Entendu hier matin sur les ondes de la Radio nationale : «N'était l'Etat qui veille au grain, le kilogramme de pomme de terre coûterait aujourd'hui 140 DA au lieu de 80, principalement à cause des intempéries !» Cette assertion n'est pas le propos du représentant d'un quelconque parti politique voulant s'attirer les faveurs du pouvoir en vue des élections législatives, mais le fait d'un responsable de l'agriculture, invité à s'exprimer sur les raisons de la flambée des prix des légumes. Autrement dit, et en exagérant à peine les propos de ce commis de l'Etat, plutôt que de pester contre des pouvoirs publics incapables de réguler le marché et d'avoir failli à leurs engagements (rappelons-nous les mesures de régulation des marchés et de stabilisation des prix promis par les différents responsables il y a deux années à peine), le consommateur algérien devrait, au contraire, leur savoir gré de se couper «seulement» en quatre pour pouvoir acheter un kilogramme de ce féculent et de se saigner «seulement» aux quatre veines pour garantir un repas décent à ses enfants. Plutôt que d'en vouloir à ses dirigeants pour la viande à 1 300 DA et la pomme à 200 DA, il devrait les remercier de pouvoir encore en admirer la couleur ou d'en respirer l'odeur. L'Algérien devrait se satisfaire, que dis-je, se réjouir du pire parce qu'on lui a évité le pis : applaudir des deux mains de mauvaises pièces de théâtre parce que le théâtre n'est pas fermé, accepter la médiocrité de l'école parce que ses enfants sont scolarisés, se taire devant le mépris, l'incompétence de l'Administration et ses piteuses prestations de services parce qu'il jouit de l'électricité, de l'eau et du gaz, et ne pas rechigner devant toutes les avanies du quotidien parce qu'après tout, il vit dans un pays en plein essor et qu'il ne subit pas (encore heureux !) les misères que d'autres populations vivent tous les jours un peu partout sur la planète... C'est, en s'en tenant à sa logique propre, ce que nous suggère ce responsable de l'Agriculture...Mais voilà, les Algériens - et ils l'ont exprimé à maintes reprises et de toutes les manières possibles - ne veulent pas du pire parce qu'ils veulent le meilleur, qu'ils aspirent au meilleur et qu'ils sont en droit d'accéder à des conditions d'existence décentes et à un cadre de vie agréable. Dans ce pays vaste de plus de 2 millions de kilomètres carrés, qui compte à peine 35 millions d'habitants et qui dispose de richesses et de ressources naturelles importantes (ce sont les spécialistes qui le disent), il n'est pas normal que les citoyens aient recours à un deuxième emploi et à l'aide des proches pour pouvoir boucler les fins de mois, se privent de vacances et d'autres petits plaisirs pour faire face aux dépenses du Ramadhan et de la rentrée scolaire ou fassent la queue pendant des heures devant un quelconque guichet pour un quelconque document. Ceci sans parler des cas extrêmes, ces Algériens qui continuent de piocher dans les poubelles et de vivre dans des habitations précaires ou ces écoliers du primaire qui parcourent trois kilomètres pour rentrer chez eux.
Cela n'est pas normal. Comme il n'est pas admissible que des ministres et des responsables de l'Exécutif promettent des changements qui ne viennent pas, que des députés profitent de leur mandat pour bâtir des fortunes et que des partis politiques, disparus pendant cinq longues années, réapparaissent brusquement à la veille des élections.
S. O. A.
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Posté Le : 27/02/2012
Posté par : archives
Ecrit par : Samir Ould Ali
Source : www.latribune-online.com