Algérie

Quand Ouyahia devient une «option»



A quatre mois de l'élection présidentielle, c'est un scénario catastrophe qui se précise, relevé de plus en plus par les observateurs et les hommes politiques qui, toutefois, se gardent d'avancer des noms.On peut cependant deviner, dans divers propos publics, que c'est Ahmed Ouyahia qui serait choisi pour succéder à Bouteflika en cas de défection de ce dernier : il a le profil idéal pour défendre aussi bien le système que les clans qui le cooptent et il est prompt à recourir aux méthodes les plus musclées pour mater les opposants et les récalcitrants.
Tout récemment, il n'a pas hésité à étaler une lourde agressivité alors même que le pays est à une encablure d'une élection présidentielle majeure. La logique aurait voulu qu'il développe des propos apaisants afin de permettre à l'élection de se dérouler dans de «bonnes conditions».
En bonne observatrice des m?urs du sérail, Louisa Hanoune a relevé le fait qu'Ahmed Ouyahia a donné aux walis des orientations «contraires» aux engagements du président de la République. Elle laisse entendre qu'il a déjà «gommé» le chef de l'Etat et qu il suit d'ores et déjà la feuille de route des clans qui l'ont coopté.
Qui sont-ils ' La production journalistique abonde de noms de personnalités de premier plan qui auraient parié sur lui, se recrutant aussi bien dans le domaine militaire que civil. La première qualité qu'ils lui trouvent tous, cependant, est sa fidélité, au-delà de Bouteflika, à tout le système politique qui couvre l'Algérie depuis la décennie 1970.
Ahmed Ouyahia incarne parfaitement cette idéologie dans laquelle se sont engouffrés les maîtres de l'Algérie après avoir triomphé lors de la crise de l'été 1962 : un zeste de socialisme et un zeste de capitalisme d'Etat auquel il a ajouté un brin de libéralisme sauvage depuis que ce dernier s'est infiltré dans le pays à la faveur des conditionnalités du FMI et de l'ouverture du marché.
Toujours en cours, cette doctrine, si on peut l'appeler ainsi, a été appropriée par les nouveaux acteurs que sont les «nouveaux riches» qui surfent aussi bien sur la rente pétrolière que sur l'invasion de l'informel et, bien entendu, sur la préférence conférée aux importations.
Ce système est arrivé, un temps, à neutraliser toute la société par les excédents financiers qui ont été dégagés durant la longue période de l'embellie financière. La «paix sociale» l'a rendu acceptable auprès des Algériens avant que ne s'abatte une nouvelle crise économique qui commande de nouvelles stratégies autant politiques que sociales et économiques.
Et c'est là, dans l'esprit des clans qui cherchent désespérément une issue de survie au système, que la personne de Ouyahia est intéressante. Il ne s'agit plus de sauver Bouteflika, mais de maintenir en vie les mécanismes, les structures et les hommes qui permettent de préserver les immenses intérêts acquis des décennies durant.
C'est le sens de la formule de «l'homme du consensus», de tout temps mise en relief, dès lors que le système, en danger, se met à la recherche d'une sorte de «sauveur». A la mort de Boumediène, ce rôle avait été dévolu à Chadli Bendjedid, puis à Boudiaf et Zéroual dans les conditions spécifiques de menace de l'effondrement de l'Etat républicain. Et enfin à Bouteflika lorsqu'il fallait, aux yeux des «clans de l'ombre», redonner vie au système ébranlé par l'intégrisme guerrier et par l'ouverture démocratique.
Du fait de sa longévité au pouvoir, son «palmarès», sa personnalité et sa «flexibilité», Ahmed Ouyahia est susceptible de convenir à tous les clans du système. Il leur saurait gré de l'avoir choisi, lui, parmi tous les loups rodant autour des sphères du pouvoir.
Mais ils s'en débarrasseront, sans état d'âme, une fois leurs intérêts sauvegardés et dès lors qu'ils sentiront la nécessité de ravaler la façade du système. C'est ainsi que tourne l'histoire contemporaine de l'Algérie.


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