Algérie

Quand l'Aadl freine la consommation



Quand l'Aadl freine la consommation
Le logement passe avant les quatre rouesFin des rappels sur salaires, flambée des prix ayant entraîné la baisse du pouvoir d'achat, mais surtout Aadl et LPP, ont fait tomber la fièvre «acheteuse». Voilà un petit tempo de la mystérieuse règle de la consommation en Algérie...Il y a de quoi déstabiliser les spécialistes économiques les plus aguerris: la consommation en Algérie est tombée d'un seul coup au ralenti après des années de frénésie! Le meilleur baromètre de ce fléchissement de la consommation est le marché automobile. Lui qui a connu durant la dernière décennie sa période la plus faste avec une croissance fulgurante, est en pleine crise. Fini les carnets de commandes qui n'en finissent pas, avec des longs délais de livraison qui ont permis la création en parallèle du métier de revendeur clandestin de voiture. Désormais, la livraison est immédiate avec des remises qui font tourner la tête! Des rabais qui vont de 100.000 jusqu'à 500.000 dinars! Le Salon international de l'automobile d'Oran (Autowest 2014) en est la meilleure preuve. Lors de ce salon, en plus de ces ahurissantes remises, certains concessionnaires automobiles ont même offert de très beaux cadeaux. Malgré cela, ça n'a pas été le grand rush, nous confirment des spécialistes du domaine. «Cela même été une douche froide pour beaucoup d'entre eux», témoignent ces mêmes spécialistes. Les chiffres officiels sont là pour le prouver. Le marché automobile a connu une baisse de plus de 20% en 2014.Seuls 241 336 véhicules ont été vendus lors de la période qui va de janvier 2014 au mois de novembre de la même année, contre 313.700 véhicules en 2013 durant la même période, soit une différence de 7 905 unités en une année. Il faut signaler que l'année 2013 était aussi une année pauvre pour la vente automobile par rapport aux années précédentes, c'était le début de la crise pour dire l'ampleur des choses! Néanmoins, le marché automobile n'est pas le seul à connaître l'austérité. C'est la période des vaches maigres même pour les voyagistes. Eux qui faisaient de bonnes affaires en cette période de fin d'année avec des voyages organisés pour le Nouvel An, n'ont pas trouvé preneur. «Klinahoum kdoura», pour reprendre le jargon populaire utilisé par un responsable d'une grande agence de voyages de la capitale pour illustrer la situation. «Pour le moment ça ne se bouscule pas au niveau de nos agences, alors que les années précédentes on avait plus de places à proposer durant cette période», affirme d'un air triste et nostalgique ce spécialiste du voyage. Les choses ont donc bien changé en l'espace de quelques mois puisqu'en été le secteur du voyage se portait relativement bien. Mais...!2014: l'année des vaches maigresCe fléchissement de la consommation s'est aussi fait sentir pendant le mois de Ramadhan dernier. Contrairement aux Ramadhan précédents, la «fièvre acheteuse» ne s'est pas emparée de nos concitoyens. Même si les mauvaises habitudes de surconsommation n'ont pas complètement disparu, il n'en demeure pas moins que les affaires n'ont pas été aussi bonnes que d'habitude pour les commerçants durant le mois sacré. Selon la majorité des commerçants interrogés: «Fini les vaches grasses, le temps où les citoyens achetaient sans compter est bien loin...» Ils argumentent leurs dires par les produits alimentaires de grandes marques internationales que les importateurs n'arrivent pas à écouler. «Vous avez dû remarquer les soldes des céréales, chocolats ou autres produits alimentaires de marques qui sont vendus en solde dans les magasins. Eh bien, c'est les gros stocks qui restent aux importateurs et qui sont sur le point de se périmer à cause de la difficulté qu'ils trouvent désormais à les écouler. Chose que vous n'aurez jamais vu dans le passé», témoigne le gérant d'une «supérette» de Rouiba qui propose ce genre de produits.Les vêtements, l'électroménager, la téléphonie...ne sont pas en reste! Eux aussi n'attirent plus foule comme par le passé. Que ce soit pour les soldes d'hiver du début de l'année dernière, ou les soldes d'été, peu d'Algériens ont succombé à la tentation! Il est vrai que la culture des soldes n'est pas forcément ancrée dans les habitudes des Algériens, mais depuis quelques années, ils séduisaient beaucoup de monde. L'ouverture des centres commerciaux de Bab Ezzouar et Ardis, y avaient grandement contribué. Ils avaient remis au goût du jour cette pratique qui existe pourtant dans la réglementation depuis 2006, en organisant leurs trois semaines de soldes au début de l'année et trois autres semaines à la fin de l'été. «Ce qui avait provoqué un véritable rush sur tous les magasins de ces centres commerciaux les premières années», témoigne la gérante de l'un d'eux. «On avait fait de très bonnes affaires», soutient-elle d'un air nostalgique. Oui, nostalgique, même mélancolique, car ça c'était l'année dernière. Selon cette gérante et plusieurs de ses collègues, cette année, c'est la période des vaches maigres pour les soldes de l'année 2014. «Même pour celles d'été qui pourtant ont coïncidé avec l'Aïd el F'itr et la rentrée scolaire», réplique-t-elle en soulignant que pourtant, ces deux évènements sont censés être une période charnière pour les commerçants. «Mais ce n'est pas le cas cette année. Les foyers n'ont pas fait de folie même pour les affaires scolaires, elles ont eu des difficultés à être écoulées», atteste-t-elle.L'«antalgique» qui a fait baisser la fièvre acheteuseMais que s'est-il donc passé' Quel «antalgique» a fait baisser la fièvre acheteuse qui s'était emparée des Algériens depuis quelques années' Est-ce la chute du prix du baril et la peur de l'austérité qui pèsent sur le pays qui dépend des hydrocarbures' «Non! Pas du tout!», répondent les commerçants interrogés. Leur réponse se résume en deux mots: Aadl et LPP! Pour eux, il y a eu une réorientation de la consommation des ménages qui s'est tournée vers l'immobilier. «La relance des formules pour l'acquisition de logements a fait que les Algériens qui sont nombreux à avoir souscrit à ces formules, font plus attention à leurs dépenses. Fini l'argent jeté par les fenêtres. Ils économisent et gardent cet argent dans l'espoir d'être appelés pour payer les premières tranches de ces logements, espoir de toute une vie», témoigne un commerçant de la rue Hassiba-Ben Bouali. D'ailleurs, ces derniers jours beaucoup d'Algériens ont été appelés pour payer la première tranche de leurs logements (21 millions de centimes pour les F3, et 27 millions pour les F4. Ce qui représente 15 fois le Snmg algérien qui est de 1.8 million de centimes, ndlr). Ils économisent donc pour payer la suite de leurs logements dont les prix vont de 210 et 270 millions de centimes (F3, F4). Les autres économisent dans l'espoir d'être appelés pour voir ce rêve se concrétiser. C'est le cas de Mourad, jeune avocat à Alger. «Moi aussi je fais plus attention à mes dépenses en attendant d'être appelé à payer le logement Aadl auquel j'ai souscrit. Par exemple, je changeais souvent de voiture, car avec les prix de l'immobilier en Algérie, je savais que toutes les économies de ma vie, ne suffiraient pas pour acheter un logement, sans ces formules, bien sûr. Alors, j'essayais de me faire plaisir en dépensant mon argent à droite et à gauche», rapporte-t-il. La priorité est donc à l'Aadl, moins d'argent est dépensé pour les vêtements, ordinateurs, voitures...Cependant, ce ne sont pas les seules raisons évoquées par nos interlocuteurs. Ils parlent entre autres de la baisse du pouvoir d'achat des consommateurs qui sont saignés par les augmentations répétitives des produits alimentaires. «On est tous des Algériens. On sait bien que les misérables salaires des citoyens, ne leur suffisent même plus pour couvrir leurs dépenses élémentaires telles que l'alimentation», atteste un fonctionnaire des impôts. D'autres, parmi le groupe de ses «camarades», parlent même de la fin de l'argent des rappels sur salaires qui ont fait suite à l'augmentation massive qu'avaient enregistrée les employés du secteur public. «Les rappels ont tous été dépensés dans les voitures et l'électroménager... Cela fait presque trois ans qu'aucun secteur n'a été augmenté avec ces effets rétroactifs. L'argent est donc fini...», atteste, d'un clin d'oeil qui en dit long, un propriétaire de plusieurs boutiques d'équipements informatiques dans la capitale... Fin des rappels sur salaires, flambée des prix ayant entraîné la baisse du pouvoir d'achat, mais surtout Aadl et LPP, ont fait tomber la fièvre «acheteuse». Voilà un petit tempo, de la mystérieuse règle de la consommation en Algérie...




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