Algérie

«Quoi de plus de joyeux que cette liberté que nous vivons '»



A la tête de la Commission électorale indépendante chargée d'organiser les premières élections libres de Tunisie, il savoure la «joie de la liberté». «On a traversé des moments très difficiles, mais j'ai vécu des moments de grand bonheur. Que peut-il y avoir de plus joyeux que cette liberté que nous vivons '», lance Kamel Jendoubi dans un entretien à  l'AFP, à  Tunis.
L'espace d'un instant, la fatigue disparaît, un large sourire éclaire la barbe poivre et sel des derniers jours. Conscient de la «tâche colossale», «cruciale» qui repose sur les épaules des 16 membres de sa commission, il estime avoir évité les plus dangereux écueils. «Le plus grave pour une élection, c'est le soupçon. Je crois que nous sommes parvenus à  garder la confiance des électeurs», dit-il, à  cinq jours du scrutin.
Installée en mai, l'Instance supérieure indépendante des élections (ISIE), en moins de six mois, a revu les listes électorales, a formé 50 000 agents, a choisi plus de 7000 bureaux de vote à  travers le pays, a lancé une campagne de sensibilisation. «Le bonheur, c'est de voir que 4 millions de Tunisiens se sont inscrits volontairement sur les listes électorales (sur un corps électoral estimé à  7 millions)», affirme Kamel Jendoubi, qui souligne la maturité de ses concitoyens face à  l'enjeu «historique» du scrutin. `
Architecte solitaire d'un processus dont le ministère de l'Intérieur – disqualifié par des années de bourrage des urnes – a été exclu, l'ISIE a résisté aux pressions du gouvernement et de certains grands partis qui «étaient fermement opposés au report des élections» initialement prévues le 24 juillet.
Fils de docker, formé à  l'université arabisante de la Zitouna à  Tunis, Kamel Jendoubi est saisi par le virus du militantisme pendant ses études, à  Paris. Il défend les droits des migrants puis ceux de tous les Tunisiens à  travers la Fédération pour une citoyenneté des deux rives (FTCR) et le Comité pour le respect des libertés et des droits de l'homme (FTCR), devenus au fil des années les deux grandes voix de l'opposition en exil.
Combattant de la liberté
«Défenseur de la liberté, Kamel ne renonce jamais. Ce n'est pas un idéologue, c'est un défenseur acharné de la liberté. Il a été le premier d'entre nous à  défendre les droits des islamistes, avec lesquels il n'a rien en commun», raconte Mouhieddine Cherbib, son vieux compagnon de lutte. Privé de son passeport pendant dix ans, il foule à  nouveau le sol de son pays le 17 janvier, trois jours après la chute de Ben Ali. A 59 ans, malgré le cancer qui le taraude depuis 15 ans, il «plonge» dans une nouvelle aventure, prend le risque de «se fracasser la tête».
«Ce qui m'a le plus attiré, c'est le lien avec le citoyen. Je n'ai pensé qu'à l'électeur, à  l'électrice à  qui on a dénié pendant toutes ces années le droit de choisir librement», explique celui qui a décliné des postes d'ambassadeur et de ministre proposés par le pouvoir intérimaire. Interrogé sur ses ambitions politiques après le vote, il éclate de rire : «Ma seule ambition est que la Tunisie reste démocratique.» Lui veut prendre du temps pour «approfondir (sa) connaissance de la géographie humaine» du pays.
«Le projet de l'ancien régime était d'instrumentaliser à  son avantage les compétences des élites et de marginaliser les autres. Le pays doit retrouver la dignité de vivre», plaide-t-il. «Nous sommes chanceux parce que nous avons un Etat qui fonctionne, chanceux parce que nous avons une administration, peu importe ce qu'on en dit. Les choses avancent.»

 


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