Algérie

Quand le fatalisme gagne la société algérienne' 23 ans après les événements d'Octobre, le statu quo



Quand le fatalisme gagne la société algérienne'                                    23 ans après les événements d'Octobre, le statu quo
Face aux révolutions qui ont bouleversé le Monde arabe, les Algériens adoptent l'attitude du téléspectateur ennuyé, zappant les évènements qui défilent avec une mine renfrognée.
Pourtant, la révolution, ça leur connaît, ils en avaient fait son métier depuis plusieurs générations. De la lutte pour l'indépendance aux évènements d'Octobre 1988 qui ont propulsé l'Algérie au rang de précurseur en matière de liberté de la presse dans le Monde arabe, l'Algérien a toujours été prompt à exprimer son ras-le-bol.
Que s'est-il donc passé pour qu'il devienne las, complètement dépassé par les évènements ' Dès qu'on leur pose la question, un groupe de jeune s'indigne : «Vous les journalistes, vous voulez absolument que ça flambe. Nous, on veut simplement vivre en paix.» Ils s'insurgent notamment contre «des parties qui veulent créer la zizanie dans notre pays», accusant confusément la France, les Etats-Unis et les sionistes. Vingt-trois ans après les évènements d'Octobre 1988, nous en sommes donc toujours au même point.
Le mektoub qui avait été brandi par nos ancêtres s'est comme transformé en suspicion de «manip». «Le fait est que la génération née dans les années 1980 n'a pas été imprégnée des évènements d'Octobre. Tout ce que nous avons connu, c'est le la violence du terrorisme. Nous n'avons pas ce fantasme d'Octobre des libertés», explique Fawzi, 29 ans. Il ajoute : «Le piège, c'est qu'on nous a vendu un rêve, une démocratie de façade. Et on ne veut plus se faire avoir.» Soit. Mais pourquoi donc cette attitude flegmatique, détachée, comme si l'Algérien, revenu de tout, n'arrive plus à s'enthousiasmer pour quoi que ce soit, si ce n'est pour un match de foot '
«Y'en a marre des révolutions algériennes. On a connu la révolution agraire, la révolution industrielle, la révolution culturelle et on a bien failli passer par une révolution islamiste. Alors maintenant, qu'on nous fiche la paix !», s'exclame L'hadj Mahmoud, un retraité habitant le quartier Belouizdad à Alger. «Et puis, pourquoi une révolution, interroge-t-il, parce que c'est a la mode c'est ça '» Beaucoup d'intellectuels algériens ont repris le refrain du régime : la révolution c'est mauvais, le changement fait peur, notre régime politique est «civilisé» comparé à ses pairs arabes.
«Le peuple veut la faillite du système»
L'Algérien ne serait-il pas finalement trop «fier» pour suivre le mouvement des pays voisins ' Les Tunisiens, considérés comme le peuple le plus docile du Maghreb, nous auraient, selon des observateurs, volé notre «rêve». Il y aurait ainsi, à en croire le romancier Mohamed Kacimi, un sentiment de fierté des Algériens disant : «Nous étions aux origines de tout cela ! Nous sommes dans une espèce de repli honteux sur nous-mêmes, comme si les autres avaient réalisé notre rêve à notre place, surtout par rapport à la Tunisie.»
L'auteur poursuit, dans un entretien publié par El Watan Week-end : «Tant qu'on aura cette rentre pétrolière, il y a cet Etat qui est en mesure de corrompre d'une manière collective. D'autres Etats achètent les voix lors des élections, chez nous, l'Etat achète le silence de tout un peuple !» Cela, les Algériens l'ont bien compris, au point où la blague qui se raconte, en ce moment, souligne que le peuple ne souhaite pas la «chute du système», comme c'est le cas dans d'autres pays arabes, mais veut sa «faillite financière».
Les Algériens ne croient donc en rien, sauf peut-être en le pouvoir de l'argent. Les grèves qui ont repris lors de la rentrée sociale confirment cette tendance. Quant au reste, la société s'accommode du statu quo. En tissant le drapeau blanc de la liberté, l'Algérie, disait-on, a failli se prendre les pieds dans un linceul. Aujourd'hui, Dame Algérie se relève péniblement de sa chute.


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