 2011, pour qu'à terme, elle ne bénéficie qu'aux « nécessiteux » ainsi qu'aux couches moyennes. Le budget global absorbé par la Caisse de compensation en 2011 pour le soutien des prix des produits de large consommation a dépassé les 45 milliards de dirhams (environ 4,3 milliards d'euros), soit 5,5% du PIB. Un fardeau jugé excessif par les autorités marocaines qui veulent le ramener à 3% du PIB. Parmi les propositions avancées pour régler ce problème figure l'octroi d'une aide financière « directe » aux catégories démunies et marginalisées et à une partie de la classe moyenne. « A travers cette aide, le gouvernement permettra à la Caisse de compensation de retrouver sa vocation principale, à savoir ''le soutien et la préservation du pouvoir d'achat des catégories démunies» déclarait le ministre en charge de ce dossier. Mais l'idée butte toujours sur les mécanismes transparents à mettre en 'uvre pour que l'aide arrive à ceux qui doivent en bénéficier. Au Maroc, la question de la subvention est posée régulièrement par les pouvoirs publics ' qui se heurtent à des résistances -, ce n'est pas encore le cas en Algérie où ce sont les économistes qui soulèvent régulièrement le problème. Chakib Khelil a bien essayé d'augmenter les prix du gasoil... mais les députés, qui n'ont fait preuve d'indépendance que sur cette question, l'ont régulièrement retoqué.
Algérie : un coût financier considérable et méconnu
Une étude internationale récente a montré que l'Algérie figure dans le peloton de tête des pays où les carburants sont le moins cher du monde. Le coût financier de la politique de subvention des carburants mise en 'uvre depuis des décennies est resté, jusqu'à une date récente, indéchiffrable. Le coût du soutien des prix des produits alimentaires est relativement bien connu, environ 300 milliards de dinars (3 milliards d'euros) par an selon la dernière loi de finance. Par contre, la subvention des produits énergétiques n'est pas mesurée avec précision du fait car elle s'opère par d'autres moyens que le budget de l'Etat, essentiellement sous forme de rachat des dettes des entreprises concernées par le Trésor public. Une récente étude du PNUD place l'Algérie parmi les pays arabes qui subventionnent le plus les produits énergétiques : près de 11 milliards de dollars (quelque 800 milliards de DA) ont été consacrés à la subvention des prix de l'énergie en 2010. L'étude précise que l'électricité a profité de 2,1 milliards dollars (quelque150 milliards DA) de subventions, tandis que les carburants ont coûté 8,5 milliards de dollars (environ 650 milliards de DA). Ces subventions représentaient, selon l'organisme onusien, 6,6% du PIB algérien en 2010. Le ministre des finances, Karim Djoudi a indiqué la semaine dernière que les deux chambres du Parlement seront informées par le Gouvernement, dès la présentation de la prochaine loi de finances, du coût annuel des subventions accordées aux produits énergétiques. « Nous sommes en train de travailler actuellement au ministère des Finances pour quantifier ces subventions pour que la prochaine loi de finances permette au Parlement de prendre connaissance du montant des subventions non budgétisées. Ces montants ne vont donc pas être budgétisés mais affichés sur le budget à titre indicatif » a précisé le ministre. Pas question donc pour l'instant de relever les prix de l'énergie et des carburants, mais on saura au moins ce que leur subvention coûte à la collectivité nationale. Pour ce qui est de la révision des prix à la hausse, même si le consensus sur le caractère globalement néfaste de la politique de gel des prix des produits énergétiques semble aujourd'hui s'élargir, sa remise en cause devra néanmoins attendre des jours meilleurs et un calendrier politique plus favorable. Elle pourrait être sérieusement à l'ordre du jour une fois passée les échéances électorales de 2014.
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Posté Le : 26/03/2013
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Yazid Taleb
Source : www.maghrebemergent.info