Algérie

Quand Jean-Yves Le Drian met les pieds dans le plat



Le Conseil de sécurité de l'ONU a autorisé jeudi dernier une intervention militaire internationale, plus précisément africaine, au nord du Mali. Mais en assortissant son feu vert de conditions à satisfaire par les acteurs concernés autant d'ordre politique que technique. D'où le fait que sa résolution n'a précisé aucun calendrier au déploiement de la force militaire prévue pour opérer l'intervention.
La complexité et la délicatesse des préalables à remplir énoncés dans la résolution de l'instance onusienne font que la plupart des observateurs estiment qu'ils sont impossibles à satisfaire à brève échéance, ce qui selon eux ne permet pas d'envisager que l'intervention militaire puisse s'engager dans un délai rapproché, en tout cas pas durant le premier trimestre 2013. Point de vue qui est partagé par Ban Ki-moon, le secrétaire général de l'ONU, son envoyé spécial pour le Sahel et le Mali, Romano Prodi, mais également les Etats-Unis et nombre de puissance régionales concernées par les développements de la crise malienne.
Paris et ses alliés africains membres de la CEDEAO sont d'un tout autre avis puisqu'ils se déclarent convaincus que les conditions posées par le Conseil de sécurité sont susceptibles d'être satisfaites au plus vite pour permettre à la force militaire d'intervention d'être opérationnelle sur le terrain dès le premier trimestre 2013. Conviction qu'a assumée péremptoirement le ministre français de la Défense Jean-Yves Le Drian en soutenant dans une interview accordée au quotidien français « La Croix » que l'intervention militaire internationale est bel et bien « possible » à partir du premier trimestre de 2013.
L'étrange est que ce responsable français ait avancé en guise d'argument à son assertion sur la possibilité de l'engagement à brève échéance de la force militaire international, celui de l'inexistence d'une solution politique au Mali. Aux yeux de Paris donc, les médiations qui sont en cours actuellement, les contacts qu'elles ont permis entre les autorités de Bamako et des représentants de la rébellion touareg du Nord-Mali, le rejet par ces derniers du terrorisme et de la criminalité organisée sous toutes ses formes ainsi que leur renoncement à la sécession ne constitueraient pas des avancées rendant envisageable le règlement du conflit malien par la voie du dialogue. A l'évidence, Paris et ses alliés de la CEDEAO ont convenu d'un agenda dans ce conflit malien qu'ils semblent déterminés à mettre en 'uvre malgré les conditionnalités à satisfaire mises par le Conseil de sécurité à son feu vert pour l'intervention militaire.
A Alger, François Hollande et son ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius ont prétendu être en convergence de vue avec leurs homologues algériens sur le dossier malien et le président français avait même affirmé « faire confiance » aux autorités algériennes pour ce qu'elles ont engagé d'initiatives pour rendre possible la solution politique à la crise malienne. Sauf que la toute récente « sortie » du ministre français de la Défense autorise à penser que Paris persiste et signe dans sa vision que l'intervention militaire est la seule solution. En tout cas, ses propos compliquent la tâche pour Alger dans ses efforts à faire dialoguer et négocier les autorités de Bamako et les groupes armés qui se sont déclarés favorables au processus politique. Ces derniers sont en effet légitimes à interpréter la déclaration de Jean-Yves Le Drian comme une déclaration de guerre irrévocable et les premiers s'en prévaloir pour leur fermer la porte du dialogue qui commençait à se nouer.
Décidément, les socialistes français arrivés aux affaires à Paris ne veulent pas apparaître moins « va-t-en-guerre » que leurs prédécesseurs de droite. On sait ce que ces derniers ont fait sans état d'âme dans l'affaire libyenne. Apparemment, les socialistes veulent les imiter dans celle du Mali et peu leur importe ce qu'il en résultera de catastrophique pour toute la région du Sahel et bien au-delà.


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