Algérie

Quand la promesse supplante l'action



Quand la promesse supplante l'action
La course au palais présidentiel d'El Mouradia s'emballe. La pile des lettres de prétention s'épaissit au ministère de l'Intérieur où pas moins de 72 postulants à la compétition ont déjà retiré les fameux formulaires de candidature. Exploitant la faiblesse d'un multipartisme timoré et sans perspectives claires, la majorité des aspirants se présente en candidat libre. Ce phénomène des candidatures indépendantes qui, par le passé, caractérisait particulièrement les élections locales et législatives, s'étend, désormais, à la présidentielle. Depuis le début de l'ouverture démocratique en 1990, toutes les formations politiques agréées, faute de compétence et de volonté requises au traitement des problèmes, usent et abusent de promesses électorales pour séduire conjoncturellement l'électorat. Des serments rarement honorés par leurs auteurs, une fois installés aux commandes des assemblées locales. Discrédités par cette légèreté caractérisée, les partis peinent aujourd'hui à mobiliser autour de «maigres» programmes truffés de généralités et de v?ux pieux. A partir de 1997, on peut dire que le multipartisme algérien est entré dans une crise profonde. Figé dans une conception statique de l'action politique où «la promesse» et la déclaration d'intention occupent une place centrale, tous les partis, ceux qui se targuent d'être majoritaires dans les assemblées élues et ceux qui se revendiquent de l'opposition, peinent à arrimer leur discours et leur doctrine à la dynamique sociale réelle. Ils sont, pour ainsi dire, en déphasage total avec le peuple, même s'ils parlent toujours en son nom pour se donner de la contenance. Dans l'esprit de la base, les partis politiques incarnent l'esbroufe et le mensonge pour appâter des électeurs crédules qui croient aux lendemains qui chantent. Considération qui n'est pas totalement fausse. Car, au lieu de faire amende honorable et se rattraper, les formations politiques, sans exception aucune, élargissent continuellement le fossé qui les sépare de leur environnement naturel, en s'appuyant sur les milieux d'affaires au détriment du peuple souverain. Conséquence : aucun parti ne peut aujourd'hui prétendre à une quelconque représentativité réellement populaire. Pour preuve, quand des conflits ont éclaté en Kabylie ou dans la région du M'zab, aucun parti n'a pu encadrer les manifestations pour les mener à bon port. Ceci dit, et à cause justement de cet état d'esprit, beaucoup de ces solliciteurs indépendants auront certainement des difficultés à réunir les 75 000 paraphes réglementaires nécessaires à la validation de leur candidature. Appréhendant le risque de ce pari, des partis politiques ont opté pour le boycott pour ne pas se ridiculiser. Le RCD, qui a déjà boudé les dernières législatives, se prépare à faire contre-campagne. Idem pour le MSP, qui avait précédemment soutenu les trois mandats du président de la République sortant ! Choix qui reste toutefois difficile à argumenter. Durant quinze ans, ils n'ont absolument rien entrepris pour le changement. Aucune initiative digne de ce nom. Le FFS, toujours sur la réserve, éprouve manifestement des difficultés à dégager une position cohérente à même de sauvegarder sa propre cohésion interne. Le discours islamiste, complètement périmé, a mis cette mouvance dans l'impasse. Pareillement mises au pied du mur, des formations comme le FLN, le RND et des dizaines d'autres appellent de tous leurs v?ux à un quatrième mandat d'Abdelaziz Bouteflika, seule option à même de masquer, pour un temps, leur faillite interne. Un vide qui donne des ailes à des personnalités de tous bords, intimement convaincues de leur bonne étoile. Vivant ici ou outre-mer, d'anciens responsables en disgrâce, des militaires retraités, des intellectuels égocentriques, des économistes téméraires, des entrepreneurs aux griffes bien acérées, des universitaires romantiques et quelques politiques en quête d'aura, se lancent dans la course, comme on va à l'aventure; c'est-à-dire sans grandes idées innovantes ni programmes dûment chiffrés et adaptés à la situation présente du pays. Pour le moment, le citoyen n'a eu droit qu'à des slogans pompeux, des propositions éculées et les inévitables professions de foi. Les jours qui viennent s'annoncent animés. D'ici là, espérons une élévation conséquente des débats pour être à la hauteur de cette échéance capitale. Au lieu de promettre le bon changement, les candidats gagneraient en estime, en focalisant plutôt sur ce qu'ils ont déjà entrepris dans ce sens. L'électeur de 2014 a d'autres soucis que ceux de 2009.Il faut suivre de près cette évolution sociale pour pouvoir répondre juste à ses attentes. On ne s'improvise pas président de la République.K. A.




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