Algérie

Quand l'Etat pousse à l'informel


Les prix augmentent sauvagement et frôlent l'indécence. Les prix fixés à l'humeur sont imposés aux consommateurs par des commerçants sans foi ni loi, souvent eux-mêmes otages d'un environnement corrompu par la déliquescence de ce secteur, cédé aux tenants de l'informel.A El Kala, par exemple, on se plaint, sans plus, de l'augmentation aussi subite qu'incompréhensible et ahurissante des tarifs des taxis urbains. Sans crier gare, du jour au lendemain le kilomètre est passé de 70 à 90 DA. Et personne ne bronche.
Dans les commerces, c'est aussi à l'humeur que les prix sont fixés, et les contrôles, lorsqu'ils s'effectuent, car ce n'est pas le cas faute de moyens et d'agents et de leur rectitude, sont une goutte d'eau dans un océan d'infractions et d'impunités en tous genres. La meilleure preuve que chacun sait est la fermeture impromptue d'une catégorie de commerces un jour donné parce que l'information sur le passage des contrôleurs a fuité. Il est vrai que cette situation n'est pas particulière à El Tarf, mais elle y est considérablement accentuée par le fait qu'il s'agit d'une wilaya frontalière qui fait payer à ses habitants le prix des activités de la contrebande.
Pour les commerçants que nous avons rencontrés, c'est l'Etat qui pousse à l'informel et à la contrebande. «Nos prix sont plus élevés qu'ailleurs à cause du prix du transport de nos marchandises et de l'interdiction faite aux grossistes de s'installer dans la wilaya», disent-ils. Et d'ajouter : «Tous les commerçants en place, toutes catégories confondues, sont en infraction et déjouent la loi, sinon ils baisseraient le rideau.» Le transport vers El Tarf, en tant que wilaya frontalière, est soumis au rayon douanier.
C'est-à-dire que si vous devez circuler avec des marchandises, vous devez préalablement passer aux Douanes de Annaba pour vous munir d'une autorisation de circuler, sinon le transporteur se fait saisir la marchandise qui n'est pas forcément la sienne et se retrouve devant les tribunaux. Les transporteurs, qui acceptent ces tracasseries administratives, ou le risque de se faire prendre, ne vont pas faire de cadeaux. Depuis 2016, il est interdit par le Centre national du registre du commerce (CNRC), toujours dans le cadre de la lutte contre la contrebande, de délivrer dans les wilayas frontalières toute nouvelle immatriculation pour le commerce de gros. Ce qui ne veut pas dire qu'il n'y en a pas du tout à El Tarf. Il y a les anciens que cette disposition arrange beaucoup, puisqu'elle protège contre toute nouvelle concurrence et leur confie le monopole sur certains produits.
Cela ne signifie pas non plus que les produits ne sont pas disponibles à El Tarf. On y trouve de tout comme partout ailleurs, mais c'est l'informel qui approvisionne et à ses conditions. Cela va des fruits et légumes aux articles de beauté, en passant par la quincaillerie et les vêtements. Et personne ne bronche toujours pas.
C'est à croire ceux qui disent que derrière chaque fonctionnaire de la direction des transports et celle du commerce se cache un transporteur ou un commerçant en puissance. On nous rapporte des dissensions au sein de l'Union générale des commerçants et artisans algériens (UGCAA), qui auraient pour motif, curieux du reste, car ce n'est pas habituel, la situation du secteur du commerce et cette scandaleuse anarchie dans la fixation des prix, dont se plaint la population.
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