Algérie

Questions d'éducation



«Non à Benbouzid» est ce cri d'alerte que lancent des élèves à travers Internet, pour attirer l'attention des pouvoirs publics sur une rentrée scolaire qui se fait, encore une fois, à coups d'a priori.

L'on se souvient quand des lycéens avaient décidé de descendre dans la rue pour crier leur détresse face à des conduites politiques qui ont pris l'habitude de travestir la noble mission de l'école. C'était en janvier 2008, on les entendait crier dans les rues pour que tout le monde sache que l'école était devenue, depuis longtemps, une sorte de laboratoire où les responsables du pays se plaisent à faire des expériences sur les élèves mettant ainsi en péril leur avenir. Ils étaient 7 lycéens à avoir été choisis par leurs collègues pour porter la bonne parole auprès d'Aboubaker Benbouzid. Ils demandaient un allégement des programmes des classes de terminale. « Nous demandons à ce que nos enseignements soient efficients, ils peuvent l'être en nous dispensant convenablement les cours essentiels, ils éviteront ainsi de nous diriger vers les cours du soir», nous disait à cette période les lycéens qui avaient rendu visite à la rédaction du journal. A l'époque, c'est-à-dire, il y a un peu moins de deux ans, l'année scolaire s'étalait sur 27 semaines. A en croire le ministre de l'Education nationale, la durée enfreignait la loi et était bien en decà des normes universelles qui imposent à l'école du monde de travailler pendant pas moins de 32 semaines. Pour faire bien, Benbouzid a décidé que l'école algérienne se mette à l'heure de ces normes universelles, et même plus. « L'année scolaire 2009-2010 s'étalera sur 35 semaines», a-t-il affirmé. Les lycées qui ont demandé en janvier 2008, un allégement des programmes, se voient bien servi cette année en termes de temps. Mais, peut-être qu'une plus longue année scolaire pourrait leur être plus rentable puisqu'ils seront, en principe, en contact avec leurs enseignants pendant 8 semaines de plus que les années précédentes. Et si avec 27 semaines, les enseignants disaient n'avoir pas le temps d'expliquer comme il se doit les cours aux élèves pour les renvoyer tous vers ce qu'ils appellent « les cours de rémédiation», avec 35 semaines, ils auront, peut-être, le temps nécessaire pour être à leur écoute et à leur disposition. Il est utile de noter que toutes les écoles du territoire national orientent pratiquement tous les élèves à suivre ces cours de rémédiation. Le recours quasi obligatoire à ces cours signifie que tous les personnels du système éducatif reconnaissent implicitement que l'école est en déroute. Sauf que ce sont ces mêmes personnels qui les dispensent, qui dans une cuisine, qui dans un garage, pour faire semblant de corriger des erreurs qu'eux-mêmes ont commis. Une situation qui dure depuis toujours et sur laquelle la tutelle ferme les yeux.

 

«Non à Benbouzid !»



 Si, pour cette fois, Benbouzid justifie sa décision d'augmenter le nombre de semaines scolaires par des convenances universelles et modernes, l'année dernière, il n'avait pas cherché à s'en accommoder pour décider de faire admettre en première année moyenne tous les élèves qui n'ont pas réussi à l'examen de la 6ème. Au diable ceux des élèves qui croient en l'effort pour mériter la réussite. De l'élève qui ne réussit pas à son examen de passage mais qui passe quand même, au terroriste qui tue et qui est absous de ses crimes par les effets de la réconciliation nationale et autre amnistie générale à venir, en passant par le harrag qui se fait jeter en prison dans son propre pays au cas il échappe à la mort en mer, il y a tout une nation qui demeure l'otage d'un système politique grabataire et dénué de tout bon sens.

 En l'absence d'une société civile libre et responsable, les élèves adoptent pour cette année un tout nouveau moyen de protestation. «Non à Benbouzid» est un slogan qui est apparu il y a quelques jours sur le net. Des élèves ont décidé de le faire tourner en boucle pour capter un maximum de soutiens et réclamer en coeur le départ du ministre de l'Education nationale. En ces temps où les personnels politiques s'attendent à des changements, il serait malhonnête de penser que Benbouzid est le seul responsable qui prend des mesures sans réfléchir et plonge l'école dans des a priori comme pas possibles.



«N'oublie pas de me flexy 300 DA»

 

 La santé souffre, elle aussi, sans que son ministre ne s'en émeuve. «Je ne travaille pas chez toi !», avait jeté un Docteur à la face d'une maman qui attendait de faire admettre son enfant en consultation.            La scène se passe dans la clinique Bel Air de l'hôpital Birtraria à El-Biar, où ce médecin, qu'on dit spécialiste en chirurgie infantile, devait ausculter des enfants. Il faisait un va-et-vient incessant faisant voir à tous qu'il était pris entre la consultation et le bloc opératoire. « Manich Khadem Andek» (je ne travaille pas chez toi)», avait-il répété encore une fois à cette maman qui attendait depuis 7h du matin et qui s'inquiétait de l'état de santé de son fils. Hippocrate n'aurait jamais penser que son serment énonçant les principes de déontologie médicale se ferait piétiner ainsi dans le dédale d'un hôpital, sans qu'aucun responsable ne réagisse pour rétablir l'ordre et l'éthique. «Je ne vous laisse pas entrer, vous êtes en retard», rétorque à la face d'une étudiante, un agent de sécurité à l'université d'Alger qui s'est empressé de fermer la porte de l'amphithéâtre avec un cadenas. L'école a aussi enfanté des agents de l'ordre public qui ne connaissent rien à l'ordre. «Quelle est votre mission dans ce marché ?», avions-nous demandé à un policier en faction dans un des quartiers de Bab Ezzouar. «Pourquoi demandez-vous ?», dit-il alors qu'il est rejoint par deux autres de ses collègues. Pourquoi laissez-vous ces jeunes faire payer tous les automobilistes des places de parking qui appartiennent à la collectivité ? Lui demandons-nous. «On ne peut rien faire, nous en avons amené quelques-uns au commissariat mais ils les ont tout de suite relâchés», dit-il. «Tout est truqué dans ce pays (Elaâb makhdooû fi hadha el bled)», ajoute-il. Des agents de l'ordre public qui ne peuvent pas faire valoir la loi pour protéger des citoyens de l'arnaque, s'ils ne sont pas passés par l'école de Benbouzid, sont passés par celle de Zerhouni. A Charaba, un des quartiers malfamés d'Alger, un patron d'entreprise privée s'est fait voler son cachet humide. «Je ne peux enregistrer votre plainte que demain», lui répond le policier du commissariat du coin. En ajoutant : «mais une plainte ne peut se faire que si vous payez 2.000 DA». Le patron privé lui dit qu'il n'a que 1.000 DA sur lui. Le policier accepte de les prendre. «Vous savez que 1.000 DA pour vous ramenez un permis, c'est très peu, ça demande beaucoup plus d'argent», dit un gendarme à un jeune qui s'était fait retirer son permis. Le gendarme prend quand même les 1.000 DA mais dit au jeune «n'oublie pas de me flexy 300 DA».




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