Algérie

Quand «Noor» et «Sanaouate Dayâa» boostent les cybercafés



Grâce aux deux feuilletons «Noor» et «Sanaouate Dayâa», mettant séparément en vedette Mohamed et Yahia, les cybercafés ne désemplissant guère ces derniers temps.

Une grande affluence, la gent féminine surtout, qui vient voir en avance par rapport à la diffusion télévisuelle les deux feuilletons dans leurs versions originales turques. Le temps d'une heure que dure chacun des deux feuilletons, des jeunes filles en groupe ou seules, même sans comprendre les dialogues, semblent toutes absorbées par les péripéties d'une histoire à l'eau de rose. Un succès phénoménal en Algérie et dans tout le monde arabe, si l'on croit la presse people et les blogs qui ont fait de cette série un filon intarissable en scandales et contre-scandales.

Des produits annexes sont aussi vendus par les cybercafés, tels les posters et autres images animés des vedettes lors de réceptions mondaines qui leur sont organisées à Dubaï et ailleurs. Il y a lieu de rappeler que ces deux feuilletons doublés en langue arabe sont de production turque. Cela ressemble fortement aux novellas sud-américaines qui ont eu le même succès dans tout le monde arabe il y a quelque temps de cela, par l'intermédiaire, toujours, des Syriens et des Libanais.

Les chaînes de télévision satellitaires arabes ont su, en une décennie à peine, marquer de leur label tout le paysage audiovisuel de cette aire qui va de l'Atlantique au golfe Persique. Et ce label, réussi, consiste à offrir des icônes ou des référents identitaires propres à cet univers culturel pour des millions de téléspectateurs en mal de représentations.

Rotana, la chaîne musicale libanaise, à travers ses clips, ses chanteurs aux allures d'Apollon et ses déesses aux mille charmes, en est le parfait exemple. Pourquoi aussi les Syro-Libanais ? Peut-être les plus ouverts du monde arabe de par leur particularisme identitaire et multicommunautaire. L'on rappelle aussi qu'au début du siècle dernier, une vague d'immigration avait mené des milliers d'entre eux en Amérique du Nord et du Sud, parmi lesquels des écrivains notoires et des penseurs consacrés, à l'instar de Mikhael Naïma, Joubrane Khalil Joubrane et El-Manfalouti, pour ne citer que cela. C'est cette communauté qui a, dès le début du siècle dernier, traduit en arabe les grandes oeuvres classiques littéraires. A cette époque où la Syrie et le Liban ne formaient qu'un seul pays, prévalait le romantisme comme courant littéraire majoritaire, engendré par une fin de règne cahoteuse de l'empire décadent (ottoman). Ces écrivains ont excellé dans ce domaine. Simple mimétisme mais d'un retard d'un siècle par rapport à la prédominance de ce courant littéraire en France avec ses Lamartine, Chateaubriand et Mme de Staël. Ce courant chantant l'amertume d'un passé perdu et la déchirure d'un exil forcé prévaut encore dans cette partie du monde tourmentée par les guerres et l'instabilité. Alors «Sanaouate Dayâa» (les années perdues), et c'est la juste complainte, s'explique peut-être par cet idéal apaisant, voire naïf d'un monde sans relief qui, encore de nos jours, se cherche dans des lendemains incertains.




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