L'ambassadeur israélien a quitté l'Egypte précipitamment. La vox populi
l'a décrété indésirable. Le printemps arabe libère une colère longtemps
réprimée en Egypte où l'opinion ne tourne pas le dos à la Palestine. Embarras
chez les militaires égyptiens au pouvoir, inquiétudes dans les chancelleries
occidentales. Une démocratie qui exprime la volonté profonde du peuple serait-elle
acceptable ?
Quatre morts et plus de 1000 blessés dont 300 policiers. Le bilan des
manifestations de vendredi contre la représentation diplomatique israélienne au
Caire est lourd. A la mesure de la colère de la majorité des Egyptiens étouffée
sous le régime de Moubarak et qui s'exprime ouvertement dans une Egypte en
transition incertaine. Cette colère est montée de plusieurs crans depuis la
mort, le 18 août dernier, de cinq policiers égyptiens sous les balles
israéliennes à un poste frontalier dans le Sinaï. Les Egyptiens n'ont accordé
aucun intérêt aux «regrets» exprimés par les responsables israéliens et ont
considéré que la réponse des autorités, pourtant relativement fortement par
rapport à la «tradition» Moubarak, n'était pas à la hauteur. Renvoyer l'ambassadeur
d'Israël est devenu un thème de ralliement de tous les courants. Il a été
encore renforcé par la geste ferme de la Turquie qui a décidé d'expulser l'ambassadeur
israélien à Ankara. Mais alors que le gouvernement turc est en osmose avec son
opinion, le gouvernement égyptien de transition est en opposition avec la
sienne.
Des centaines d'Egyptiens ont ainsi tenté d'investir les locaux de
l'ambassade et ont jeté des documents et enlevé le drapeau israélien. Les
manifestants ont détruit auparavant un mur de protection qui avait été mis en
place récemment par les autorités devant la mission diplomatique qui se trouve
dans un immeuble d'une vingtaine d'étages. Les affrontements avec la police
arrivée en renfort ont duré toute la nuit de vendredi à samedi. Les policiers
ont procédé à 19 arrestations. Hier, des véhicules blindés ont été déployés
devant la mission diplomatique, et de nombreux véhicules des forces anti-émeutes
étaient postés aux alentours, sur le qui-vive.
Net décalage entre l'opinion et le pouvoir
L'ambassadeur israélien en Egypte Yitzhak Levanon
a quitté tôt hier samedi Le Caire par avion avec son escorte sous la pression
des manifestants et non à la suite d'un geste officiel. Il y a un très net
décalage entre le mouvement de l'opinion en Egypte et l'attitude embarrassée
des autorités. Des commandos égyptiens sont intervenus pour dégager six
Israéliens bloqués dans l'ambassade. Israël a maintenu le consul israélien pour
les affaires de l'Etat qui est l'adjoint de l'ambassadeur Yitzhak Levanon. Cette manifestation contre l'ambassade israélienne
est bien la fille du «printemps arabe» qui, contrairement aux «souhaits» des
«experts» occidentaux, ne tourne pas le dos au combat des Palestiniens. La
vieille défiance populaire contre l'établissement de relations diplomatiques et
la normalisation avec Israël s'exprime ouvertement. Et met dans l'embarras
l'autorité militaire au pouvoir en Egypte pressée de préserver les engagements
pris par le gouvernement de Moubarak sur la scène du Proche-Orient. Sans
surprise, le président américain Barack Obama a exprimé sa «grande inquiétude» au Premier ministre
israélien Benjamin Netanyahou et a sommé les
autorités égyptiennes de protéger la représentation, a annoncé la Maison Blanche.
Les «inquiétudes» d'Obama
«Le président a exprimé sa grande inquiétude au sujet de la situation à
l'ambassade, et de la sécurité des Israéliens qui y travaillent», a déclaré la
présidence américaine. M. Obama a aussi «passé en
revue les mesures que les Etats-Unis prennent à tous les niveaux pour aider à
trouver une solution à cette situation sans violences supplémentaires, et pour
appeler le gouvernement égyptien à honorer ses obligations internationales de
protéger la sécurité de l'ambassade israélienne». Le ministre israélien de la Défense Ehoud
Barak a téléphoné au secrétaire américain à la Défense Leon
Penetta pour exiger la protection de la
représentation. Sous pression des chancelleries occidentales, les autorités
militaires égyptiennes s'efforçaient de faire bonne figure. La force avec
laquelle la défiance populaire s'exprime contre la présence israélienne et, au-delà,
contre l'ordre en vigueur au Proche-Orient, est pour eux une source de grande
inquiétude.
Le gouvernement égyptien a décidé, hier samedi, de décréter la mobilisation
générale. Les permissions des policiers ont été annulées et le Premier ministre
Essam Charaf a convoqué une
cellule de crise. Il était même question, selon Al-Ahram,
qu'il démissionne pour ne pas «avoir pu contenir les conséquences» des
manifestations pro-démocratie de vendredi. Il faut
noter que les islamistes n'étaient pas partie prenante à cette manifestation en
faveur de davantage de réformes et de démocratie. De quoi éviter les
explications simplistes et confirmer que le rejet d'une représentation
diplomatique n'est pas une demande de «radicaux».
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Posté Le : 11/09/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Salem Ferdi
Source : www.lequotidien-oran.com