Algérie

Qubba de Sidi Amar



Qubba de Sidi Amar
Situation. - Cette qubba funéraire est située dans le cimetière du village dit de Sidi Amar, sur le plateau du même nom (altitude moyenne 90 à 100 mètres), à l'E.-S.E. de Nemours, au milieu d'un bouquet de palmiers et de lentisques, à 400 mètres environ au S.-E. du (Domaine du moulin».

C’est de cette qubba vénéré que le plateau et le village tirent leur nom.

Description. - Elle est elle-même entourée d'une enceinte maçonnée, sensiblement carrée, munie d'une ouverture donnant accès dans une petite cour pavée de briques.

La qubba proprement dite, dont la partie intérieure n'est même pas carrée, est couverte par un dôme hémisphérique légèrement surélevé et surmonté d'un «djâmur » se terminant par un croissant lunaire. Le « djâmur » une tige de cuivre qui couronne la coupole d'un sanctuaire ou les merlons, ou le lanternon d'un minaret. Cette tige traverse une, deux ou trois boules rondes ou ovoïdes (comme dans la qubba qui nous occupe) et se termine, soit en pointe de lance, soit par une étoile au centre d'un croissant lunaire, le tout en cuivre. Ici, l'étoile fait défaut.

Les quatre angles de la construction sont ornés de merlons assez grossiers surmontés eux-mêmes d'un croissant de cuivre.

Une petite porte basse, possédant un heurtoir de cuivre non ouvragé permet de pénétrer à l'intérieur où se dresse un cénotaphe en bois recouvert de coussins, de tapis, de foulards multicolores, d'étendards de soie enroulés et de deux petites boites contenant du « Jawi» (benjoin).

Enfin, du centre de 1a coupole pend, en guise de lampadaire, un œuf d'autruche garni à demi d'une ceinture formée de lanières de cuir.

La légende. - D'après Canal, (Les villes de 1'Algerie : Nemours (Djemmaa-Ghazaouet), (extrait de la Revue de l' Afrique Franc;aise, Paris, 1888, p. 26), cette qubba abrite la dépouille mortelle d'un marabout du nom de El Hadj Sidi Amar, qui vécut vers le XIIe siècle de notre ère. Vieillard vénéré, sollicité à ses derniers moments de faire connaitre le lieu qu'il avait choisi pour sa sépulture, il répondit : « Dieu le sait ; Dieu y pourvoira. Après ma mort, chargez mon corps sur une mule noire) et laissez-la marcher au gré de sa fantaisie. A l'endroit ou elle s'arrêtera, creusez une fosse, ce sera là ma dernière demeure ».

Cette légende est à rapprocher de celles rapportées par R. Basset (Nédromah et les Traras, loco cft., pp. 31 et33, et aussi 71-72), selon lesquelles de nombreux saints sont inhumés à l'endroit où s'agenouillent une chamelle, un chameau ou une mule portant leur dépouille. C'est ainsi par exemple que le corps d'Ahmed el Bedjai « fut placé sur une chamelle à qui on laissa prendre la direction qu'elle voulut. A l'endroit où elle s'agenouilla, on bâtit un tombeau et une mosquée ».

« II y a lieu de croire, rapporte Canal (Le littoral des Trara, Tlemcen, 1886, pp. 148~149) qu'elle n'alla pas bien loin, car la Kouba qui renferme le tombeau de Sidi Amar n'est pas à plus de 300 pas du village. Ce petit mausolée fut construit peu de temps après l'inhumation du saint marabout sur la fosse même».

Selon une légende accréditée à l’époque dans le pays, Sidi Amar et son serviteur noir auraient été assassinés pendant qu'ils priaient, par un homme des Trara qui avait juré de tuer la première personne qu'il rencontrerait sur son chemin, à l'époque où les Suwahliya et les Trara étaient en guerre. On ajoute que le saint homme qui était jeune et célibataire, n'aurait exhalé le dernier soupir qu'après avoir eu le temps de terminer son oraison: Quant à son assassin il fut dit-on, dévoré par les bêtes sauvages alors qu'il s'enfuyait et que sa chair, rongée de vers, se détachait spontanément, légende rapportée par Hadj Bachir Ben Goual.

D'après certains musulmans lettrés et dignes de foi, Sidi Amar s'appellerait Sidi'Amar ben Antar et aurait été originaire de Djebel Antar, nom d’une montagne du Sahara.

Quoi qu'il en soit, le sanctuaire de ce « wali» était sans contredit le plus vénéré de la commune de Nemours, car Sidi Amar est le « moulay al blad», le saint-patron, l'ancêtre éponyme du village. Tous les ans, après le séchage des figues, une « wa'da» (fête patronale) donnait lieu à des sacrifices rituels et à des festins champêtres. On y venait des Beni Mishel, des Suwahliya, des Djbala, des Oulad-:Ziri, de Djama Sakhra, etc. Pour rehausser la fête, les cavaliers et les caïds de ces tribus organisaient une brillante « fantasia», tandis que d'autres exécutaient la « danse du fusil).

On attribuait à Sidi Amar le miracle suivant : un musulman ayant volé des vaches à l'un de ses coreligionnaires à proximité de la qubba, fut tout surpris, après une nuit de marche forcée, de se retrouver, au lever du jour, à l'endroit même ou il avait commis le vol.

On racontait encore qu'un autre voleur du village, que Sidi 'Amar voulait précipiter à la mer, fut sauvé grâce à la généreuse intervention de Sidi Mohammed el Gharib qui demanda à Sidi 'Amar de pardonner afin que le corps impur du coupable n'eût pas à 'passer au-dessus de son propre mausolée. Sidi Amar se serait alors contenté de faire tomber le voleur à mi-chemin entre sa qubba et le sanctuaire de son ami Sidi Mohammed el Gharib.

Le culte du saint. C'était de préférence le jeudi et le vendredi que les dévots faisaient le pèlerinage de son tombeau pour obtenir la guérison de leurs maladies, Sidi Amar ayant la réputation de guérir notamment les maux d'estomac, les migraines et les fièvres. On peut y voir les femmes prélever un peu de terre (imprégnée de la « baraka ») pour l'appliquer sur la partie malade.

D’ailleurs, elles emportaient souvent une petite quantité de terre afin de pouvoir poursuivre le traitement à domicile. Elles ne repartaient pas sans déposer dans une boite quelques pièces de monnaie qui serviront au moqaddem pour l'achat de foulards ou de tapis destinés à la mosquée de Sidi Amar. Certains malades graves passaient la nuit dans la qubba (incubation thérapeutique).

Les femmes s'y rendaient surtout le lundi qui passait pour être le jour le plus propice. Les tirailleurs de la garnison y allaient le dimanche. Quant aux autres musulmans, ils préféraient s'y rendre quand la qubba était déserte.


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)