Algérie

Que devient Bonatiro et ses inventions '



Quand l'imbuvable Bonatiro sortait ses explications et ses prédictions charlatanesques sur les tremblements de terre, il était encore à la tête d'un organisme scientifique public qui était censé faire autorité en la matière. Seuls quelques scientifiques, souvent de jeunes premiers courageux et enthousiastes, lui ont porté la contradiction. Sinon, une partie de l'opinion ordinaire, pas forcément érudite en la matière, se chargeait de le tourner en dérision. Ils n'avaient pas toujours les qualifications de l'exercice mais ils réagissaient à une évidence : les thèses du sieur Bonatiro étaient tellement grotesques qu'on n'a pas besoin de compétence en la matière pour s'en moquer. Le pouvoir politique et l'autorité... scientifique, eux, se tenaient dans le meilleur des cas au-dessus des deux « antagonistes ». Dans le pire, ils s'arrangeaient pour que les hallucinations de Bonatiro et d'autres comme lui apparaissent comme une... possibilité. La bienveillance était certes discrète mais seulement en apparence, puisque la moindre des choses est d'arrêter de leur offrir crédit scientifique et... fonctions publiques. Bonatiro ne pouvait, dans ces conditions, s'arrêter en si bon chemin ; il a même « diversifié ses activités » en allant sur des terrains pour lesquels il avait autant de qualifications que l'auteur de ces lignes pour la mécanique des fluides ! Un malheur ? ou un bonheur, c'est selon ? n'arrivant jamais seul, il a fini par faire école et susciter des vocations. Bellahmar a été ainsi reçu par le... ministre de la Santé et son inspirateur a été encore plus loin : la mise au point d'un vaccin contre le coronavirus. Enfin, un vaccin ou une thérapie, on ne sait plus, puisque personne n'a relevé la confusion entre les deux que lui a formulée par ignorance grave. On aura remarqué que même dans le cas précis, aucune autorité n'a relevé l'imposture, lui a demandé des comptes, tant l'escroquerie scientifique était flagrante et dangereuse pour la santé publique. Dans la foulée, les vocations ont continué à prospérer. À Djelfa, un bonimenteur a sommé la Direction locale de la santé d'adopter son « remède » miraculeux contre le Covid-19. Sur un plateau de télévision, une chaîne privée a monté une grossière mise en scène où une vieille mégère expérimentait son « test de dépistage» à base de tabac à chiquer et pas plus tard qu'il y a quelques jours à Oran, une bande d'escrocs ont réussi à trouver preneurs pour une vulgaire graine d'épice présentée comme la matière première d'un vaccin contre le Covid-19. Et ils n'y sont pas allés de main morte, puisqu'ils ont commercialisé ça au prix fort ! Dans tous ces cas, on a beau dire que c'est l'Algérien ordinaire qui est plus enclin à croire aux solutions miraculeuses qu'à la rationalité scientifique, c'est d'abord la complaisance des services de l'Etat et la frilosité intellectuelle de beaucoup de scientifiques qui font que l'escroquerie à la connaissance continue de prospérer. Souvent, c'est même chez le citoyen ordinaire que le charlatan trouve les plus farouches... résistances.S. L.


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